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29/08/2013

Chanson dans le sang

Jacques Prévert, recueil de poèmes : Paroles 1946

Chanson dans le sang...........................

"Il y à de grandes flaques de sang sur le monde
ou s'en va t'il tout ce sang répandu
est-ce la terre qui le boit et qui ce saoule
drôle de soulographie alors
si sage.... si monotone...
Non la terre ne tourne pas de travers
elle pousse régulièrement sa petite voiture ses quatre saisons
la pluie... la neige...la grêle... le beau temps
jamais elle n'est ivre
c'est à peine si elle se permet de temps en temps un malheureux petit volcan

elle tourne la terre
elle tourne avec ses arbres... ses jardins... ses maisons..
elle tourne avec ses grandes flaques de sang
et toutes les choses vivantes tournent avec elle et saignent...
elle elle s'en fout
la terre
elle tourne et toutes les choses vivante se mettent à hurler
elle s'en fout
elle tourne
elle n’arrête pas de tourner
et le sang n’arrête pas de couler...
ou s'en va t'il tout ce sang répandu
le sang des meurtres... le sang des guerres... le sang de la misère..
et le sang des hommes torturé dans leurs prisons...
et le sang des enfants torturés tranquillement par leur papa et leur maman...
et le sang des hommes qui saignent de la tête dans les cabanons..
et le sang du couvreurs qui glisse et tombe du toit
et le sang qui arrive et qui coule à grand flots

avec le nouveau né.. avec l'enfant nouveau...
la mère qui crie.. l'enfant qui pleure..
le sang coule.. la terre tourne
la terre n’arrête pas de tourner
le sang n’arrête pas de couler
ou s'en va t'il tout ce sang répandu
le sang des matraqués..des fusillés..des condamnés..
et le sang de ceux qui meurent comme ça par accident...
Dans la rue passe un vivant avec tout son sang dedans
soudain le voila mort
et tout son sang est dehors
et les autres vivants font disparaitre le sang
ils emporte le corps
mais il est têtu le sang
et la ou était le mort
beaucoup plus tard tout noir
un peu de sang s’étale encore..
sang coagulé
rouille de la vie
rouille des corps
sang caillé comme le lait quand il tourne
quand il tourne comme la terre
comme la terre qui tourne avec son lait.. avec ses vaches.. avec ses vivants..avec ses morts
la terre qui tourne avec ses arbres...ses vivants ses maisons...
la tourne qui tourne avec ses mariages..
les enterrements..
les coquillages
les régiments..
la terre qui tourne et qui tourne
avec ses grand ruisseaux de sang.

 

 

28/08/2013

Roms : les idées reçues

Petite contribution via la LDH de Toulon, via Romeurope et à l'usage de toutes celles et tout ceux qui ne supportent pas les préjugés. Lesquels sont entretenus avec suffisance et virilité pour servir aux frustrés de tout poil qui ont vendu leur temps de cerveau disponible aux réflexions les moins disantes.

roms,préjugés
Papusza

 

Les Roms qui vivent en France ont des droits ... souvent méconnus. Les discriminations [1] dont ils sont l’objet s’appuient sur des préjugés toujours vivaces, conséquences d’une information insuffisante et d’une stigmatisation de la part de certains élus.

Il faut saluer la publication par Romeurope d’un petit livret qui fait le point sur la situation des Roms dans les domaines du séjour, de l’habitat, du travail, de l’éducation et de la santé [2]. Pour contribuer à changer le regard porté sur ces ressortissants européens, nous reprenons ci-dessous l’essentiel de ce document.

DE QUI PARLE-T-ON ?

Dans cette article, le terme « Roms » désigne les personnes venant essentiellement des pays d’Europe centrale et orientale (Roumanie, Bulgarie, pays d’ex-Yougoslavie), qui ont migré en France et qui se reconnaissent comme Roms ou qui sont désignés comme tels. L’arrivée des Roms en France s’est faite en plusieurs vagues migratoires : au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, dans les années 70 et à partir des années 90.

