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29/12/2015

CONTROLE DE L'ETAT D'URGENCE

Pour répondre à la peur, instrument du pouvoir, il est de notre devoir d’agir et de dénoncer avec force les schémas et stratégies réductrices assimilant celles et ceux qui combattent le libéralisme et les inégalités qui s'en suivent, à des ennemis de la République, à des terroristes ou à des délinquants !

Pour nous, membres de la Ligue des Droits de l'Homme, c’est définitivement non !

Non au projet de déchéance de la nationalité, non à une démocratie sous état d’urgence, non à une réforme constitutionnelle imposée sans débat, en exploitant l’effroi légitime suscité par les attentats.

Nous n’acceptons pas la gouvernance de la peur, celle qui n’offre aucune sécurité mais qui assurément permet de violer nos principes les plus essentiels.

Notre rejet est absolu. Nous appelons tous ceux et celles qui partagent une autre idée de la France à le manifester.

Etat d'urgence, 13 novembreIllustration tirée de l'Institut Coopératif de l’Ecole Moderne – Pédagogie Freinet
Vence – dessin d’un enfant du CP « La peur, j’adore … »

Signez la pétition

 

A la suite des attentats du 13 novembre 2015, l’état d’urgence a été décrété et prolongé jusqu’au 26 février 2016. Il prévoit 13 mesures exceptionnelles (liste en bas de l'article).

L’Assemblée nationale déploie un dispositif inédit de contrôle et d’évaluation de l’application de ces mesures, dans le cadre duquel la CNCDH, autorité administrative indépendante, est appelée à jouer un rôle majeur pour veiller au respect des libertés et droits fondamentaux.

La CNCDH, lance un appel à l’ensemble des associations de défense des droits de l’homme, et plus largement à l’ensemble des citoyens, afin d’être informée des abus/dérives qu’ils constatent voire subissent lors de la mise en œuvre des mesures relatives à l’état d’urgence.

(Formulaire en ligne)

En sa qualité d’Institution nationale des droits de l’homme accréditée par les Nations unies, la CNCDH a pour mission permanente et générale de contrôler le respect par le Gouvernement français des engagements internationaux en matière de droits de l’homme et de droit international humanitaire. Vigilante quant à l’effectivité des droits protégés par les conventions internationales contraignantes, la CNCDH a également pour mission d’alerter les organes des Nations unies et du Conseil de l’Europe en cas de manquements.

Les informations transmises seront anonymisées et auront vocation à informer les députés ayant en charge ce contrôle de l’état d’urgence.

Cet appel, dans les circonstances exceptionnelles actuelles, vise à s’assurer de la continuité de l’État de droit et à faire remonter aux parlementaires les constatations de dérives ou d’abus.

Plus largement, les informations transmises nourriront les analyses de la CNCDH à l’heure où d’autres projets de textes constitutionnel et législatif sont envisagés. Elles permettront aux Parlementaires d’appréhender les conséquences du vote de ces futurs textes au regard de l’impératif de protection des libertés et droits fondamentaux.

La CNCDH rappelle qu’elle a vocation, non pas à traiter les demandes individuelles, mais, du fait de sa mission de conseil auprès du Gouvernement et du Parlement, à éclairer la décision publique ainsi que, du fait de sa mission de contrôle, à alerter les organes du Conseil de l’Europe et des Nations unies.

La CNCDH invite en conséquence tous ceux qui le souhaitent à renseigner le formulaire en ligne pour lui faire part d’informations ou de témoignages.

Les 13 mesures exceptionnelles liées à l'état d'urgence  (LOI n° 2015-1501 du 20 novembre 2015 prorogeant l'application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence et renforçant l'efficacité de ses dispositions) 

  • Interdiction de circulation des personnes ou des véhicules
  • Institution de zones de protection ou de sécurité
  • Interdiction de séjour
  • Assignation à résidence
  • Interdiction, pour la personne assignée à résidence, de se trouver en relation avec certaines personnes
  • Placement sous surveillance électronique mobile
  • Dissolution d'associations ou groupements
  • Fermeture provisoire de salles de spectacle, débits de boissons ou lieux de réunion
  • Interdiction de réunions de nature à provoquer ou entretenir le désordre
  • Remise des armes et munitions
  • Perquisitions
  • Perquisitions par un système informatique ou équipement terminal
  • Interruption de tout service de communication au public en ligne

28/12/2015

La poésie, un crime contre l’État

« Le collectif de solidarité avec Keywan », cinéaste iranien condamné à la prison et à recevoir « 223 » coups de fouets nous a adressé un texte que nous relayons.

