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19/05/2014

TAFTA, un comble et un peu plus

Quelques bonnes raisons de ne pas s’abstenir le 25 mai 2014...

L’AMI, Accord Multilatéral sur l’Investissement, décrit  par Susan George, comme une incarnation de Dracula et devant mourir exposé en plein jour, est revenue par la fenêtre.
En 1998, Lionel Jospin avait pourtant fait appel à Catherine Lalumière pour exposer l’AMI à une mort certaine. Rien n’y a fait. Apparemment.
Aujourd’hui, l’État «qui ne peut pas tout», s’apprête à sacrifier ce qui lui reste de crédibilité dans son combat contre la finance sur l’autel du libre échange et de l’Europe néolibérale. Il croit pouvoir jouer sur du velours et faire passer en catimini les désirs du géant américain pour une réalité massive, douce à la misère des peuples et tout aussi destructrice.

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17 Mai. Ste Tulle. Francis Wurtz, député européen honoraire est venu alerter du risque "TAFTA". Bien reçu.

Cette fois-ci, le nom de code est "TAFTA", Trans-Atlantic Free Trade Agreement (accord commercial trans-atlantique) ou encore "TTIP", Transatlantic Trade and Investment Partnership ou Partenariat Transatlantique de Commerce et d'Investissement).
C’est un projet d'accord commercial entre l'Union européenne et les Etats-Unis concernant des domaines aussi variés que l'accès aux médicaments, la sécurité alimentaire ou le règlement des différents privés-publics.

C’est par hasard que l’on a découvert le pot aux roses, les négociations, menées par un petit groupe de fonctionnaires non élus, devant durer jusqu'à fin 2014, après que le parlement européen ait été élu.

Justement. Ne serait-ce que pour cette raison, s’abstenir de voter à l’élection européenne du 25 mai serait coupable, voir irresponsable. Encore faudra-t-il choisir le mieux disant et s’assurer que les parlementaires élus aient au préalable promis de rejeter cette horreur. Mieux qu'ils en soient profondément convaincus. Compte tenu de l’expérience sociale de ces deux dernières années, l’exercice est compliqué d’autant que tous les candidats ou presque jurent leur grand dieux qu’ils sont au courant de la combine et que l'enjeu dépasse l’intérêt de leur propre parti.
De fait, quatre ans plus tôt, en 1994,  l’ALENA, Accord de Libre-Echange Nord-Américain concocté par les États Unis, touchait le Canada et le Mexique et donnait un aperçu de son pouvoir de nuisance…


Que l’on se souvienne aussi que l’Allemagne de la chancelière Merkel qui s’était offusquée d’avoir été mise sur écoute par la NSA - et qui a du mal à l’oublier -, digère encore plus mal sans doute le fait d’être – déjà - traduite en justice pour avoir oser démanteler son secteur nucléaire.

Que l’on se souvienne aussi que le fils de l’actuel vice-président des USA, Hunter Biden, va pouvoir plaider contre les États en conflit avec des sociétés privées. Ceci expliquant cela, c’est en Ukraine qu’il a choisit de faire un galop d’essai.
Un comble !

18/05/2014

L'asile selon Létard Touraine

15 mai 2014.
La LDH et l’Assemblée citoyenne du bassin manosquin ont choisi comme thème de réflexion l’examen du rapport Létard Touraine qui doit servir de base à un prochain débat parlementaire en vue d’une énième réforme du droit d’asile, laquelle devrait entrer en application courant 2015.

Dominique NOGUERES, avocate et membre éminente de la LDH, spécialisée sur cette question douloureuse, complexe et qui demande beaucoup d'abnégation et de modestie, nous a aidé à en décrypter les méandres.

Dominique Noguères, létard-touraine,asile,

Le contexte général est le suivant :
Les demandeurs d’asile qui réussissent à franchir les obstacles physiques qui se sont dressés devant eux, ne sont pas assurés pour autant de se voir reconnaître le statut de réfugiés.
Ils doivent satisfaire aux exigences de la loi et traverser un labyrinthe de plus en plus complexe.

Nous n’en sommes plus à l’article 4 de l’Acte constitutionnel de 1793... 
«Tout homme né et domicilié en France, âgé de vingt et un ans accomplis ; tout étranger âgé de vingt et un ans accomplis, qui, domicilié en France depuis une année y vit de son travail ou acquiert une propriété ou épouse une Française ou adopte un enfant ou nourrit un vieillard ; tout étranger enfin, qui sera jugé par le Corps législatif avoir bien mérité de l’humanité ; est admis à l’exercice des Droits de citoyen français»,
Nous n’en sommes pas non plus à l’article 13 de la Déclaration Universelle des Droit de l’homme de 1948...
«Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays».


Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) qui date de 2004 (ère Villepin) n’a pas été dans le sens d’une simplification des démarches pour les demandeurs d’asile et pour tout ceux qui les accompagnent.
On peut même avancer que la tendance est à criminalisation de l’étranger en situation irrégulière ou en attente de régularisation. La suspicion pèse sur les demandeurs d’asile et entretient les discours sécuritaires «affolant» l’opinion publique au risque d’entraîner un repli identitaire et xénophobe, qui ne peut que porter préjudice à l’exercice du droit d’asile en provoquant un climat de suspicion généralisée à l’encontre de ceux qui sollicitent une protection.

Depuis plusieurs années, les instances de surveillance du respect des textes internationaux au sein des Nations unies et du Conseil de l’Europe n’ont pourtant pas cessé de recommander à la France de remédier à cette situation.
En 2012, ces instances déclaraient :
«La résistance obstinée des autorités françaises est l’illustration d’une politique d’asile davantage guidée par une logique de suspicion à l’égard des demandeurs qu’une véritable volonté de les protéger».

Dans ce contexte, les premières phrases du rapport Létard Touraine témoignent d’une incroyable hypocrisie, puisque après avoir mis en exergue le fait que la France avait toujours été une terre d’accueil, le droit d’asile y était menacé par …, «l’afflux d’une immigration économique massive (sic)».

Oublié le fait que l’immigration économique, outre les catastrophes climatiques dont on peut interroger l’origine, puisse résulter d’aberrations relevant de la responsabilité du système libéral qui n’hésite pas à s’assujettir autocrates et tortionnaires de tout bord, au nom d'une compétitivité devenant de ce fait haïssable. 
 
Tout au long du rapport parlementaire, les déboutés du droit d’asile sont pointés du doigt.
Comme par hasard, la plupart ne semble pas appartenir à des classes sociales très favorisées. Ils seraient la cause des dysfonctionnements de ce système d’asile : ils «engorgent le dispositif» alors qu’ils «n’ont pas vocation à rester» !!.

Bref, à des situations humaines le rapport Letard-Touraine oppose une logique comptable et politicienne en contradiction avec l’éthique dont il fait semblant de se prévaloir, et fait abstraction des avis de la  Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme et de la Coordination française pour le droit d’asile. …

La volonté des parlementaires de remédier à la complexité et à l'évidente iniquité du droit d'asile contenues dans les textes sera testée à l'aune de leur prochain débat sur le sujet.

Voir aussi le CR de La Marseillaise

La réflexion s'est poursuivie avec la projection du documentaire "Les Arrivants" à travers lequel on peut mesurer à quel point les demandeurs d'asile autant que les personnes chargées de les accompagner sont vulnérables et broyés par des règlements abscons.
La recette de la séance était réservée à une famille tchétchène en attente d'être reconnue dans ses droits.

06/05/2014

Le droit d’émigrer - Questions à Catherine Withol de Wenden

Le droit d’émigrer - Questions à Catherine Withol de Wenden, auteur de "La Question migratoire au XXIe siècle. 

Catherine Wihtol de Wenden est Directrice de recherche au CNRS. Elle est  spécialiste des migrations internationales sur lesquelles depuis une vingtaine d'années, elle a mené différents travaux, conduit de nombreuses études de terrain, et dirigé différentes recherches comparatives, surtout européennes. Elle a été consultante auprès de l'OCDE, du Conseil de l'Europe, de la Commission européenne et "expert externe" auprès du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. Elle est aussi membre de la Commission nationale de déontologie de la sécurité.

immigration

"Dans un monde où tout circule librement, le droit à la mobilité des êtres humains ne va pas de soi. Il y a urgence à définir un droit international des migrants. C’est à ce prix que les mouvements migratoires ne seront plus considérés comme une menace par les uns et une utopie par les autres, mais enfin comme la clé d’un développement plus équitable." C.W.W.

Vous venez de publier Le droit d’émigrer aux éditions du CNRS. Dès la première page vous faites un parallèle entre la liberté de circulation des citoyens des pays riches et les limitations comparables à celles qui existaient dans le passé dans le bloc communiste aux plus démunis. Pourquoi ?

