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30/01/2014

Le genre à l'école et hors l'école

Une suite au sketch "Dieudonné" où l’on assiste à une offensive faussement naïve et dont l’organisation a minutieusement été programmée, capable de revêtir des apparences légales et visant des populations économiquement et culturellement fragilisées, manipulables et sensibles aux mots d’ordre et théories négationnistes, complotistes, racistes ou xénophobes. Son but consiste manifestement à cristalliser, gonfler les effectifs de l’extrême droite non plus tant autour d'un bouc-émissaire «classique» que par la désignation d’un ennemie imaginaire. Lire aussi

Genre, école
Flatteur, le sexisme ?

Face aux mensonges de l’extrême droite, le gouvernement doit soutenir les ABCD de l’égalité - Communiqué LDH

Des activistes d’extrême droite ont lancé une action nationale pour l’interdiction de l’étude du genre à l’école. Cette campagne est basée sur un mensonge. En effet, les programmes scolaires et notamment les ABCD de l’égalité contiennent, conformément au Code de l’éducation, des éléments pédagogiques combattant les archétypes sexistes et promouvant l’égalité entre les sexes.

L’école, et c’est son rôle, enseigne le refus des discriminations, l’égalité entre les filles et les garçons, la liberté de construire l’esprit critique et l’intelligence par l’accès au savoir. C’est cette dimension d’égalité qui agresse une extrême droite familialiste, dont le modèle de société est de remettre les femmes « à leur place », à la maison ; de propager auprès des parents la peur d’une société sans préjugés et sans discriminations.

En appelant à boycotter l’école sur la base du mensonge et de la désinformation, en provoquant la censure d’un livre publié par le Centre national de documentation pédagogique, sous l’autorité du ministère de l’Éducation nationale lors du Salon de l’éducation, cette extrême droite familialiste entend peser sur les publications, les programmes ou encore la fréquentation scolaire.

Ces prétentions sont à prendre au sérieux et doivent être combattues énergiquement. L’école doit pouvoir poursuivre son travail pour la compréhension et l’éducation des rapports entre les hommes et les femmes, entre masculin et féminin, avec leur dimension d’inégalité, dont on sait qu’elle est grande. Leur « loi de la nature », c’est la loi du plus fort : alors que l’égalité se construit, s’apprend, comme la démocratie.

C’est pourquoi nous en appelons à la vigilance de tous les citoyens et citoyennes, face à des tentatives d’immixtion rétrogrades dans le système scolaire et de retour à l’ordre moral.

Paris, le 29 janvier 2014

29/01/2014

Les étrangers antifascistes à Marseille

Autour de Gilberto Bosques Saldivar
Un recueil de documents et de témoignages inédits sur la résistance au fascisme et au nazisme en Provence pendant la Seconde Guerre mondiale. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les étrangers antifascistes, antinazis et républicains chassés de leur pays par les dictatures, furent très nombreux en Provence et à Marseille.

Etrangers antifascistes à Marseille, Bosques Saldivar

Parmi eux il en est qui ont mené combat contre le fascisme et le nazisme sur le sol méridional, jouant un rôle non négligeable dans la lutte contre l'occupant.
Tous ont trouvé en Gilberto Bosques Saldivar (1892-1995), consul du Mexique en France et vétéran de la révolution mexicaine, un appui indéfectible. L'ouvrage, qui fait suite à une journée organisée le 11 octobre 2013 aux Archives départementales des Bouches-du-Rhône (dans le cadre du colloque "La culture de l'Europe en exil, Marseille, 1940-1944"), présente quatre cas emblématiques, au travers de témoignages.