Ces arrivées correspondent ainsi pour l’essentiel à une migration économique, liée aux très grandes disparités de niveau de vie dans les pays d’Europe de l’Est qui sont accentuées dans le cas des populations roms par un phénomène de ségrégation. Concernant les Roms d’ex-Yougoslavie, l’exil fait suite plus particulièrement aux persécutions subies depuis la guerre.

« Les Roms » ne constituent donc pas un groupe homogène : ils n’ont pas la même nationalité, n’ont pas le même profil migratoire, ni le même statut administratif, peuvent avoir des confessions religieuses ainsi que des attaches socioculturelles différentes.

Selon les estimations, le nombre de Roms en France se situe entre 15 000 et 20 000, dont 85% environ sont des ressortissants européens, venant essentiellement de Roumanie et de Bulgarie. Depuis une dizaine d’années, ce nombre est stable.
Parmi tous les Roms présents en France, seuls les plus pauvres d’entre eux sont les plus visibles car vivant dans des squats et bidonvilles.

Depuis 2010, l’État multiplie les discours stigmatisant à l’égard de ces citoyens européens au point d’en faire les boucs émissaires d’une politique sécuritaire. [3]

SÉJOUR

PRÉJUGÉ : « Ils n’ont pas le droit de venir et de séjourner en France »

RÉALITÉ : En tant que citoyens européens, ils bénéficient du droit à la libre circulation.
L’article 21 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne énonce que « Tout citoyen de l’Union a le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres ».
Cette migration, comme toute autre, s’effectue pour des raisons économiques auxquelles s’ajoute la volonté d’échapper aux traitements discriminatoires que les Roms subissent dans leur pays d’origine.

Au même titre que tout autre citoyen européen, les ressortissants roumains et bulgares ont le droit de venir et se maintenir librement en France pendant trois mois. Au-delà de cette durée, le droit de séjour des citoyens de l’Union est soumis à certaines conditions. [4]

Selon le dernier rapport de la CNCDH [5]  : en France, « ces migrants (ressortissants roumains et bulgares vivant en bidonville) sont soumis, en matière de droit au séjour, à un régime particulier, qui les contraint à vivre dans une instabilité et une précarité permanentes, qui ont des conséquences préjudiciables à l’exercice quotidien de leurs droits »

HABITAT

PRÉJUGÉ : « Ils aiment vivre en bidonville »

RÉALITÉ : ce n’est qu’une solution par défaut et non un mode de vie choisi.
A défaut de toute autre solution d’hébergement, ces familles sont contraintes de vivre dans des bidonvilles ou des squats. Leur habitat n’est qu’une manifestation de la politique d’exclusion du marché du travail et une conséquence de la crise du logement en France.

PRÉJUGÉ : « Ils sont nomades »

RÉALITÉ : En France, ils sont contraints à la mobilité du fait des évacuations répétées de leurs lieux de vie.
Ces personnes sont sédentaires dans leur pays d’origine et viennent le plus souvent de milieux ruraux, mais aussi de la ville. Les caravanes que l’on peut voir sur certains bidonvilles sont un abri de fortune pour ces familles et ne correspondent pas à leur habitat traditionnel. Le plus souvent, elles sont mises à disposition par des associations ou des collectivités, en guise de solution.

PRÉJUGÉ : « Ils ne vivent qu’en communauté »

RÉALITÉ : ils se regroupent afin de pouvoir compter sur la solidarité entre les familles souvent venues du même village.
Ce n’est pas un idéal de vie mais le produit d’une migration familiale et une conséquence de leurs conditions de vie précaires.

TRAVAIL

PRÉJUGÉ : « Ils ne veulent pas travailler »

RÉALITÉ : ils travaillent mais sont contraints de le faire dans le secteur informel car la législation actuelle restreint fortement voire empêche leur accès au travail salarié.
En principe, les citoyens européens ont le droit de travailler sur le territoire d’un autre Etat membre de l’Union européenne. Cependant, les ressortissants roumains et bulgares sont soumis à des « mesures transitoires » [6] qui limitent fortement leur accès au travail [7]. Contrairement aux autres citoyens européens en France, ils doivent au préalable obtenir une autorisation de travail et un titre de séjour afin d’accéder à un emploi. Ces formalités sont longues et difficiles à remplir, ce qui décourage les employeurs. Cependant, la plupart d’entre eux travaille pour subvenir aux besoins basiques de leur famille. Ces activités, souvent utiles socialement, pourraient être valorisées.