En effet, pendant longtemps, le droit de sortie était un privilège car les pays autoritaires (de gauche et de droite) ont tous interdit ou restreint le droit de sortie à quelques élites : diplomates, artistes, commerçants, chercheurs…Aujourd’hui, les citoyens des pays riches sont souvent dispensés de visas pour entrer ailleurs car ils ne représentent pas de « risque migratoire », de même que les riches des pays pauvres qui entrent dans les catégories requises pour l’obtention de visas (élites diplômées, investisseurs, commerçants et hommes d’affaires…). Les autres peinent à remplir les conditions requises pour l’accès au statut de travailleur salarié, de membre du regroupement familial, d’étudiant ou de réfugié. Ils prennent donc le chemin de la clandestinité.

Vous écrivez qu’auparavant le droit de sortie était limité par les États autoritaires et que c’est désormais le droit d’entrée qui l’est par les pays démocratiques. Il était au XIXe siècle plus facile d’entrer que de sortir du sien, c’est aujourd’hui l’inverse. Comment expliquez-vous cette tendance ?

En un siècle, on est passé de l’interdiction du droit de sortie et de la liberté du droit d’entrée à la généralisation du droit de sortie et à la restriction extrême du droit d’entrée. Cette situation pénalise considérablement les pays du Sud et transforme ceux-ci en pays de transit quand ils se trouvent aux portes des pays riches (Mexique, Maroc, Turquie…). La question va devenir d’autant plus brûlante que les pays du Sud accueillent aujourd’hui autant de migrants (110 millions) que les pays du Nord (115 millions). Parmi les signataires de la Convention des Nations Unies sur les droits de tous les travailleurs migrants et de leurs familles, ne figure aucun pays du Nord. Car ils craignent de devoir reconnaître des droits aux sans-papiers. Au sud, l’entrée est plus aisée, mais les droits sont peu reconnus. Le régime des frontières dépend donc de l’origine des migrants et de la direction qu’ils prennent : du nord au sud, il est facile de sortir et d’entrer, du sud au sud, c’est la même chose, comme du nord au nord alors que du sud au nord, on peut facilement sortir mais difficilement entrer quelque part. Les frontières sont alors ouvertes ou fermées, de l’intérieur ou de l’extérieur selon les trajectoires et les profils de migrants

Vous écrivez que la mobilisation pour le droit d’immigrer va prendre au XXIe siècle la même ampleur que la campagne pour l’abolition de l’esclavage. N’est-ce pas excessif ?

L’interdiction ou la limitation du droit d’émigrer, c'est-à-dire le droit de sortie (presque partout acquis dans le monde sauf en Corée du Nord) et le droit d’entrée dans un autre pays que le sien ont donné lieu à des centaines de milliers de morts, de trafics frontaliers, d’exploitation des candidats au voyage (racket, prostitution, esclavage moderne dans des ateliers clandestins, mineurs non accompagnés…) qui heurtent tellement les droits de l’homme que leur non-respect fait scandale dans les pays démocratiques tout en concernant aujourd’hui le monde entier. C’est pourquoi, ils tiennent une place majeure dans les débats et confrontations du XXIème siècle et devraient figurer parmi les OMD (Objectifs du Millénaire pour le Développement) de la planète. Mais la mobilisation transnationale sur ce thème est faible car elle concerne des acteurs très disparates tels que les employeurs, les militants des droits de l’Homme, les pays de départ, favorables à l’ouverture des frontières et les défenseurs de l’Etat providence, les nationalistes et l’extrême droite favorables à leur fermeture. Par ailleurs, les tentatives de gouvernance mondiale des migrations tardent à se mettre en place pour imposer aux Etats une éthique de conduite car la question a encore peu de légitimité sur la scène internationale : on n’en parle ni au G8 ni au G20. C’est l’actualité des scandales et les morts aux frontières qui poussent à porter cette question au plus haut niveau de la scène internationale.

"Comme des fleurs d’amandier ou plus loin"

Darwich
Photo d'Edward “Edd” Carlile

«
Quand tu prépares ton petit-déjeuner, pense aux autres. (N'oublie pas le grain aux colombes.)

Quand tu mènes tes guerres, pense aux autres.  (N'oublie pas ceux qui réclament la paix.)
Quand tu règles la facture d'eau, pense aux autres.  (Qui tètent les nuages.)
Quand tu rentres à la maison, ta maison,  pense aux autres.  (N'oublie pas le peuple des tentes.)
Quand tu comptes les étoiles pour dormir, pense aux autres.  (Certains n'ont pas le loisir de rêver.)
Quand tu te libères par la métonymie, pense aux autres.  (Qui ont perdu le droit à la parole.)
Quand tu penses aux autres lointains, pense à toi. (Dis-toi : Que ne suis-je une bougie dans le noir?
»


Poème de Mahmoud Darwish - "Comme des fleurs d’amandier ou plus loin "
Traduction Elias Sanbar

05/05/2014

TAFTA

Le samedi 17 mai à Sainte-Tulle (04) le Grand Marché Transatlantique fera débat.