  • Tout d'abord, celui de la jeune résistante autrichienne Mélanie Berger (née en 1921) qui, avec son groupe, œuvrait à la démoralisation des troupes allemandes. Arrêtée par la police de Vichy, lourdement condamnée par les juridictions d'exception de l’État français, incarcérée dans la prison des Baumettes, elle parvint toutefois à s'évader et à reprendre le combat.
  • Les mineurs espagnols de Meyreuil offrent un autre exemple d'engagement.Ces immigrés républicains faisaient partie du 6e GTE (groupe de travailleurs étrangers), structure crée par l’État français dans un but répressif et pour pallier au manque de main-d’œuvre. Ils s'organisèrent pour survivre, mais aussi, clandestinement, pour mener grèves et actions collectives. Leurs enfants, qui ont effectué un important travail de collecte de témoignages et de documents, évoquent ici leur vie à Meyreuil.
  • Le jeune communiste italien Giuliano Pajetta fut parmi les bénéficiaires d'un visa délivré par le consul du Mexique. Mais il choisit de ne pas partir pour les Amériques, s'évada du camp des Milles, relança l'action de son parti en Provence. Combattant en Italie, déporté à Mauthausen, il échappa à la mort. Sa fille Elvira, retrace son itinéraire de résistant, en Espagne, en France et dans son pays natal.
  • Une part importante de l'ouvrage est consacrée à Gilberto Bosques Saldivar, consul général du Mexique à Marseille et à son rôle essentiel dans le sauvetage de centaines de républicains espagnols, de combattants des brigades internationales et "d'indésirables", qu'il a pu faire partir pour le Mexique. Les deux filles du consul Bosques, Laura et Maria-Teresa, portent témoignage de son action, mais aussi de leur enfance à Marseille.
    Enfin, Gérard Malgat, auteur d'un important ouvrage sur Gilberto Bosques, apporte l'éclairage du biographe.

L'auteur : Robert Mencherini est historien spécialiste de l'histoire du monde et du mouvement ouvriers et participe à plusieurs équipes de recherche régionales et nationales. Il a coordonné l'écriture de cet ouvrage. Lequel fait suite à la Journée organisée par l'association PROMEMO avec le soutien du CG 13, de l'Office national des Anciens combattants - Victimes de Guerre des BdR (ONAC-VG), de l'Ambassade du Mexique en France, en partenariat avec l'association des Amis du Musée virtuel de la Résistance en PACA (MUREL), de l'association des anciens combattants de la Résistance (ANACR Marseille), de l'association Solidarité Provence Amérique du Sud (ASPAS) et des enfants de Républicains espagnols de Meyreuil.
L'ouvrage est actuellement en souscription (jusqu’au 4 mars) aux éditions Gaussen à Marseille.

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23/01/2014

«Je joue dans les champs du monde»

Un article paru récemment dans Le Huffington Post à propos des enfants en Syrie, remet à l’ordre du jour, s’il en était besoin, une initiative de la Ligue des Droits de l’Homme…

Je joue dans les champs du monde"

«Je joue dans les champs du monde». Des enfants en Syrie ou ailleurs font la démonstration que partout, par la mise en œuvre de l’imagination, l’acte créatif peut nous faire dépasser – supporter le réel quotidien. Pour eux, pour nous, il s’agit moins de se réfugier dans un monde illusoire que de l’appréhender pour ce qu’il est : trop souvent insoutenable, injuste et, que nous le voulions ou pas, humain. Il s’agit alors d’une construction et parfois d’une (re)construction.
C’est une des raisons pour lesquelles la Ligue des Droits de l’Homme organise, comme chaque année, un concours intitulé «Écrits pour la fraternité». Cette année, le thème retenu pour ce concours est : «Je joue dans les champs du monde»

Créé en 1991, le concours «Poèmes et lettres pour la fraternité», renommé en 2005 « Écrits pour la fraternité », s’adresse aux classes de grande section de maternelle, de primaire, de collège, de lycée et d’institut médico-éducatif (IME), mais aussi aux enfants isolés.
Les textes sont classés et primés selon sept catégories :
1) Grande section, CP et CE1
2) CE2, CM1, CM2
3) 6e, 5e
4) 4e, 3e
5) Lycée
6) Œuvres étrangères
7) IME et autres institutions ou classes spécialisées
Dans chaque catégorie, les œuvres individuelles, les œuvres collectives et les «autres œuvres» sont primées séparément.
Toutes les formes d’expression sont admises (textes en prose ou en vers, scènes de théâtre, textes de chanson, chansons en musique, DVD, œuvres graphiques, objets…)

Le dossier complet pour participer à ce concours est accessible sur le site national de la Ligue des Droits de l’Homme
ou
en consultant les fichiers suivants :

 

22/01/2014

«Twelve years a slave», de Steve Mc Queen

La LDH soutient le film « Twelve years a slave », de Steve Mc Queen (Sortie le 22 janvier 2014)


Solomon Northup, violoniste noir américain, a publié le récit de sa vie en 1853 : homme libre enlevé à Washington, vendu comme esclave et emmené dans une plantation de Louisiane où il vécut – ou survécut – pendant douze ans. Fait rarissime, il fut délivré grâce à un charpentier canadien, retrouva sa femme et ses enfants et se consacra ensuite à la lutte abolitionniste. Son livre connut aux Etats-Unis un succès comparable à celui de La Case de l’oncle Tom, à peu près contemporain.

