07/01/2010
L'Elysée fait ses comptes
Pour notre nano président et quelques soient ses déclarations larmoyantes et convenues, la disparition de Philippe Seguin, Président de la Cour des Comptes, est inespérée.
Après avoir reconnu que Philippe Seguin avait, qu'on le veuille ou non, constitué un rempart contre certaines dérives présidentielles - on se souviendra grâce à lui de ce qu'a coûté, par exemple, la présidence européenne de la France (record à battre) -, il faut désormais s'attendre à ce que son successeur soit beaucoup moins regardant quant aux dépenses somptuaires de l'Etat sarkoléonien. Il sera issu du sérail, et à ce titre payé pour se taire. Avec Philippe Seguin, c'était mission impossible ou quasiment.
A cette opportunité s'ajoute le renouvellement partiel (1/3) du Conseil Constitutionnel, à l'origine, entre autres observations, du report pour cause d'inégalité fiscale de la taxe carbone. L'évenement aura lieu d'ici une semaine.
On pourra aussi cumuler ces « bonnes nouvelles pour l'Elysée » avec la disparition programmée du juge d'instruction, la disparition acquise de la Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité (CNDS), de la Défenseure des enfants et l'incapacité chronique des partis à concevoir une solidarité opposable aux délires du ci-devant Sarkosy. Hélas !
07/11/2009
Les sceaux du roi
« La justice sans la force est impuissante, la force sans la justice est tyrannique » Blaise Pascal
Dépénalisation du droit des affaires, plus ou moins douteuses, et suppression du juge d'instruction, aimé ou pas, faut-il rapprocher ces deux projets ? Si elles étaient mises en œuvre, l'une comme l'autre, ensemble ou séparément, ces deux « idées géniales » permettraient de contourner, un peu plus, le délit de corruption et de garder les sceaux du roi intacts.
« Quand les hommes ne peuvent changer les choses, ils changent les mots » disait Jean Jaurès. Ce qui, transposée à la dépénalisation du droit des affaires, pourrait donner : « Quand les Etats ne peuvent, ni ne veulent mettre un terme à la corruption, ils lui inventent un cadre juridique qui la justifie ».
Lorsqu'à l'automne 2007, le chef du gouvernement déclarait : « La pénalisation à outrance de notre droit des affaires est une grave erreur. Je veux y mettre un terme », il oubliait simplement avoir reçu une formation d'avocat « d'affaires » et que l'avenir pouvait l'amener à vouloir les faire prospérer.
Plus sérieusement ou simplement, la suppression du juge d'instruction, qui peut encore déstabiliser quelques de « destins nationaux » et chefs d'entreprises en exercice, correspond mieux aux objectifs de l'Elysée. Et c'est bien ce qui a été mis en œuvre dès 2007.
Entre 2007 et 2008, le nombre de dossiers confiés par le procureur à des juges d'instruction est passé de 467 à 251. Il y en avait 734 en 2002. La dégringolade est encore plus vertigineuse pour les délits financiers, pour lesquels 21 informations judiciaires seulement ont été ouvertes en 2008, contre 88 en 2007 et 101 en 2006.
Il ne reste plus qu'à « terminer le job » et surtout oublier les protestations comme celle que le juge Eva Joly avait adressée à qui de droit via Le Monde du 15 janvier 2009 :
... « Qui peut encore croire que le juge d'instruction est "l'homme le plus puissant de France" ? Certainement pas vous, Monsieur le président. L'homme le plus puissant de France, c'est vous. Vous avez le pouvoir de faire saisir un tribunal arbitral qui attribue 285 millions d'euros à un de vos soutiens. Vous avez le pouvoir de déguiser une grâce individuelle à un préfet dévoyé en grâce collective. »...
... La liste des enquêtes non effectuées est impressionnante : les soupçons de corruption à l'encontre de Christian Poncelet, ex-président du Sénat ; les flux financiers allégués de Jacques Chirac au Japon ; les fortunes apparemment mal acquises des présidents africains placées en France ; le rôle supposé de la BNP Paribas dans les montages corrupteurs au Congo-Brazzaville et Congo-Kinshasa. ...
... j'appelle les Françaises et les Français épris de justice à la mobilisation contre votre projet. »
Le plus grave dans cette affaire reste que supprimer le juge d'instruction porte atteinte au plus intangible des principes républicains, celui de la séparation des pouvoirs qui inclut l'indépendance de la justice, et revient à donner un cadre légal à toute corruption d'Etat. Beaucoup plus grave que les faits de malversation stricto sensu qui pourront être révélés par Transparency International, organisation de la société civile pour la lutte mondiale contre la corruption.
Cette agence publiera comme tous les ans son Indice de Perception de la Corruption (IPC) le 17 novembre 2009. (Disponible à cette date sur www.transparency.org)
Il faudra alors faire preuve de perspicacité pour mettre à jour les affaires blanchies d'une délinquance en col blanc déjà très occultées par l'Etat.
Pour la petite histoire, Patrick Ouart, issu du sérail présidentiel et Jiminy Criquet de Mam'Dati & Co, pourrait bien être le futur « juge de l'enquête et des libertés » pressenti par l'Elysée pour remplacer le juge d'instruction. A condition que cette réforme se fasse sans trop de résistances...
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