PRÉJUGÉ : « Ils préfèrent faire la manche »

RÉALITÉ : c’est une stratégie de survie pour assurer les besoins quotidiens de la famille. Mendier n’est pas un crime.
C’est sur cet aspect le plus visible que se cristallise une forte stigmatisation de ces populations. Pourtant la mendicité n’est pas un choix délibéré mais un moyen de survie que d’autres personnes, vivant dans des conditions tout aussi précaires, pratiquent lorsqu’elles ne peuvent accéder à un emploi.

ÉDUCATION

PRÉJUGÉ : « ils ne veulent pas envoyer leurs enfants à l’école »

RÉALITÉ : très souvent, les pouvoirs publics font obstacle aux démarches d’inscription scolaire, en toute illégalité car en France la scolarisation des enfants est obligatoire [8] quelle que soit la situation administrative des parents.
La migration des familles bulgares et roumaines est souvent motivée par la volonté d’assurer à leurs enfants un meilleur avenir.
Alors même que nombre d’entre elles souhaitent scolariser leurs enfants, elles se heurtent à de multiples obstacles tels que des refus d’inscription de la part des administrations ou des maires, des délais d’affectation extrêmement longs, une exigence abusive de documents administratifs, etc.
Même lorsqu’un enfant est enfin inscrit à l’école, le décrochage scolaire est fréquent en raison des évacuations répétées des lieux de vie qui les obligent à entreprendre de nouvelles démarches d’inscription. Par ailleurs, bien des familles sont dissuadées d’envoyer leurs enfants à l’école, de peur d’être séparées d’eux en cas d’évacuation.
En outre, les conditions de pauvreté dans lesquelles vivent ces familles ont un impact sur l’assiduité des enfants à l’école. En effet, la scolarisation représente un coût important : habillement, fournitures scolaires, cantine, transports, etc, alors même que les dispositifs d’aides existant ne leur sont que très rarement accessibles.

SANTÉ & PRESTATIONS SOCIALES

PRÉJUGÉ : « ils apportent en France des maladies »

RÉALITÉ : ce sont les conditions d’extrême précarité dans les squats et les bidonvilles qui fragilisent leur état de santé.
Dans les lieux de vie précaires, les conditions d’hygiène et sanitaires constituent un danger pour leurs habitants, en particulier pour les femmes enceintes et les enfants. En effet, dans la plupart des squats et bidonvilles, les familles n’ont accès ni à l’eau, ni à des sanitaires, ni à l’électricité, ni au chauffage, ni au ramassage des ordures, en raison de refus opposés par les collectivités.
Le seul dispositif d’accès aux soins auquel ils ont droit est l’aide médicale d’Etat (AME), destiné aux étrangers résidant en France de manière ininterrompue depuis plus de trois mois. Néanmoins, peu d’habitants de bidonvilles et squats y ont effectivement accès en raison d’attitudes illégales des administrations qui retardent voire empêchent leurs démarches

PRÉJUGÉ : « ils profitent des aides publiques »

RÉALITÉ : ils n’ont pas accès à la plupart des prestations sociales.
Les Roumains et Bulgares séjournant en France depuis moins de trois mois ne bénéficient d’aucune protection sociale.
Après trois mois, pour pouvoir bénéficier des droits sociaux, il est nécessaire d’avoir une domiciliation reconnue par l’administration. Pour les habitants de squats et bidonvilles, avoir une adresse de ce type s’avère presque impossible, en raison notamment de l’attitude discriminatoire des administrations.
Même les aides qui ne sont subordonnées à aucune condition de séjour ne sont mobilisées que très marginalement par les habitants de lieux de vie précaires en raison de leur méconnaissance du système et des discriminations au guichet qu’ils subissent.

Notes

[1] L’article 225-1 du Code pénal : « Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur grossesse, de leur apparence physique, de leur patronyme, de leur état de santé, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs mœurs, de leur orientation ou identité sexuelle, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ».