Twelve years a slave, esclavage
Twelve years a slave (Douze ans d’esclavage)

Steve Mc Queen a repris cette histoire et ses principaux personnages. Le résultat est un grand film sur l’esclavage, d’autant plus réussi que fortement incarné. Il décrit le marché aux esclaves de Washington, où les Blancs viennent choisir leur marchandise, hommes, femmes et enfants exposés nus dans un appartement ; le transport vers le Sud, à l’intérieur d’un bateau à aubes dont le moteur produit un bruit infernal. Le travail dans les plantations de canne à sucre et de coton, sous un soleil de plomb, avec pesage quotidien de la récolte de chaque esclave et coups de fouets en cas d’insuffisance. Une société où les maîtres vivent dans la peur, quand ce n’est pas dans la folie, et exercent un pouvoir de vie, de viol et de mort sur ceux qui leur appartiennent, parfois avec un plaisir sadique et parfois même au nom de Dieu ; où les esclaves apprennent vite que parler, s’entre-aider, fuir, c’est mourir. Solomon, rebaptisé Platt, refoule sa révolte et son désespoir jusqu’à la rencontre avec l’homme du Nord qui va enfin le sauver. Les beaux portraits de Solomon, humain et grondant de colère, ou de la petite Patsey que le féroce maître Epps adore et torture au sang, incarnent mieux que des discours la vérité insoutenable de ce qu’a été l’esclavage. Vérité relevée par le contraste avec un décor de rêve : les bayous de Louisiane avec leurs immenses cyprès qui filtrent le soleil, autour des vérandas à colonnettes des somptueuses maisons des planteurs.

Bref, un beau film en plus d’une très efficace reconstitution de l’histoire de l’esclavage.

Voir la bande-annonce du film

15/01/2014

L'UFAL a tort de s'inquiéter

L'Union des Familles Laïques a tort de s'inquiéter. François Hollande ne tiendra pas plus les promesses qu'il a faites au MEDEF que celles qu'il a faites avant 2012. C'est du moins ce qu'il faut espérer.

Conférence de presse 2014, MedefLes facultés du visiteur de la rue du Cirque, ont-elles
été amoindries par le bruit d'une "rumeur" sociale-libérale courant à son encontre ?

Le Président de la République François Hollande vient d’annoncer le contenu du pacte de responsabilité qu’il entend mettre en œuvre dans le cadre de sa politique de l’emploi. Il prévoit de supprimer à l’horizon 2017 la cotisation patronale d’allocations familiales, soit l’équivalent de 35 milliards d’euros qui financent actuellement la branche famille de la Sécurité sociale.

De la sorte, François Hollande fait renaître le projet de l’ancien Président Sarkozy qui avait créé la TVA sociale afin de compenser intégralement la baisse des cotisations familiales à travers une ponction injuste sur le revenu de consommation des familles. Le gouvernement Ayrault avait pourtant décidé d’abroger in extremis cette mesure inique lors de son arrivée au pouvoir. Or c’est la même politique anti-sociale dictée par la même idéologie néo-libérale que le gouvernement PS-EELV-PRG décide d’appliquer.

Pour l’UFAL cette décision sans précédent comporte des risques économiques et politiques considérables. Cet allègement de 35 milliards d’euros devra être compensé par un nouveau mouvement d’économies drastiques sur les dépenses sociales qui affecteront les familles déjà fortement fragilisées par la crise. De plus, une nouvelle augmentation des impôts et taxes sur la consommation ou sur les revenus du travail sera inévitable et aggravera durablement la crise actuelle dont les conséquences dramatiques se font sentir chaque jour. Mais surtout, en décidant d’appliquer une politique identique à celle de son prédécesseur de droite, François Hollande contribue à renforcer chez les classes populaires le malaise politique actuel et le sentiment de rejet de la classe politique qui se traduit par l’abstentionnisme et le vote anti-républicain d’extrême droite.

