27/07/2010
Râteau d’honneur
Ou « La lettre dont on ne parlera pas », et c’est bien dommage de ne pas parler de dignité par les temps qui courent !
A coté d’une Légion d’Honneur accordée, acceptée et reçu des mains sales de Monsieur W. par le gestionnaire de fortune de L. Bettencourt ; le projet de donation de deux appartements à la comptable de la même L. Bettencourt, - très probablement un faux glissé dans un des tiroirs du notaire et néanmoins ami de la famille par qui le scandale arrive -, il y a aussi, et c’est très heureux :
- une lettre adressée à un ministre de la République, V. Pécresse, par laquelle son auteur refuse très clairement de servir de caution intellectuelle à une politique «inacceptable». Un euphémisme. Cette lettre est signée par Jacques Bouveresse, philosophe exigeant et connu pour ses positions critiques contre les impostures. A noter que Jacques Bouveresse avait déjà refusé cet «honneur supposé» à Jack Lang.
Il a répondu en Mars 2008, à une interview dans Médiapart qui éclaire les non philosophes sur sa pensée.
Lettre de Jacques Bouveresse à Mme Valérie Pécresse,
ministre de l’Enseignement supérieur
« Madame la ministre,
Je viens d’apprendre avec étonnement par la rumeur publique et par la presse une nouvelle que m’a confirmée la lecture du Journal officiel du 14 juillet, à savoir que je figurais dans la liste des promus de la Légion d’honneur, sous la rubrique de votre ministère, avec le grade de chevalier.
Or non seulement je n’ai jamais sollicité de quelque façon que ce soit une distinction de cette sorte, mais j’ai au contraire fait savoir clairement, la première fois que la question s’est posée, il y a bien des années, et à nouveau peu de temps après avoir été élu au Collège de France, en 1995, que je ne souhaitais en aucun cas recevoir de distinctions de ce genre. Si j’avais été informé de vos intentions, j’aurais pu aisément vous préciser que je n’ai pas changé d’attitude sur ce point et que je souhaite plus que jamais que ma volonté soit respectée.
Il ne peut, dans ces conditions, être question en aucun cas pour moi d’accepter la distinction qui m’est proposée et – vous me pardonnerez, je l’espère, de vous le dire avec franchise – certainement encore moins d’un gouvernement comme celui auquel vous appartenez, dont tout me sépare radicalement et dont la politique adoptée à l’égard de l’Éducation nationale et de la question des services publics en général me semble particulièrement inacceptable.
J’ose espérer, par conséquent, que vous voudrez bien considérer cette lettre comme l’expression de mon refus ferme et définitif d’accepter l’honneur supposé qui m’est fait en l’occurrence et prendre les mesures nécessaires pour qu’il en soit tenu compte.
En vous remerciant d’avance, je vous prie, Madame la ministre, d’agréer l’expression de mes sentiments les plus respectueux. »
Jacques Bouveresse
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