[2] Le livret est téléchargeable au format PDF : Ceux qu’on appelle « les Roms » : Luttons contre les idées reçues.

[3] Voir le communiqué de Romeurope du 22 juillet 2010.

[4] La directive 2004/38/CE du 29 avril 2004 pose les conditions suivantes :
 soit exercer une activité économique en qualité de travailleur salarié ou non salarié ;
 soit disposer de ressources suffisantes et d’une assurance maladie ;
 soit suivre une formation en tant qu’étudiant et disposer de ressources suffisantes et d’une assurance maladie ;
 soit être membre de la famille d’un citoyen de l’Union qui entre dans une des catégories susdites.

[5] Rapport CNCDH, Racisme, antisémitisme et xénophobie en France, 2013.

[6] Les mesures transitoires prendront fin le 31 décembre 2013. A partir de cette date, les ressortissants roumains et bulgares auront la possibilité d’intégrer le marché du travail français comme tout autre citoyen européen.

[7] Suite à l’instruction du 30 janvier 2013 du Ministre du travail, les mesures transitoires ont été assouplies. Depuis, le nombre d’autorisations de travail délivrées aux ressortissants roumains et bulgares a triplé.

[8] L’article L.131-1 du Code de l’éducation énonce : « L’instruction est obligatoire pour les enfants des deux sexes, français et étrangers, entre six et seize ans ».

19/08/2013

Valls vu par Rue 89

Titre original d'un article très soft de Camille Polloni pour Rue 89 : "La politique d’immigration de Manuel Valls au guéantomètre". A conserver pour ses références.

Décryptage en 10 points.

"Pour ceux qui, comme François Delapierre (Front de Gauche) situent Manuel Valls à « l’extrême droite du mouvement socialiste », le ministre de l’Intérieur marcherait dans les traces de son prédécesseur, Claude Guéant.

Jean-Luc Mélenchon va encore plus loin dans le JDD ce dimanche, en affirmant que Manuel Valls « chasse sur les terres » de Marine Le Pen, qui l’aurait « contaminé ».

Popularité record. (!!!) Dans un sondage Ifop commandé par le JDD, 61% des personnes interrogées se disent « satisfaites » de l’action de Manuel Valls, loin devant les autres membres du gouvernement. D’autres études d’opinion réalisées depuis 2012 tendent à montrer la popularité record du ministre de l’Intérieur.
Les commentateurs de Rue89 ne sont pas en reste. Pour certains, Valls ne serait « pas vraiment » de gauche, donnant les mêmes coups de menton que Sarkozy et aussi inflexible que Guéant avec les sans-papiers.

Pour se faire une idée plus informée des ressemblances et des différences entre leurs politiques d’immigration, petite plongée dans les chiffres disponibles.

Démarcation sur le droit d’asile ? : Manuel Valls marche droit dans les traces de Claude Guéant en ce qui concerne le nombre d’expulsions, de régularisations et de naturalisations. Sa politique diverge surtout sur les aides au retour et sur le traitement réservé aux étudiants et jeunes adultes. Le ministre a aussi voulu donner des gages aux associations de défense des étrangers en supprimant le délit de solidarité.

Plusieurs inflexions récentes – fin de la garde à vue pour les sans-papiers, rétention des mineurs – ne viennent pas d’une volonté politique mais de décisions juridictionnelles qui s’imposent au gouvernement.

La réforme du droit d’asile pourrait marquer une vraie différence avec le gouvernement précédent. Mais elle n’aura pas lieu avant les municipales, et le statut de réfugié n’a pas été davantage accordé en 2012 que les années précédentes.

Valls - abjection, roms, assignation à résidence
Quelles différences ?

1- Les expulsions : Plus dur que Guéant ?

Dès le mois d’octobre 2012, Manuel Valls annonce la couleur devant l’Assemblée nationale : la baisse du nombre d’expulsions n’est pas un objectif du gouvernement.