L’UFAL rappelle que la cotisation sociale (salariale ou patronale) est une part socialisée du salaire des travailleurs, prélevée directement sur la richesse créée par le travail. Ainsi, la cotisation patronale d’allocations familiales reconnaît et rémunère l’apport indispensable des familles à l’éducation des enfants et au renouvellement de la main-d’œuvre productive. À l’inverse, la suppression de la cotisation sociale familiale ne fera que renforcer l’emprise de la finance sur l’économie réelle et nourrit la ponction privée sur l’économie réelle. C’est pourquoi l’UFAL s’engage fermement aux côtés des salariés pour que cette part de leur salaire reste prélevée sur la richesse créée dans l’entreprise.

14/01/2014

Du symbole et du chiffre

Conférence de presse du jour .... Dispositions pour la culture .... RIEN !

Du symbole et du chiffre, par Nicolas Roméas

On a pu, ces derniers temps, lire et entendre un certain nombre de déclarations et autres articles de presse 1 dans lesquels des personnes sans doute bien intentionnées s'attachent à défendre ce qu'elles nomment la «culture», en mettant en avant son apport à l'économie nationale.

Du symbole et du chiffre
Via photomontage © Olivier Perrot

Outre le fait qu'une bonne part des éléments ainsi réunis et «valorisés» relève plus de l'industrie culturelle et d'un patrimoine souvent rentabilisé que de l'usage citoyen et vivant d'outils symboliques destinés à l'échange, cette utilisation du langage de l'adversaire pour prétendre défendre ce qui doit échapper à l'évaluation chiffrée est, selon moi, une faute majeure.

Ce n'est pas seulement une erreur fondamentale, c'est purement et simplement une abdication. Un renoncement au combat culturel qui consiste à défendre les valeurs symboliques portées par l'art et ce qu'on nomme «culture», face au règne de l'argent et la toute-puissance du chiffre à tous les niveaux de cette société. On comprend bien, sous la menace des poids lourds de la finance et leurs alliés, acharnés à détruire tout ce qui échappe à la loi du profit, ce qui motive ces argumentations.

Mais il faut rappeler une autre loi, universelle et intemporelle celle-là : lorsqu'on accepte les critères de l'adversaire, le combat est perdu d'avance.

Mesurer - pour en «justifier» la nécessité - la force du symbole avec les outils de l'évaluation quantitative et/ou financière, c'est admettre implicitement que l'on ne peut appréhender qu'avec des chiffres ce qui, pourtant, appartient à un univers non seulement très distinct, mais opposé. Repensons aux déclarations de Victor Hugo sur l'importance de la lecture et de l'éducation pour la santé morale d'un peuple. S'agissait-il de confondre le poids de l'économie avec la valeur des idées et de l'art ?

Le député Hugo sait de quoi il parle, il sait très bien que tout ce qu'il évoque n'est pas producteur de richesse matérielle, mais de valeur intellectuelle et morale. Il sait parfaitement que le coût de ces choses est sans rapport, sans commune mesure avec leur bénéfice humain. Le 10 novembre 1848, il déclare entre autres, devant l'Assemblée nationale : «Il faudrait multiplier les écoles, les chaires, les bibliothèques, les musées, les théâtres, les librairies ; […] les maisons d'études, pour les enfants, les maisons de lecture […] ; tous les établissements, tous les asiles où l'on médite, où l’on s'instruit, où l’on se recueille, où l'on apprend quelque chose, où l'on devient meilleur, en un mot ; il faudrait faire pénétrer de toutes parts la lumière dans l'esprit du peuple, car c'est par les ténèbres qu'on le perd.»

Vous me direz : «c'était un autre temps !» Mais n'étions-nous pas censés avoir fait quelques progrès, depuis ce temps  ? Et dès la fin de la deuxième guerre mondiale, le grand mouvement de l'Éducation populaire nous a rappelé avec force qu'il s'agit là d'un moteur essentiel de la démocratie, d'un enjeu vraiment citoyen dans lequel non seulement il n'est pas question de rentabilité, mais que la rentabilité détruit à coup sûr.

La France, qui s'enorgueillit à juste titre d'avoir créé en 1959 le premier Ministère des affaires culturelles (avant qu'on y accole le honteux «communication») 2 est-elle encore capable de porter cette vision ?

