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02/04/2015

Patriot-Act à la française

Oh surprise, au communiqué commun qui suit faisant le point sur une énième loi portant atteinte aux libertés, un éditorial à charge du « New York Times » vient au secours des citoyens et n’hésite pas à s'adresser aux élus !
Ce que la Quadrature du Net et la Ligue des Droits de l'Homme pour ne citer que ces deux associations avaient entrepris quelques heures plus tôt sous une autre forme.

Qui aurait pu prédire un tel soutien et, pour le gouvernement Valls un tel désaveu ??!!!

« Il est compréhensible que les Français soient nerveux après les attaques de Paris et de Tunis et qu'ils s'alarment de la radicalisation de certains qui, en France, sont devenus la proie du recrutement djihadiste sur internet », écrit la direction du quotidien américain. »

Elle poursuit :

« Les législateurs français ne devraient pas approuver la loi à moins qu'il ne soit donné aux juges un rôle approprié, que les définitions vagues de ce qui constitue une menace terroriste soient retirées du projet de loi et que la liberté de la presse soit protégée. »

Plus loin encore :

« Par cette loi, des pouvoirs extraordinaires  sont placés dans les mains du premier ministre plutôt que dans celles de la justice, le contrôle du processus d'approbation des demandes de surveillance des agences de renseignement ».

Le  « New York Times » sait bien entendu de quoi il parle, puisque les États Unis n'en finissent pas d'expérimenter l’inefficacité et la nocivité du Patriot-Act mis en place par l'administration Busch après les attentats du 11 septembre à New York.
Ici, l'important reste d'être entendu et mobilisé avant qu'il ne soit trop tard...
[Sur le sujet, on peut suivre
ici les échanges qui ont eut lieu le 26 mars au siège de la Quadrature du Net.]

loi Renseignement

Inquiétude des organisations des droits de l’Homme donc face à un projet de loi visant à donner aux agences de renseignement de nouveaux pouvoirs en une surenchère liberticide et inutile.
 

Communiqué commun cosigné à ce jour par :
Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), Ligue des droits de l’Homme (LDH), Reporters sans frontières, Amnesty International, Privacy International

Privacy International, Amnesty International, la FIDH, la Ligue des droits de l’Homme et Reporters sans frontières font part de leur vive inquiétude face aux pouvoirs de surveillance accrus dont devraient bénéficier les agences de renseignement, comme le prévoit un projet de loi qui sera présenté au Parlement français ce jeudi. La nouvelle loi prévoit en effet que les agences de renseignement françaises seront autorisées à pirater les ordinateurs et autres appareils, et pourront espionner les communications de toute personne ayant été en contact, même par hasard, avec une personne suspecte. Le projet de loi prévoit en outre que les agences de renseignement pourront réaliser ces opérations sans devoir obtenir d’autorisation judiciaire.

Nos organisations expriment leur plus vives inquiétudes par rapport à cette proposition de loi qui propose d’installer des technologies de surveillance directement chez les fournisseurs d’accès à Internet et dans les entreprises de télécommunication afin d’analyser toutes les activités sur Internet grâce à des algorithmes développés par le gouvernement. Nos organisations considèrent qu’il s’agirait là de la mise en place de systèmes de surveillance de masse qui iraient à l’encontre du respect de la vie privée des internautes, et que ces systèmes pourraient potentiellement mettre à mal la liberté d’expression et entraîner de graves dérives.

Ce projet de loi donne des pouvoirs sans précédent au Premier ministre dans la mesure où c’est le Premier ministre lui-même qui aura l’autorité d’autoriser toute forme d’activité de surveillance, sans autorisation d’un quelconque tribunal. Certes, le projet de loi prévoit la création d’une Commission nationale étendue pour le contrôle des technique de renseignement, mais les recommandations de cette commission ne seraient pas contraignantes ni pour le Premier ministre, ni pour ses délégués. En supprimant le contrôle en amont des juges sur les activités de renseignement, le projet de loi constitue une grave atteinte à la vie privée des citoyens ordinaires et augmente le risque d’abus. Ce projet de loi peut également accroître les risques que la surveillance de masse fait déjà planer sur les personnes travaillant sur des sujets sensibles et qui dépendent de sources confidentielles, notamment les journalistes et les organisations de défense des droits humains.

Les pouvoirs de surveillance à l’étranger prévu dans le projet de loi sont très étendus et s’apparentent à ceux contre lesquels des plaintes ont été déposées au Royaume-Uni. Ils permettent au Premier ministre d’ordonner que soient interceptées toutes les communications émises ou reçues à l’extérieur du territoire français. Toujours d’après le projet de loi, les mesures techniques qui pourraient être déployées par les agences de renseignement seront décidées par le Conseil d’Etat, dans le cadre d’un décret d’application non publié.