« Cette politique ne se traduira pas par des évolutions sensibles en termes de chiffres, s’agissant tant des régularisations que des reconduites à la frontière. Telle est la volonté du gouvernement. Personne ne peut en douter : nous serons extrêmement fermes. »

A d’autres occasions, le ministre laisse entendre que le nombre d’expulsions pourrait augmenter. Pas de surprise donc, quand les chiffres de 2012 tombent : 36 800 personnes ont été expulsées, soit une hausse de 11,9% par rapport à l’année précédente.

En attendant le bilan 2013

Comme l’explique Libération, cette augmentation « concentrée sur les six premiers mois » de 2012, est en partie due à deux facteurs :

  • l’anticipation, par la justice, de la fin de la garde à vue des sans-papiers (effective depuis juillet 2012). Celle-ci entraîne une hausse du nombre d’expulsions sur le premier semestre, et une baisse mécanique pour le second ;

  • l’action du gouvernement précédent qui visait les 40 000 reconduites à la frontière alors que Manuel Valls a annoncé la fin des objectifs chiffrés.

Il faudra donc attendre le bilan de 2013 pour savoir si Manuel Valls s’inscrit vraiment dans la lignée de ses prédécesseurs. En dix ans, le nombre annuel d’expulsions a quadruplé Voir Nombre de reconduites à la frontière depuis 2001


2- Le « délit de solidarité » : vraiment supprimé ?

L’article L-622-1 du Code des étrangers existe depuis 1945, mais il a été surnommé « délit de solidarité » par les associations de soutien aux sans-papiers pendant le quinquennat de Nicolas Sarkozy. Voici ce qu’il dit :

« Toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers, d’un étranger en France sera punie d’un emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 30 000 euros. »

En 2009, les associations (Gisti, Cimade, France Terre d’Asile, Secours catholique, Emmaüs) lancent une campagne, estiment que ce délit « d’aide au séjour irrégulier » menace les activités militantes et les marques individuelles de solidarité dans un contexte de durcissement des politiques d’immigration.

Une polémique oppose alors le ministre de l’Immigration, Eric Besson, aux soutiens des sans-papiers, sur la réalité des poursuites. Le film « Welcome », sorti la même année, contribue à alerter l’opinion sur les risques encourus par ceux qui aident les migrants en France.

Janvier 2012 : Valls réforme le Code des étrangers

Le 2 janvier dernier, Manuel Valls supprime le « délit de solidarité ». C’est-à-dire qu’il réforme le Code des étrangers pour élargir les exceptions à :

« Toute personne physique ou morale, lorsque l’acte reproché était, face à un danger actuel ou imminent, nécessaire à la sauvegarde de la vie ou de l’intégrité physique de l’étranger, sauf s’il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace ou s’il a donné lieu à une contrepartie directe ou indirecte. »

Le délit d’aide au séjour irrégulier existe toujours mais serait désormais uniquement dirigé contre les filières d’immigration clandestine, pas contre les bénévoles. La notion de « contrepartie », difficile à cerner selon les associations de défense des sans-papiers, continue toutefois à faire débat.

Fin août, le procès d’un citoyen français accusé d’avoir fourni une fausse attestation d’hébergement à un étranger en situation irrégulière au Havre, devrait tourner autour de cette question. A l’occasion de cette affaire, plusieurs associations (Syndicat de la magistrature, Syndicat des avocats de France, Ligue des droits de l’homme) se sont inquiétées d’un éventuel « retour du délit de solidarité ».


3- Les mineurs en rétention : pas fini, mais exceptionnel

C’était une promesse de campagne de François Hollande :

« Je veux prendre l’engagement, si je suis élu à la présidence de la République, de mettre fin dès mai 2012 à la rétention des enfants et donc des familles avec enfants. »

Par ces propos, le futur président de la République prend acte dune décision de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) datant de janvier 2012. L’arrêt Popov a condamné la France pour avoir enfermé une famille kazakhe dans un centre de rétention inadapté à l’accueil des enfants.