Sans doute ne peut-on développer la vie culturelle et artistique d'un pays sans argent, mais ce qui importe ce sont les choix politiques, ce qui compte, c'est ce qu'on en fait ! Et ce que nous avons inventé de meilleur en la matière, et que nous devons défendre âprement : notre service public de l'art et de la culture, est aujourd'hui fragilisé par une Europe néolibérale qui impose le critère plus qu'absurde de «concurrence libre et non faussée». C'est contre cela qu'il faut lutter, c'est à ça qu'il faut s'opposer. Sinon, rien ne tiendra. Et nous pourrons toujours prouver la puissance économique des «activités culturelles», si nous ne savons plus nommer leur valeur symbolique, il ne sera plus question de contenu. Et il ne nous restera finalement plus qu'à défendre les pires industries «culturelles» : les plus rentables.

Théodore Adorno parlait ainsi de ce qu'il nommait l'industrie culturelle : «Dans toutes ses branches on confectionne plus ou moins selon un plan des produits qui seront étudiés pour la consommation des masses et qui déterminent par eux-mêmes dans une large mesure cette consommation.» Industrie dont il montre, dans la même conférence 3, qu'elle est issue d'un système fondé sur le profit : «Il ne faut pas en accuser ici une volonté consciente de ses promoteurs ; bien plutôt, il faudrait faire dériver le phénomène de l’économie, de la recherche de nouvelles possibilités de faire fructifier le capital dans les pays hautement industrialisés.»

Mêler indistinctement la valeur symbolique et le poids économique n'est pas seulement insensé, c'est profondément destructeur.

Faire dépendre l'importance de la «culture» de l'argent qu'elle génère ou qu'elle fait circuler, c'est lui faire perdre son sens propre. Cette confusion délétère anéantit ce qui résiste à l'évaluation chiffrée. Même si ce qu'on nomme «culture» ne rapportait pas un centime, ou au contraire beaucoup d'argent, ce n'est jamais à partir de ce critère qu'il faut juger de son utilité.

Nous parlons de l'univers du symbole. Ici, en les mesurant à l'aune de la quantité, on détruit la valeur des actes et des œuvres. Car ces mondes incompatibles se livrent une guerre sans merci, personne ne l'ignore plus. Tout peser avec la balance du chiffre revient à tuer le symbole. Et si la quantité l'emporte, l'esprit meurt, c'est-à-dire nous, humains pensant. Remettons les pendules à l'heure, il y a urgence !

Nicolas Roméas

www.horschamp.org

1- Le 3 janvier 2014 dans Le Monde : «57,8 milliards de richesse liée à la culture», le même jour dans La Tribune : «La culture contribue sept fois plus au PIB que l'industrie automobile».

2 - Comme le fait très bien remarquer la philosophe Marie-José Mondzain.

3 - Conférence pour l'université radiophonique internationale
1ère diffusion les 21 et 28 septembre 1963.

11/01/2014

Avortement : une catastrophe en Espagne

Depuis des années, nous souhaitons une vraie loi-cadre contre les violences faites aux femmes, en nous inspirant du modèle espagnol. En 2010, le gouvernement Zapatero avait vaincu les conservatismes en donnant aux femmes espagnoles le droit à l’avortement. Il avançait ainsi dans le sens de la Déclaration et du Programme d’action internationale de Pékin, qui réclamait en 1995 « la reconnaissance et la réaffirmation expresses du droit de toutes les femmes à la maîtrise de tous les aspects de leur santé, en particulier leur fécondité ».

avortement espagne

Aujourd’hui, cette Espagne mitoyenne, si proche de nous, qui vient pratiquement de supprimer le droit des femmes à l’interruption volontaire de grossesse, est brutalement renvoyée en arrière. Sur fond de crise économique et sociale, les idées traditionalistes et familiaristes l’ont emporté.

Cette véritable catastrophe, qui renvoie les femmes à un statut d’inférieures, menace de se répandre en Europe. Les extrêmes droites entendent constituer un lobby européen anti-avortement et mener une propagande active, de l’Espagne à la Pologne, à l’Irlande et aux autres pays de l’Union.