Aucun média francophone n’a jusqu’ici publié de dénonciation, ce qui pose de nombreuses questions,au moment où le pouvoir iranien est ripoliné pour paraître présentable à une future table de négociations sur le Moyen Orient.

Keywan Karimi, IRAN

La poésie, un crime contre l’État

En octobre 2015, le cinéaste Keywan Karimi a été condamné à six ans de prison et à 223 coups de fouet pour « propagande contre les lois gouvernementales » et « insultes à la sacralité de la religion. » Il était auparavant emprisonné, puis relâché, surveillé et assigné à résidence sous caution.

Ce qui justifie aux yeux du gouvernement iranien cette sentence dont l’application est imminente est un film documentaire sur les murs de Téhéran, dont les graffitis et les peintures retracent l’histoire de l’Iran de la chute du shah à nos jours.

Dans l’urgence d’épargner à Keywan la barbarie d’un tel jugement, il faut compter sur une mobilisation de l’opinion publique où s’enrôleront sans trop de peine les élus de gauche et de droite d’une démocratie corrompue, toujours prête à se servir de l’humanisme comme d’un savon qui lui ôte un peu de sa crasse. Il n’est pas exclu que le gouvernement iranien s’avise aussi qu’il est préférable ne pas agacer inutilement la fausse bonne conscience des hommes d’affaires, toujours en quête de prétextes pour faire monter les prix, escomptant des affaires rentables avec un gouvernement prétendument modéré.

Porter de tels faits à la connaissance de tous est un acte doublement salutaire. Il s’agit bien sûr d’éviter à Keywan une peine inique. Mais il propage inséparablement la conscience que vivre librement selon ses aspirations est la poésie qui mettra fin aux archaïsmes qui persistent à régner partout. La poésie vécue et revendiquée est une violence sans armes, une violence qui n’a pour elle que la résolution de ne pas céder à la peur, aux menaces, à toutes les formes de pouvoirs qu’elles relèvent de la religion, des idéologies ou des réflexes individuels de prédation.

Collectif de Solidarité avec Keywan.

 

Lettre modèle de soutien  à envoyer au soutien-keywan@kedistan.net ...

Prenez soin d’envoyer ce courrier à l’adresse ci dessus, jusqu’au 2 janvier 2016.

Au Chef de la magistrature iranienne M. Larijani

Il y a deux mois, nous avons appris que notre collègue kurde iranien Keywan Karimi a été condamné à 6 ans de prison et 223 coups de fouet pour «propagande contre le régime» et «insulte aux principes sacrés» pour son film «Écrire sur la ville». Karim avait été emprisonné déjà en 2013 à l’isolement pendant deux semaines, ensuite libéré sous caution et mis en surveillance, assigné à domicile avec l’interdiction de quitter le pays.

La semaine dernière, il a été reçu par la Cour d’appel d’une manière qui nous permet d’espérer un changement de la peine en sa faveur.

Artistes travaillant pour montrer la réalité et rendre la vie belle et tolérable pour les humains, nous sommes intimement convaincus que Keywan Karimi suit cette voie avec ses films. A nos jours, le monde est empli de violences, et nous pensons que le gouvernement et les citoyens doivent collaborer plus étroitement au lieu d’encourager davantage la violence, l’utilisation des armes et nourrir la peur qui deviennent une menace pour nous tous.

Dans l’urgence, pour sauver Keywan Karimi de la sévérité de cette peine, nous nous adressons aussi à l’opinion publique, indépendamment de la nationalité et la religion comme votre grand poète Sadi a dit :

Si un membre est atteint par la douleur,
Les autres membres seront dans la gêne.
Si vous n’avez aucune empathie pour la douleur humaine,
Vous ne pourrez pas conserver le nom d’humain.