La CEDH estime :

« Les autorités doivent mettre en œuvre tous les moyens nécessaires afin de limiter autant que faire se peut la détention de familles accompagnées d’enfants et préserver effectivement le droit à une vie familiale. »

Voir le document (Fichier PDF)

Pour traduire cette décision en actes, Manuel Valls a envoyé une circulaire aux préfets, en juillet 2012 (lire le document ci-contre). Mais si elle encadre et limite cette pratique, elle n’y met pas fin, contrairement à ce que promettait le candidat Hollande :

  • l’assignation à résidence devient la règle pour les familles en attente d’expulsion. Seules celles qui n’auraient pas respecté leurs obligations devraient être placées en centre de rétention, en dernier recours donc.

  • Mayotte fait exception, et n’est pas compris dans le nouveau dispositif.

Sept familles placées en centres de rétention

A plusieurs reprises depuis, les associations (et, sur Rue89, 60 professeurs de droit) ont alerté sur le cas de mineurs enfermés en rétention, en contradiction, selon elles, avec la décision de la CEDH :

En 2011, d’après un rapport des associations intervenant en rétention, 312 enfants étaient passés par des CRA avec leurs parents.

Ce nombre a-t-il diminué depuis la circulaire ? Le député socialiste du Val-de-Marne, René Rouquet, voulait poser la question au ministre de l’Intérieur en juin. Manuel Valls étant retenu au Sénat, c’est le ministre de la Ville, François Lamy, qui lui a répondu :

« Au terme de cette circulaire, il n’y a plus de primo-placement de parents accompagnés d’enfants mineurs. Il en résulte que, depuis sa mise en œuvre, sept familles ont été placées en centre de rétention pour des durées très, très brèves, pour la plupart suite au non respect des obligations de l’assignation à résidence.

A titre de comparaison, plus de 200 familles avec enfants avaient été placées en rétention sur la même période en 2011-2012. »


4- Les aides au retour : drastiquement réduites

En décembre 2012, Manuel Valls annonce la fin de « l’aide au retour » humanitaire versée aux ressortissants de l’Union européenne qui acceptent de rentrer dans leur pays d’origine contre une somme d’argent : 300 euros par adulte et 150 euros par enfant mineur.

Le ministre vise les Roms roumains et bulgares, pour qui le système d’aide au retour humanitaire (ARH) serait « inopérant » voire aurait des « effets pervers ». En clair, les Roms accepteraient cette aide mais reviendraient en France ensuite.

En réalité, l’arrêté pris en février ne supprime pas l’ARH créée en 2006 pour les « Européens en situation de détresse », mais en diminue fortement le montant, qui passe à 50 euros par adulte et 30 euros par enfant.

Manuel Valls a d’ores et déjà annoncé que les démantèlements de camps de Roms « se poursuivront ».

Un autre type d’aide au retour (ARV), concernant les étrangers non européens, a lui aussi subi une baisse drastique, passant de 2 000 euros à 500 euros pour un adulte.

Le gouvernement précédent avait massivement encouragé le dispositif d’aide au retour pour atteindre les quotas d’expulsions qu’il s’était fixé.


5- La garde à vue pour séjour irrégulier : remplacée par une « rétention » de seize heures

Depuis un an, la garde à vue d’un sans-papiers pour le seul motif de sa situation irrégulière est illégal.

Là non plus, la décision ne vient pas de Manuel Valls mais de la Cour de cassation, qui a suivi l’avis de la Cour de justice de l’Union européenne.

Sans la garde à vue, les policiers disposent de quatre heures pour contrôler l’identité d’une personne. Insuffisant, expliquent-ils, pour engager une procédure d’expulsion si nécessaire.

Le ministre de l’Intérieur a donc fait voter un nouveau dispositif, effectif depuis le 1er janvier 2013. Il prévoit une rétention de seize heures. La garde à vue, elle, pouvait durer 24 heures, renouvelables une fois.


6- Le statut de réfugié : accordé au compte-gouttes

Entre 2007 et 2012, le nombre de demandes d’asile a augmenté de 70%.

Mais le statut de réfugié, lui, est toujours accordé au compte-gouttes : environ 10 000 personnes en bénéficient chaque année.

