03/05/2013
Liberté de la presse
Le 20 décembre 1993, l'Assemblée générale de l'ONU proclame le 3 mai Journée mondiale de la liberté de la presse (décision 48/432). Depuis, le jour de l'anniversaire de la Déclaration de Windhoek est célébré dans le monde entier comme étant la Journée mondiale de la liberté de la presse.
Son 20e anniversaire est l'occasion :
- de célébrer les principes fondamentaux de la liberté de la presse;
- d'évaluer la liberté de la presse;
- de défendre les médias des attaques contre leur indépendance; et de se souvenir des journalistes tués parce qu'ils faisaient leur devoir.
- de prendre conscience d'une évidence relevée par Hannah Arendt et qui s'énonce : "c'est dans le vide de la pensée que s'inscrit le mal" Hannah Arendt.
Par la voix d'Edwy Plenel elle dit aussi...
La presse est donc elle aussi prise en otage par la pensée unique. Et nous ne l'oublions pas !
C'est si vrai qu'entre autres ironies du sort ou cynisme orchestré à l'encontre de la liberté d'expression, on aura pris acte de l'interdiction faite à Aminata Traoré d'obtenir un visa pour honnorer une invitation qui lui a été faite par des responsables de Die Linke, le parti de gauche allemand, et des militants de mouvements associatifs français de Paris et de Lille . Ce n'est malheureusement qu'un exemple parmi d'autres, que l'on aurait tort de banaliser et qui ne sera que très peu relayé.
Symbole des rapports de force Nord-Sud et porte-flambleau du « Non à l’intervention militaire étrangère au Mali », Aminata Traoré livre à cameroonvoice son sentiment après cette "déconvenue" :
Cameroonvoice : Nous avons appris avec stupéfaction que les autorités françaises ont refusé de vous accorder un visa d’entrée en France pour participer à une réunion publique le 22 avril dernier. Pouvez vous nous confirmer cette information ?
Aminata Traoré : En fait, j’ai été invitée par Die Linke, un parti de gauche allemand, et des militants français. Je devais faire un tour à Berlin et par la suite donner une conférence à Paris et Lille. J’avais un visa de circulation de 4 ans de l’espace Schengen qui a expiré au mois de Février.
Quand je me suis rendue à l’ambassade d’Allemagne pour solliciter un droit d’entrée dans l’espace Schengen, ils m’ont accordé un visa de trois jours uniquement pour leur pays en me notifiant que la France a donné des instructions pour qu’aucun pays de l’espace Schengen ne m’accorde de visa.
Il y avait donc une interdiction de circulation dans l’espace Schengen vous concernant, dont vous ignoriez totalement l’existence ?
Non non, on ne me l’avait pas notifié avant, c’est à la faveur de ce voyage que je l’ai su. J’ai été autorisée à aller en Allemagne et à revenir au Mali directement sans fouler le sol de l’espace Schengen mis à part l’ Allemagne. Je ne sais pas si c’était une exception allemande, ou si les autres pays de l’espace Schengen pourront m’accorder la même « faveur ».
Ma liberté de circuler est maintenant restreinte. Les consulats européens échangent entre-eux, des listes de personæ-non-grata, et les dispositions changent selon la gravité du délit entre guillemets. En ce qui me concerne, je ne sais pas ce que l’on me reproche. Dans mon cas, j’ai eu la chance d’avoir cette ouverture de la part de l’Allemagne, mon compatriote Oumar Mariko( Secrétaire général du SADI, Ndlr), lui il n’a pas pu voyager du tout.
Vos prises de position contre l’intervention militaire des forces étrangères au Mali et notamment celle de la France ne seraient pas la cause de cette interdiction ?
Certainement, sinon je ne comprends pas pourquoi, la France et surtout les membres de ce gouvernement de gauche, qui m’ont reçu et qui me connaissent parfaitement le feraient. En principe, nous partageons les même idées.