Par la présente, nous vous demandons d’agir immédiatement dans l’exercice de vos fonctions de sorte que cette peine soit annulée et que Keywan Karimi puisse voyager sans crainte et poursuivre son travail.

Veuillez recevoir et accepter l’assurance de notre très haute considération

 

Noms du ou des signataires :.............................

24/12/2015

DECHOIR OU CONGEDIER ?

L'indignité présidentielle est-elle donc congénitale ?
L'indignité maintenant, la francisque pour demain.
Qui la décernera ?

IndignitéDÉCHUS SOUS VICHY
Ces 15 154 Français que le régime de Vichy a dénaturalisés

Les 22, 23 juillet et 7 octobre 1940, trois lois sont votées, autorisant la dénaturalisation des « indignes d’être français », la déchéance de la nationalité pour ceux qui rejoignent de Gaulle à Londres et l’abrogation du décret Crémieux : 15 154 hommes, femmes, enfants et vieillards sont ainsi dénaturalisés, 446 personnes sont déchues et 110 000 juifs d’Algérie perdent leur citoyenneté. Extraits de Indignes d’être Français - Dénaturalisés et déchus sous Vichy, d’Alix Landau-Brijatoff (BUCHET CHASTEL)

À travers le parcours de quelques figures marquantes qui ont eu à subir l’infamie de la perte de nationalité - Marc Chagall, Serge Gainsbourg, René Cassin, Ève Curie, Jean Daniel, Jacques Derrida… -, c’est l’histoire de toutes les victimes qui est racontée dans Indignes d’être Français - Dénaturalisés et déchus sous Vichy, d’Alix Landau-Brijatoff. Mais c’est aussi l’histoire de ces trois lois et de ceux qui les ont édictées et consciencieusement mises en application, sans être inquiétés à la Libération. Les 15 154 dénaturalisés nous renseignent donc sur l’État français d’hier, d’aujourd’hui et peut-être de demain. Car la nationalité française et son acquisition restent l’objet de polémiques permanentes, mais aussi d’une certitude : "elle ne se mérite pas".

Comme l’énonce Denis Olivennes dans sa préface, "l’un des mérites du présent livre est de nous rappeler combien la conception ouverte de la patrie est au cœur de l’identité française. Il est bon que cela soit souligné en un temps de crise économique et de doute national si propice à l’oubli de nos valeurs fondatrices".

Extraits de Indignes d’être Français, d’Alix Landau-Brijatoff (BUCHET CHASTEL)

Les 15 154 dénaturalisés entre 1940 et 1944 sont le sujet principal de ce livre : ils sont "retrayés" – mot issu du Moyen Âge, adjectif de droit relatif au retrait de "droits litigieux" selon le Code civil, et plus précisément à la loi du 22 juillet 1940[1] instaurant une "commission de révision des naturalisations". Ce sont les naturalisations intervenues depuis la loi du 10 août 1927 : environ 900 000 personnes sont concernées.

Les 468 déchus de leur nationalité seront également évoqués : les Français de souche "ayant quitté le territoire national entre le 10 mai et le 30 juin 1940" – loi du 23 juillet 1940, ainsi que les lois du 10 septembre 1940 et du 28 février 1941.

Enfin la loi du 8 mars 1941, permettant la déchéance de ceux "qui trahissent les devoirs incombant aux membres de la communauté nationale, ou encore se rendant à l’étranger sans autorisation gouvernementale".

Il en va de même des 110 000 juifs algériens collectivement déchus de leurs droits à la citoyenneté française, c’est- à-dire ramenés de l’état de citoyen à celui de sujets, d’indigènes, par l’abolition (loi du 7 octobre 1940) du "vieux" décret Crémieux, décret no 136 du 24 octobre 1870, qui accorde d’office la citoyenneté française aux juifs d’Algérie. Ils subiront alors de nombreuses vexations : 18 000 enfants seront exclus des écoles publiques et 2 000 personnes seront enfermées dans des camps de travaux forcés.

Ces trois lois constituent le premier volet de la refonte de la nationalité française.