Mediapart a interrogé les cinq candidats déclarés à la présidence de la commission européenne pour connaître leur position sur l'un des dossiers les plus explosifs de la campagne des européennes, l'accord de libre-échange avec les États-Unis. Qui est pour ? Qui est contre ? Les réponses de Martin Schulz (socialistes), Jean-Claude Juncker (droite), José Bové (Verts), Alexis Tsipras (gauche européenne) et Guy Verhofstadt (libéraux).

tafta

Communiqué de la Ligue des droits de l’Homme

Paris, le 5 mai 2014

La Commission européenne s’est engagée depuis plus d’un an, dans des négociations avec les États-Unis, sur un projet de traité (dit Tafta) portant sur le commerce et sur les flux financiers transatlantiques.

Le processus d’élaboration de ce Traité est inquiétant. D’abord, du point de vue démocratique : non seulement la Commission européenne a commencé à négocier en mars 2013 sans aucune légitimité, le mandat pour le faire ne lui ayant été conféré qu’en juillet 2013, mais les tenants et aboutissants de la négociation sont entourés d’une opacité incompatible avec tout contrôle démocratique sérieux sur ce qui se prépare au nom de plus de cinq cent dix millions de citoyens. Ainsi, aucun projet ni document précis n’ont été ni publiés ni même mis à la disposition du Parlement européen. En revanche, la Commission européenne va jusqu’à chiffrer à l’euro près le montant d’un prétendu bénéfice que chaque Européen retirerait de ce Traité, et les gouvernements banalisent le processus, comme s’il était sans grands enjeux.

Cette façon de faire qui tend à la désinformation aboutit à exclure les citoyens, les parties prenantes de la société civile et à laisser champ libre aux représentants des lobbies et des grandes entreprises transnationales. Elle jette un doute sérieux sur les buts recherchés par les négociateurs.

Il y a plus préoccupant. Ce qui a fini par transpirer du projet permet de le caractériser comme un outil de soumission de la démocratie vis-à-vis des acteurs financiers et entrepreneuriaux. De fait, il s’agit non seulement d’abaisser des droits de douane, au demeurant déjà très faibles, mais surtout, au titre de la suppression des « obstacles non tarifaires » au commerce et à l’investissement, de soumettre toute législation protectrice des salariés, des producteurs, des consommateurs, de l’environnement, de la santé publique, etc., aux bons vouloirs d’un « Conseil de coopération réglementaire », qui n’est responsable devant aucun citoyen. Corrélativement, toute entreprise pourrait attaquer un État devant un mécanisme ad hoc de règlement des différends pour paralyser le fonctionnement d’un service public, d’une entreprise publique, ou l’application d’une politique publique qui gênerait ses intérêts commerciaux ou financiers.

Ce Traité vise clairement à court-circuiter les pouvoirs démocratiquement légitimes pour faire les lois et les juridictions indépendantes et impartiales chargées d’appliquer le droit. L’objectif est de subordonner l’intérêt général et la protection des droits fondamentaux aux intérêts commerciaux et financiers. Certes, la France a obtenu que les biens culturels soient pour le moment retirés du mandat de la Commission européenne. Mais cette exclusion n’est ni certaine ni définitive et les normes sociales, sanitaires et environnementales sont, elles, menacées d’un alignement sur la protection la plus faible des salariés, des consommateurs et de l’ensemble de la population.

La Ligue des droits de l’Homme considère qu’un tel projet, qui engage l’avenir de tous les citoyens européens, ne saurait être poursuivi sans un débat sérieusement informé, contradictoire et public. Elle appelle les citoyennes et les citoyens à se saisir de cet enjeu, à interpeller l’ensemble des candidats aux prochaines élections européennes sur ce que sera leur vote, le jour où ce texte sera soumis pour approbation ou rejet au prochain Parlement européen. Car la crise de confiance entre l’Union et ses citoyens ne peut que s’aggraver, tant que les gouvernants de l’Europe ne prendront pas au sérieux la garantie des droits fondamentaux et les conditions minimales de l’effectivité démocratique. Le 25 mai, le pouvoir de les y contraindre sera entre nos mains à toutes et tous.