Sauf que, la France considère son intervention au Mali comme une réussite politique et militaire, c’est le Premier ministre Jean-Marc Ayrault qui l’a dit et ce success story de leur point de vue exige certainement un verrouillage, qu’il n’ y ait pas de critiques, puisque l’unanimité leur réussit si bien ! Vous vous souvenez bien que toutes les résolutions concernant cette guerre ont été adoptées à l’unanimité au Conseil de sécurité des Nations Unies, et avant-hier ( mardi 23 avril Ndlr) ils viennent aussi de voter à l’ unanimité à l’ Assemblée nationale et au Sénat français pour la prolongation de l’Opération Serval au Mali.
Le pouvoir politique a changé de main en France voilà bientôt un an et on peut constater pour le déplorer avec cette opération que la politique africaine de la France, demeure toujours la même.
Elle demeure inchangée et il ne nous le cache pas. Le Général De Gaulle l’a dit : « la France n’a pas d’amis mais des intérêts ». Peut-être c’est nous qui nous faisons des illusions, François Hollande l’a d’ailleurs répété récemment en parlant dossier Centrafricain quand François Bozizé l’appelait à l’aide. Il lui a fait savoir que la France défendait ses intérêts et ses ressortissants.
Nous l’apprenons peut-être à nos dépens, parce qu’on se disait aussi que les temps ont changé et puisqu’ils sont confrontés aux mêmes difficultés que nous, liées au même environnement économique international, avec les questions d’aide, de chômage de pauvreté etc. Mais à la lumière de ce qui se passe, il y a une grille de lecture qui s’applique à l’Afrique, on est considéré comme des pays en faillite, pas de d’états, pas d’ armées, ils peuvent faire la pluie et le beau temps et ne tolèrent pas de voix discordantes.
Ils ne tolèrent pas de voix discordantes, pourtant ils se clament chantre de la liberté de la d’expression. Peut-on interpréter cette interdiction de territoire comme une entrave à la liberté d’expression, puisque vous avez un point de vue discordant ?
Oui ! Pourtant moi je n’ ai pas changé, tout ceux qui me suivent depuis savent que j’ai pas changé de discours ceux sont les mêmes idées que je véhicule. Je ne m’attaque à personne, je condamne tout simplement un système économique mondial cynique et la guerre fait parti de ce système.
Aujourd’hui la militarisation pour le contrôle des ressources de l’Afrique fait parti de l’agenda. C’est ce que j’ai dit et c’est ce qu’ eux mêmes ils reconnaissent !!! Alors moi malienne, pourquoi je n’ai pas le droit de poser ce regard sur les réalités de mon pays en guerre !!!
Comment envisagez-vous l’avenir du Mali et de la sous-région suite à cette intervention militaire française appuyée par des troupes africaines ?
Je pense que les troupes africaines sont mises à contribution, et comme je l’ai déjà dit dans mon manifeste ce n’est pas notre guerre, nous sommes entrés dans une phase de la globalisation qui implique la diplomatie économico-offensive et la militarisarisation.
Mais seulement, Al Qaida est une réalité et en même temps une aubaine, elle permet aux dirigeants Africains qui ont mal géré de dire maintenant que la priorité c’est la lutte contre le terrorisme et aux puissance étrangères de dire faisons cause commune luttons d’abord contre le terrorisme.
Et moi je dis que le véritable terrorisme c’est la misère, c’est les injustices, parce que je sais qu ’une bonne partie des combattants des djihadistes sont avant tout, des jeunes désespérés sans boulot, ils n’ont pas de visas et se font recruter à la fois par les narcotrafiquants et les djihadistes. C’est cette réalité qu’il nous faut regarder maintenant de près.
Quelles leçons devrons nous tirer de la situation au Mali et de ce qui vous arrive à vous ?
Je souhaite que les Maliens et les Africains s’ouvrent grandement les yeux et les oreilles et se disent qu’en réalité, il n’y a pas un cas malien. Ce qui se passe aujourd’hui au Mali est l’illustration d’une nouvelle étape de la politique de mainmise sur les ressources du continent, notamment les ressources énergétiques, sans lesquelles la sortie de crise, la croissance et la compétitivité ne sont pas envisageables par l’Occident.