Il s’agit de :

– revenir rapidement sur les naturalisations, rectifiant les "errements" responsables de la décadence et de la défaite françaises ;

– réduire le nombre de naturalisations par des conditions drastiques (durée de séjour, critères et qualités des admis) ;

– bâtir surtout un nouveau code de la nationalité.

La nouvelle législation est mise en chantier dès l’installation du gouvernement en juillet 1940. Elle est non aboutie en 1944, après des travaux incessants du ministère du Sceau, interventions innombrables des théoriciens (Mauco, Benoît, etc.), des autres ministères (Affaires étrangères, Intérieur), des cabinets de Laval et Pétain, du CGQJ (Commissariat général aux questions juives), et bien sûr des autorités allemandes en France et à Berlin.

L’auteur principal de ces trois lois est le premier ministre de la Justice et du Sceau de Vichy, Raphaël Alibert, maurrassien et antisémite violent, considéré comme "fou" par certains de ses collègues du gouvernement de Vichy[2]. Il présente les lois, les met en place, tout comme les textes qui suivent sur le statut des juifs et autres textes raciaux. Condamné par contumace, puis amnistié par de Gaulle, il meurt tranquillement dans son lit en juin 1963. Ces lois sont consanguines dans l’esprit des auteurs, mais répondent à des objectifs différents.

Les dénaturalisations : la loi du 22 juillet 1940 vise certes à revenir sur "le laxisme" de la IIIe République, mais surtout à mettre en œuvre les tendances de fond (politiques, sociales, culturelles) réactionnaires, xénophobes et antisé- mites portant sur la nationalité, telles que développées tout au long des années 1930. D’inspiration fortement maurrassienne, ce texte inaugure et concrétise ce que la droite dite "nationaliste" dénonce depuis la loi de 1927 et ses consé- quences : l’afflux de "Français de papier". Les coupables de la décadence française et de la défaite sont les étrangers, les juifs, les communistes, les francs-maçons. Ils sont indé- sirables, indignes d’être français. La débâcle, l’arrivée du maréchal Pétain, l’armistice, la capitulation, l’occupation nazie et la Collaboration ont pu les autoriser, les faciliter.

L’objectif prioritaire et urgent de Vichy – mais non atteint – est la refonte complète du code de la nationalité. Son caractère racial ou raciste est indiscutable, tant dans les textes de Georges Mauco qui les inspire, que dans les nombreuses lois raciales inspirées des lois nazies promulguées dès 1933. Certaines d’entre elles seront même autochtones et devancières. Elles sont mises en œuvre dès 1940.

 

Alix Landau-Brijatoff est née le 20 avril 1942 à Perpignan. Elle est la troisième fille d’Adolphe-Abraham Landau et de Bluma Katz-Jankelovitch, deux communistes émigrés de leurs pays d’origine (Pologne et Lettonie) dans les années 1920, naturalisés dans les années 1930, dénaturalisés en 1943. Docteur en psychologie sociale, elle est également romancière.

[1] Elle est précédée d’une première loi le 16 juillet 1940.

[2] Témoignage de Paul Baudouin, ancien ministre des Affaires étrangères devant la commission d’enquête de l’Assemblée nationale, en 1948. AN.C//18433.

En savoir plus sur http://www.jolpress.com/alix-landau-brijatoff-juif-ces-15-154-francais-que-le-regime-de-vichy-denaturalises-article-819736.html#VteP6temeoXremzs.99

17/12/2015

Attentats et pédagogie "Star Wars"

Pour justifier l’état d'urgence et faire en sorte que les forces de l'ordre chargées de "l’interpréter", soient perçues de façon positive dès la petite enfance... rien de plus efficace que la pédagogie "Star Wars" appliquée dès le CP :

 

Les policiers d'élite du Raid et de la BRI sont devenus des héros aux yeux des enfants (...). Au dernier étage du 36 quai des Orfèvres, les hommes de la BRI ont affiché sur leurs murs les plus belles lettres de remerciements et les plus beaux dessins reçus après les attentats du 13 novembre. Et c'est une lettre écrite par une classe de CP en Seine-Saint-Denis qui a le plus touché les policiers de la BRI. L'un d'eux a accepté de rencontrer les enfants.