Outre les mesures de filtrage proposées, le projet de loi donne de nouveaux pouvoirs de surveillance aux agences du gouvernement, ce qui ne va pas sans susciter de sérieuses inquiétudes :

  • le projet de loi prévoit de manière explicite que les agents de renseignement pourront, en dernier ressort, pirater les ordinateurs et autres appareils de communication. Le piratage constitue une forme extrêmement intrusive de surveillance et son utilisation par des autorités gouvernementales quelles qu’elles soient, et notamment par des agences de renseignement, doit être fortement réglementée afin d’assurer une protection contre les abus de pouvoir ; le projet de loi ne prévoit cependant aucune intervention des autorités judiciaires dans le but de contrôler ce pouvoir de piratage ;
  • le projet de loi donne le pouvoir aux agences de renseignement d’utiliser des « capteurs de proximité » dans le cadre d’opérations de terrain, afin de confirmer la localisation et l’identité de certaines personnes. Selon la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil – autorité française chargée de la protection des données personnelles) cette disposition cherche en réalité à doter les services de renseignement français de la capacité à intercepter et à écouter les conversations téléphoniques grâce à des capteurs IMSI ; la Cnil a obtenu du gouvernement qu’il inclue différentes protections supplémentaires à son projet de loi avant que celui-ci ne soit examiné par le Parlement. Les systèmes d’interception et d’écoute IMSI sont des systèmes d’interception mobiles dont l’exportation est contrôlée tant aux Etats-Unis qu’en Europe ; ils ont récemment fait l’objet d’une grande attention de la part des tribunaux et des assemblées législatives américaines. Le projet de loi stipule que les capteurs IMSI pourront être utilisés pour la collecte d’informations de géolocalisation de personnes en temps réel, en utilisant leurs appareils de communication. Dans la mesure où les capteurs IMSI ne sont pas ciblés mais permettent simplement de géolocaliser une personne dans une zone donnée (par exemple un centre commercial ou un aéroport), leur utilisation va inévitablement faciliter la surveillance de nombreuses personnes qui ne sont suspectes d’aucune activité criminelle ;
  • les communications électroniques de toute personne ayant été, par hasard, en lien avec une personne suspectée – et y compris les connexions ou les rencontres en ligne ou hors ligne – seraient susceptibles d’être interceptées et étudiées par les agences de renseignement, grâce aux nouveaux pouvoirs que leur conférerait le projet de loi.

Nos organisations lancent un appel au Parlement français et lui demandent d’étudier ce projet de loi de manière approfondie dans les semaines à venir, afin de vérifier que la loi française soit conforme aux règles internationales sur les droits de l’Homme et aux standards applicables en matière de surveillance.

Carly Nyst, directeur juridique de Privacy International, a déclaré :
« L’introduction de cette loi, un mois à peine après la tragédie de Charlie Hebdo, est une tentative visant à étendre les pouvoirs de surveillance, aux prétextes de prévenir le terrorisme. Une sécurité accrue de doit pas être au prix d’un moindre respect de la vie privée et la lutte contre le terrorisme ne doit pas être utilisé comme argument pour justifier le contrôle de masse des activités de chaque citoyen français sur Internet. Si toutes les mesures proposées devaient être adoptées par le parlement, sans étude approfondie, la France serait bel et bien en passe de devenir un Etat espion. »

Joshua Franco, chercheur en technologies et droits de l’Homme chez Amnesty International a ajouté :
« La France ne peut accepter que sa quête de sécurité se fasse au détriment du respect du droit qu’a tout être humain de s’exprimer et de voir respecter sa vie privée. Ces pouvoirs de surveillance invasifs et très étendus ne seraient aucunement contrôlés et pourraient inciter les gens à s’autocensurer sur Internet. »

Karim Lahidji, président de la FIDH a déclaré :
« L’absence de contrôle judiciaire nous inquiète beaucoup et ces dispositions donnent au gouvernement le pouvoir d’autoriser une surveillance élargie de toute personne quelle qu’elle soit, sans que celle-ci puisse le contester devant un tribunal. Nous sommes également inquiets de constater cette tendance croissante à abuser de la rhétorique de la lutte contre le terrorisme pour mettre à mal les libertés. »

Christophe Deloire, secrétaire général de Reporters sans frontières a précisé :
« Nous exigeons que cette loi protège le droit des journalistes à travailler sans être espionné, faute de quoi elle constituerait une grave violation de la liberté de la presse et des médias. Le gouvernement doit rétablir la protection de la confidentialité des sources des journalistes en réintroduisant dans les procédures la référence à un magistrat. Il est crucial que le système de surveillance envisagé dans ce projet de loi prévoit une exception pour les journalistes. »

Pierre Tartakowsky, président de la Ligue des droits de l’Homme a déclaré :
« Les droits fondamentaux des citoyens ne seront respectés que si l’on rétablit le principe d’un contrôle efficace et proportionné, impliquant des garanties judiciaires et une place au contradictoire préalablement à l’autorisation de mesures qui, par ailleurs, ne doivent être mises en place que dans un but strictement défini. »