11/01/2015
L’intelligence de la raison et le courage de la conviction
Par Pierre Tartakowsky, président de la LDH
Les attentats, bien sûr ! Comment ne pas revenir, encore et encore, sur cette plaie ouverte, sur cette explosion de haine meurtrière ? Et comment faire l’économie d’un retour sur ses enjeux ? La violence de l’épreuve, sa traînée de haine interdisent évidemment que quiconque pense pouvoir tourner la page et revenir à un statu quo ante. Tout nous engage, au contraire, à penser présent et avenir en tirant leçon de l’événement.
D’abord, en ne laissant pas instrumentaliser les grandes mobilisations de solidarité qui ont envahi l’espace public : elles étaient tout entières tournées vers la liberté et la fraternité. Elles appellent des actes, des politiques publiques qui affrontent le racisme, l’antisémitisme, les discriminations, qui travaillent l’Europe et notre pays ; ensuite en mettant en garde – mieux encore, en nous mobilisant – contre les réflexes sécuritaires, surtout lorsqu’ils aboutissent à des résultats absurdes. Oui, l’école a un rôle à jouer face à l’intolérance ; non, ce rôle ne peut se ramener à celui d’auxiliaire de police. Conduire des gamins et des pré-ados au poste, pour une déclaration à l’emporte-pièce, c’est substituer la procédure répressive au nécessaire débat éducatif ; poursuivre un parent pour avoir « pénétré » dans l’école pour exprimer sa colère, c’est enterrer de fait la notion même de communauté éducative.
Ces pratiques sont des impasses dangereuses ; non seulement elles tuent le débat là où il s’agit de le faire vivre mais elles accentuent chez ceux qui sont stigmatisés l’idée, déjà bien présente, que, décidément, la promesse républicaine n’est pas pour eux…
L’époque a moins besoin de bâton que de raison ; cela passe par l’acceptation de la confrontation, par le conflit raisonné, par la formulation de nouveaux compromis à vivre, justement possibles sur la base des valeurs de la République et d’une laïcité garante de la liberté de conscience.
Il est d’autant plus important de le rappeler que d’autres périls frappent à la porte. Les attaques ignobles dont Christiane Taubira, garde des Sceaux, est à nouveau la cible, le résultat de l’élection partielle du Doubs l’illustrent avec force. Avec ses 60 % d’abstention, un FN triomphant et une droite dont une partie s’avère plus que jamais disponible à des alliances non républicaines – elle fournit un résumé saisissant la multiplicité des défis lancés à la face de la République : pauvreté de l’offre politique, démocratie anémiée, légitimation des thèmes racistes, tentations autoritaires…
Face à nous se dresse ainsi une mécanique folle de régression et de peurs dont les pôles, d’apparence antagonique, se renforcent l’un l’autre en une haine commune pour l’égalité et la liberté. Face à quoi nos peurs seront insuffisantes ; sachons mobiliser l’intelligence de la raison et le courage de la conviction.
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08/01/2015
Ni rire, ni pleurer. Comprendre.
12 personnes assassinées dans les locaux de Charlie Hebdo.
Rouge, demain il fera beau.... Georges Wolinski
Beaucoup de questions se posent...
Au hasard :
- Comment éviterons-nous que la contagion de cette folie qui s'est attaquée aux libertés n'atteignent les moins politisés d'entre-nous ?
- Comment nous abstiendrons-nous de demander à des présumés musulmans de se désolidariser des musulmans ? Comment éviterons-nous les amalgames et la complaisance vis à vis des "cerveaux malades" qui en font commerce ?
- Comprendrons-nous que la fraternité ne doit en aucun cas être transcendée par la religion, les partis ou la race ?
Toutes ces questions et beaucoup d'autres ont été soulevées au moment de le "veillée" organisée par Mediapart au soir de la tuerie.
Enregistrement vidéo :
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08/11/2011
Soutien à Charlie Hebdo
Intervention de Pierre Tartakowsky, président de la Ligue des droits de l’Homme, en soutien à Charlie Hebdo, dimanche 6 novembre à l’Hôtel de Ville.
Mettre le feu à un journal, empêcher le déroulement d’une pièce de théâtre ; ces actes de violence ne sont jamais anodins. L’agressivité des censeurs, le surgissement d’incendiaires, annoncent des temps difficiles et la tentation de certains d’imposer leurs détestations et leurs peurs en dogmes intangibles, indiscutables. Avec ce que cela suppose de périls pour les autres, hérétiques et boucs émissaires de tous ordres, pour leurs droits et liberté, droits et liberté qui sont les nôtres.
Après l'interdiction de l'hebdo Hara-kiri en 1970 (suite à la une du 16 novembre sur la mort du général De Gaulle titrée "Bal tragiqueà Colombey - 1 mort")
tous les membres de l'équipe
(Choron, Cavanna, Gébé, Cabu, Reiser, Delfeil de Ton, Willem, Wolinski…)
ont décidé de continuer, en changeant juste de nom : Charlie Hebdo est né.
Le premier numéro est sorti le 23 novembre 1970.
Aux fondamentalistes de tous ordres, y compris celui des simplistes et des imbéciles, la Ligue des droits de l’Homme oppose le respect de la loi commune, la défense intransigeante des libertés démocratiques, y compris celle de blasphémer, une solidarité intangible avec les victimes, même lorsqu’elle n’en partage ni les vues ni les moyens choisis pour les exprimer. Car lorsqu’on déchaîne la violence contre un théâtre, une bibliothèque, un journal, un lieu de culte ou une population ciblée comme indésirable, c’est toujours la République, la citoyenneté qu’on prend pour cible.
C’est le sens de notre présence, de notre solidarité et de notre soutien à une mobilisation puissante pour la démocratie, la laïcité, un vivre ensemble qui se décline effectivement en termes de liberté, d’égalité, et enfin de fraternité.
Pierre Tartakowky,
président de la Ligue des droits de l’Homme.
Retour de flamme à destination de Pascal Boniface et de ses soutiens qui pourraient, si ce n'est déjà fait, se croire obligés de prendre fait et cause pour les censeurs incendiares et illuminés de tout poil, lire la note intitulée "Allah est grand et Tartuffe est son prophète!"
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