attentats,novembre 2015,medias

Surprise. La surprise a été organisée avec la complicité de la maîtresse. Le policier a répondu aux questions des petits élèves. Au surlendemain des attentats, les enfants ont posé 1 000 questions et c'est par la parole que l'institutrice a pu apaiser leurs angoisses. "Suite aux événements, il était naturel d'en parler avec les enfants en classe. Et c'est en en parlant que l'idée est venue", explique cette dernière.
Francetv info

 

Les attentats du 13 novembre 2015 expliqués par la presse jeunesse : des choix éditoriaux au garde-à-vous

par Chloé Jiro,

Comment parler des attentats avec les enfants ? Une question difficile à laquelle ont dû se confronter parents, proches et personnels éducatifs dans les jours qui ont suivi. Les professionnels de la presse jeunesse ont alors proposé des supports au contenu parfois…. très discutable.

Nous avons étudié la première édition post-attentats de six médias s’adressant aux enfants, sur une tranche d’âge de 6 à 14 ans :

Le Journal des Enfants (pour les 9-14 ans) : « Plusieurs attentats frappent Paris », mis en ligne le 15 novembre ;
Astrapi (pour les 7-11 ans) : édition spéciale mise en ligne le 15 novembre ;
Le Petit Quotidien (pour les 6-9 ans) : édition du 17 novembre, mise en ligne le 15 novembre ;
Mon Quotidien (pour les 10-14 ans) : édition du 17 novembre, mise en ligne le 15 novembre ;
Le P’tit Libé (pureplayer pour les 7-12 ans) : n°3 « Les attentats de Paris », mis en ligne le 16 novembre ;
1 jour 1 actu (dès 8 ans) : n° 92, édition du 20 au 26 novembre 2015, mise en ligne le 18 novembre.

Ces médias ont donc publié assez rapidement des éditions spéciales, articles en ligne ou brochures téléchargeables, sur les attentats, les parents et les personnels éducatifs étant invités à s’appuyer sur ces ressources.

À l’exception du P’tit Libé, tous ces titres (presse papier) sont présents dans de nombreux établissements scolaires (Bibliothèque Centre Documentaire, et Centre de Documentation et d’Information) validés par les prescripteurs que sont les enseignant-e-s. Ils touchent une large audience : à titre d’exemple le JDE est tiré à 45 000 exemplaires, Astrapi à environ 60 000, Le Petit Quotidien et Mon Quotidien à environ 50 000 chacun. Il faut aussi tenir compte du fait que leur présence dans les établissements scolaires démultiplie le nombre de lecteurs et lectrices par exemplaire (l’audience étant donc très largement supérieure à la diffusion). Ces productions sont donc loin d’être anecdotiques.

Or à la lecture des éditions « spéciales attentats », émises par quatre entreprises de presse différentes (Bayard, Playbac, Libération et la Société alsacienne de publication), on peut identifier quatre éléments de discours récurrents, loin de l’« objectivité journalistique » pourtant particulièrement requise lorsqu’on s’adresse à des enfants.

1. Les musulmans tranquilles

Où l’on apprend qu’en France les « bons musulmans » ne font pas de vagues - c’est d’ailleurs à ça qu’on les reconnaît :

Le P’tit Libé



Astrapi



Si la préoccupation de lutter contre les amalgames et la stigmatisation des musulman-e-s est louable, on peut regretter cet éloge de la discrétion : il laisse en effet entendre que les musulman-e-s qui seraient un tant soit peu trop visibles ou bruyant-e-s sont potentiellement suspect-e-s.

2. « Notre » mode de vie et le prosélytisme terroriste

Les terroristes auraient attaqué un concert, un stade et des terrasses de bar pour « nous » convertir à leurs règles religieuses, alors que la France est un pays de libertés, ce qui leur est insupportable :

Mon Quotidien et Le Petit Quotidien

 

1 Jour 1 actu

 

Le P’tit Libé

 

Astrapi

 

Cette idée que nous vivons dans une démocratie parfaite et enviable dans le monde entier et, parallèlement, la présentation caricaturale des motivations des terroristes, mériteraient davantage de circonspection, en particulier dans des médias qui s’adressent à des enfants et contribuent à façonner leur compréhension du monde. Car derrière ces clichés et cette valorisation de « notre » mode de vie, c’est encore le mythe du « choc des civilisations » qui transparaît et qui peut s’insinuer dans l’esprit des lecteurs et lectrices.