Cette question de l’asile devrait être au cœur de la prochaine loi sur l’immigration. Il s’agit de :

  • réduire les délais de traitement des dossiers, aujourd’hui de seize mois en moyenne (objectif : six à neuf mois) ;

  • réformer l’hébergement, qui ne peut accueillir qu’un tiers des demandeurs d’asile. A Metz, certains ont même décider d’attaquer l’Etat ;

  • mieux répartir les demandes d’asile sur le territoire, car les grandes villes sont engorgées.

Une concertation sur la réforme du droit d’asile s’est ouverte en juillet, pilotée par la sénatrice centriste Valérie Létard. Mais en intégrant le volet « asile » à une loi plus générale sur l’immigration, Manuel Valls a repoussé l’examen du texte après les municipales de 2014.


7- La « circulaire Guéant » sur les étudiants étrangers : supprimée

C’était une mesure symbolique. Dès l’arrivée du gouvernement, la circulaire Guéant sur les étudiants étrangers – qui avait entraîné la situation irrégulière de centaines de jeunes diplômés – a été abrogée, un an après son entrée en vigueur.

Pourtant, a déclaré Manuel Valls à l’Assemblée :

« Nous avons accueilli en 2012 10% d’étudiants étrangers en moins. [...] Le message négatif envoyé par la circulaire du 31 mai 2011 n’est pas étranger à cette désaffection. »

Les étudiants étrangers pourraient à l’avenir bénéficier plus facilement d’un titre de séjour pluriannuel, ce qui leur éviterait de refaire des démarches tous les ans. L’enseignement supérieur accueille 300 000 étudiants étrangers chaque année.


8- Le nombre de régularisations : Constant

« Il n’y aura pas de régularisation massive comme en 1981 [131 000 personnes, ndlr] ou 1997 [80 000, ndlr]. »

Manuel Valls a été clair. Le chiffre annuel de régularisation de sans-papiers restera de l’ordre de 30 000 personnes par an, c’est-à-dire autant que d’expulsions.

La circulaire du 28 novembre 2012 vise à mieux préciser les critères de régularisation mais ne les élargit pas vraiment. Le ministre de l’Intérieur ne souhaite pas non plus régulariser progressivement les étrangers inexpulsables.


9- Les naturalisations : des critères assouplis

Le 18 octobre 2012, Manuel Valls signe une circulaire pour faciliter l’acquisition de la nationalité française. Elle prévoit notamment :

  • un assouplissement des critères liés au travail (possibilité de CDD ou d’intérim) ;

  • un examen bienveillant des demandes déposées par des étudiants étrangers et des jeunes de moins de 25 ans ;

  • un retour au délai de cinq ans de séjour régulier sur le territoire (passé à dix ans par Claude Guéant).

Les deux dernières années du quinquennat de Nicolas Sarkozy, le nombre de naturalisations avait fortement baissé, une tendance qui s’est poursuivie en 2012.

 

10- Portrait de l’immigration

Les derniers chiffres disponibles montrent que si le nombre total de nouveaux admis au séjour est resté stable en 2012, sa composition a varié :

  • l’immigration professionnelle et étudiante a diminué ;

  • l’immigration familiale a augmenté de 6,7%.

Voir L’admission au séjour par motifs (Ministère de l’Intérieur)

03/08/2013

Syndicalisme, état critique

2084 – Chris Marker  en collaboration avec le groupe confédéral audiovisuel CFDT, énonce clairement la situation syndicale «en parlant moins de ce qui a été fait que de ce qui reste à faire».
Ce très court métrage a été réalisé en 1984.
Il peut et devrait faire débat.



Des trois hypothèses, grise, noire, bleue, la dernière, par opposition avec des préoccupations partielles, catégorielles et obsolètes pourrait permettre une transformation du monde englobant la lutte contre la faim, la maladie, la souffrance, l’ignorance, l’intolérance…

2084, monde syndical, Chris Marker

Dans tous les cas, les syndicats qui se sont ou se seraient justement donné pour tâche de "jeter un pont entre la colère et l’espoir", pourraient avoir à pâtir du rôle de pare-chocs que les oligarques et autres techno-totalitaires voudraient leur faire jouer…
Même si «rien n’est programmé», le monde syndical - sans doute avec lui le monde associatif - est en danger, le monde d’après aussi.