Au lieu de jouer cartes sur table et changer les règles du jeu on préfère, nous écrire un autre histoire, nous humilier, nous culpabiliser. Avec tout ce qui se passe je considère que le Mali est humilié, il y a donc aucune raison d’en ajouter en gardant le silence et c’est ce que tout le monde fait, et les occidentaux le savent pertinemment.
Raison pour laquelle, je me réjouis aujourd’hui de ce soutien international parce qu’il y a énormément de gens qui ne comprennent pas, quelque soit la différence de lecture qu’un tel traitement me soit réservé. C’est donc une nouvelle phase de la décolonisation de l ’Afrique. Il nous appartient maintenant à nous mêmes de voir ou sont les véritables défis.
Propos recueillis par rédaction de cameroonvoice
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20/04/2013
Rapport sur la banalité du mal
La sortie du film de Margarethe von Trotta "Hannah Arendt" devrait être l'occasion de redécouvrir la nécessité du penser par soi-même et singulièrement de comprendre un peu mieux les origines du totalitarisme.
Si la fimographie de Margarethe von Trotta est impressionante, sa dernière réalisation est très attendue. Avant goût :
Pour un réalisateur de cinéma, le projet de montrer à l'écran le travail de la pensée est une gageure. Pourtant, c'est le dessein que s'est fixé Margarethe von Trotta dans son film intitulé Hannah Arendt. Et manifestement, la réalisatrice a atteint son objectif. Présenté en novembre 2012 au Festival international du Film d'Histoire de Pessac, le film a séduit le jury qui lui a décerné tous les prix de la catégorie fiction.
Margarethe von Trotta a insisté pour que Barbara Sukowa, connue pour ses collaborations avec le réalisateur Rainer W. Fassbinder, endosse le rôle-titre. Et ce choix est déterminant. Cette intelligente actrice, sait imposer l'intensité de sa présence à l'écran. Qu'elle soit filmée chez elle, dans son appartement de New York scrupuleusement reconstitué, ou dans les rues de Jérusalem aux ruelles ensoleillées, elle incarne avec bonheur une indomptable femme de génie.
Aucune jalousie cependant de la part de Heinrich Blücher à l'égard de Martin Heidegger. Quelques retours en arrière montrent la jeune Hannah en compagnie du philosophe qui, en dépit de prises de position nazies, a inspiré la plupart des grandes pensées du XXe siècle. Cette relation amoureuse demeure une énigme.Quant à Hans Jonas, camarade d'Arendt depuis 1924, philosophe et historien de la religion, il dialogue âprement avec son amie. Leurs désaccords sont nombreux. Les deux penseurs se brouilleront d'ailleurs passagèrement après la publication du reportage d'Arendt sur le procès Eichmann.Dans ces conversations new yorkaises à bâtons rompus, l'anglais se mêle à l'allemand. Le passage d'un idiome à l'autre est symbolique d'une fracture dans la personnalité d'Arendt : coexistent en elle la nostalgie de l'Europe et son amour pour les U.S.A., le pays de l'exil. La belle musique d'André Mergenthaler souligne l'intensité dramatique de ces scènes de difficile amitié.
C'est Hannah Arendt elle-même qui, malgré son inexpérience du journalisme, a suggéré à William Shawn, directeur du New Yorker, de la dépêcher à Jérusalem pour couvrir le procès. Adolf Eichmann, accusé d'avoir participé à la solution finale, doit répondre de ses actes face aux témoins survivants de la Shoah. Malgré son allure et ses discours de bureaucrate docile, il est l'un des représentants du mal extrême. Il a tenu un rôle de tout premier plan dans une terrifiante entreprise génocidaire.
Arendt avait pour projet de souligner la radicalité du crime contre l'humanité, perpétré par le régime totalitaire nazi, et dont personne ne se reconnaissait coupable. Mais elle a été lue trop vite ou pas lue du tout.
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