3. L’état d’urgence c’est bien, la police et l’armée nous protègent

Comment la France se protège ?
Le président de la République François Hollande a été très clair : la France va combattre ces terroristes. Il a décrété [ordonné] l’état d’urgence dans tout le pays. C’est une mesure qui permet à la police, l’armée, de mener de nombreuses actions pour protéger le pays. De très nombreux militaires sont arrivés en renfort.

Le JDE

 

1 jour 1 actu

 

Le Petit Quotidien

 

Le P’tit Libé

 

Il y a bien là une description factuelle : l’augmentation des forces policières et militaires suite à la mise en place de l’état d’urgence. Cependant le fait de présenter ces mesures - et le renforcement des services de renseignements - comme positives et nécessaires « pour protéger les Français » sans évoquer les critiques qu’elles ont suscitées repose sur le principe que la limitation des libertés et la restriction des droits est logique et légitime. Il s’agit donc, sous couvert d’information, d’un positionnement idéologique.

4. Il y a bien une guerre ailleurs mais c’est contre le terrorisme islamiste et il faut donc la poursuivre

 

Mon Quotidien

 

Astrapi

 

Le P’tit Libé

 

1 Jour 1 Actu

 

Mon Quotidien

 

Il est plutôt positif que les médias prennent la peine de lier les attentats du 13 novembre à la politique internationale militariste de la France. Il est d’autant plus dommage que les enjeux économiques soient esquivés, au profit d’un discours manichéen qui propose comme seul modèle explicatif le motif de la vengeance face à la « guerre juste » menée par la France.

5 [BONUS] Au fait : C’est la Troisième Guerre mondiale !

La palme revient sans conteste à Playbac Presse qui explique tranquillement dans ses deux publications (Le Petit Quotidien et Mon Quotidien, à partir de 6 ans donc…) que c’est la Troisième Guerre mondiale :

Mon Quotidien

 

Le Petit Quotidien

 

De quoi rassurer les enfants en gardant le sens de la mesure…

***


Quatre grandes thématiques donc, dont le moins que l’on puisse dire est qu’elles sont traitées en ayant recours à une simplification certaine. Malgré la préoccupation d’intégrer des aspects délicats, ce traitement des attentats vire en effet parfois à l’auto-caricature, et correspond somme toute au discours dominant. Habituer les enfants à l’idée d’une guerre qui dure, à distinguer les « bons » et les « mauvais » musulmans, accréditer l’idée d’un « choc de civilisation », les accoutumer à ne se sentir en sécurité qu’entouré-e-s de policiers et de militaires… Voilà, en définitive, quasiment la seule perspective offerte par la presse jeunesse au lendemain des attentats.


Chloé Jiro pour Acrimed

07/12/2015

Et après le premier tour des élections (régionales) ?

Notre responsabilité, leur culpabilité, le piège.

régionales,fn
E. Münch, 1902 Vampire II

Communiqué LDH

La LDH prend acte des résultats du premier tour des élections régionales. Constater le niveau historique atteint par le Front national n’enlève rien à la nature de ce parti. Ses dirigeants ont appris à faire révérence à la démocratie. Ils ne sont pas devenus, pour autant, des démocrates. Le Front national continue d’être l’héritier de tout ce que notre pays a pu connaître de détestable dans son histoire, et nul ne doit s’y tromper : sa victoire, fût-ce dans une seule région, aura une résonance symbolique désastreuse et des conséquences dramatiques pour la vie démocratique, économique, sociale, associative ou artistique de ce territoire. Mais combattre l’imaginaire mortifère de ce parti suppose que l’on entende d’abord ces milliers d’espoirs déçus ou trahis. C’est d’abord notre impuissance collective à proposer un autre avenir qui est en cause. Cela implique que les choix offerts aux électeurs et aux électrices expriment clairement que d’autres chemins sont possibles. Peut-être encore pire que le Front national lui-même sont ses idées, reprises par les uns et les autres et qui deviennent ainsi une maladie chronique de notre pays. En reprenant certains des projets du Front national, de manière plus ou moins édulcorée, on accrédite l’hypothèse d’une société repliée sur elle-même, aux libertés surveillées et où chacun sera l’ennemi de l’autre. User de la peur, celle que provoque la violence du monde, l’injustice de notre société ou l’image de l’autre pour gouverner entraîne autant d’illusions à court terme que de désastres pour l’avenir. Nous avons besoin d’une autre ambition que celle qui consiste à cultiver l’exercice du pouvoir.

Les enseignements à tirer de ces résultats électoraux ne peuvent être de renoncer à nos principes. Mais ceux-ci ne peuvent reprendre le dessus que s’ils sont affirmés sans détours. Nous devons tout mettre en œuvre pour construire un autre projet qui se développe dans une démocratie ouverte et solidaire, inscrite dans le monde et l’Europe et ancrée dans notre pays. C’est notre responsabilité collective.

Résultats

 

04/12/2015

Respecter, réaffirmer, protéger la liberté de création

L’Observatoire de la liberté de création appelle chacun à la responsabilité pour le respect de la liberté de création sur tout le territoire.

liberté de créationPieta - Oskar Kokoschka

Communiqué :

L’Observatoire de la liberté de création, composé de personnalités et de partenaires représentant, dans leur diversité, les secteurs artistique et culturel, met chacun en garde à l’encontre des dérives populistes des discours portant sur la culture. Aucun parti politique ne peut prétendre exercer un contrôle sur les artistes, les arts et la culture.

L’Observatoire tient à rappeler que les atteintes à la liberté de création et de diffusion des œuvres sont souvent le fait de l’extrême droite qui voudrait plier l’art à respecter sa morale, sa conception de la religion, de la famille…

Les œuvres doivent être créées et montrées librement, et ce principe, qui doit être clairement réaffirmé par la loi sur la création en cours de discussion, doit être effectif sur l’ensemble du territoire, sans restriction ni exception.

Le rôle de l’État, comme celui des collectivités territoriales, régions comprises, est de conduire une politique qui mette en œuvre le double principe de l’article 27 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme : le droit pour chacun de prendre librement part à la vie culturelle, d’accéder librement aux œuvres et de jouir des arts ; ainsi que la protection des intérêts matériels et moraux des auteurs.

Les œuvres font vivre l’espace public par la faculté de débattre qu’elles suscitent, laquelle est la marque de la démocratie. Dans une société démocratique, l’art est vital, non parce qu’il divertit ou console, mais parce qu’il permet de déplacer le regard et de questionner le rapport que chacun entretient avec le monde qui l’entoure.

Les artistes ne sont pas au service du pouvoir. C’est le pouvoir qui doit protéger les artistes et leurs œuvres, les lieux de culture et les publics potentiels.

L’Observatoire de la liberté de création affirme avec force que toute politique contraire à la liberté de création et de diffusion des œuvres doit être combattue, que ce soit par les citoyennes et les citoyens par le droit de vote, ou par l’État, qui doit s’assurer qu’aucune dérogation aux principes démocratiques ne soit admise dans les territoires.

Paris, le 3 décembre 2015

Membres de l’Observatoire de la liberté de création :

  • Ligue des droits de l’Homme
  • Acid (Association du cinéma indépendant pour sa diffusion)
  • Addoc (Association des cinéastes documentaristes)
  • Aica France (Section française de l’association internationale des critiques d’art)
  • ARP (Association d’auteur-réalisateurs-producteurs)
  • Cipac (Fédération des professionnels de l’art contemporain)
  • CPGA (Comité professionnel des galeries d’art)
  • Fédération des salons fêtes du livre de jeunesse
  • Fédération nationale des arts de la rue
  • La Ligue de l’enseignement
  • SFA-CGT (Syndicat français des artistes interprètes)
  • SGDL (Société des gens de lettre)
  • Snap-CGT (Syndicat des artistes plasticiens
  • SNSP (Syndicat national des scènes publiques)
  • SRF (Société des réalisateurs de film)
  • Syndeac (Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles)
  • Syndicat français de la critique de cinéma