La Ligue des droits de l’Homme exprime sa solidarité aux femmes et aux hommes qui, en Espagne, combattent aujourd’hui la perte d’une liberté fondamentale. En France, elle attend des partis et des candidats aux prochaines élections européennes la dénonciation claire de ce recul et un engagement en faveur du progrès de l’égalité des femmes et des hommes, qui passe nécessairement par la reconnaissance des droits spécifiques des femmes.

Paris, le 10 janvier 2014 - Communiqué LDH

10/01/2014

Maurice Audin a-t-il été assassiné sur ordre ?

Durant la guerre d’Algérie, Maurice Audin, jeune mathématicien et militant communiste âgé de 25 ans, arrêté à son domicile, à Alger, le 11 juin 1957, par des militaires français, a disparu peu après alors qu’il se trouvait entre leurs mains. Depuis lors, son épouse, Josette Audin, le Comité Maurice Audin, présidé par Pierre Vidal-Naquet, et la Ligue des droits de l’Homme n’ont eu de cesse de demander aux autorités françaises qu’elles disent la vérité sur sa disparition.

Maurice Audin
Maurice Audin, esquisse d'Ernest PIGNON-ERNEST. Mars 2002

 

En mars 2012, suite à la publication par le Nouvel Observateur d’informations selon lesquelles ce serait le sous-lieutenant Gérard Garcet, chef d’état-major du général Massu, commandant la division parachutiste exerçant les fonctions de police à Alger, qui aurait mis fin à ses jours, la LDH a renouvelé publiquement sa demande.

Promises par le président de la République à Josette Audin dans la lettre qu’il lui avait adressée en décembre 2012, les archives qui lui ont été communiquées en février 2013 par le ministre de la Défense n’apportent aucun élément, aux dires des historiens qui les ont examinées, sur la disparition de son mari.

En revanche, le livre La Vérité sur la mort de Maurice Audin, où le journaliste et documentariste Jean-Charles Deniau publie les résultats de son enquête, avance des éléments nouveaux qui rendent indispensable que les autorités françaises disent enfin la vérité sur ces faits. D’après lui, l’ordre de tuer Maurice Audin a été donné au commandant Aussaresses par le général Massu, avec l’assentiment probable du ministre résident en Algérie, le socialiste SFIO Robert Lacoste, alors que le président du Conseil était depuis peu le membre du Parti radical, Maurice Bourgès-Maunoury. L’enquête confirme, par ailleurs, quant à l’exécuteur du crime, les informations publiées en mars 2012 par le Nouvel Observateur. L’objectif de cet assassinat étant de faire un exemple destiné à avertir et dissuader les communistes de soutenir la lutte d’indépendance algérienne.

L’assassinat de Maurice Audin, qui a frappé d’autant plus l’opinion publique qu’il s’agissait d’un jeune universitaire français, n’est qu’un exemple des tortures et exécutions sommaires infiniment plus nombreuses qui ont frappé des Algériens. Après d’autres travaux, ce livre montre comment, durant cette guerre, des autorités civiles et militaires françaises ont poussé des soldats à commettre en Algérie des actes qui ont été définis par des textes internationaux au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale comme des violations graves des droits de l’homme. Comme en ont témoigné le général Pâris de Bollardière ou le secrétaire général de la police d’Alger, Paul Teitgen, qui a démissionné en 1957 parce qu’il refusait d’en être complice, l’illégalité et l’irresponsabilité ne pouvaient conduire qu’à des crimes de guerre.

Pour la Ligue des droits de l’Homme, il est plus que temps, un demi-siècle après ces faits, que les plus hautes autorités de la République française, comme les différentes institutions de la société, le reconnaissent.

Communiqué LDH - Paris, le 9 janvier 2014

07/01/2014

Victor Basch

Fondateur de la section de Rennes de la Ligue des droits de l’Homme pendant l’affaire Dreyfus (André Hélard, spécialiste de l’affaire Dreyfus, évoque son rôle éminent dans unevidéo mise en ligne ici), président de la Ligue des droits de l’Homme de 1926 jusqu’à son assassinat par la milice en 1944, Victor Basch est une des grandes figures non seulement de la Ligue des droits de l’Homme, mais simplement de l’Histoire de France. En dehors de son attachement indéfectible à la Ligue, Victor Basch a joué un rôle majeur pendant le Front populaire et dans la Résistance, notamment en tant que membre du comité directeur du Front national pour la zone sud (à ne pas confondre avec le groupe d’extrême droite qui en a volé le nom).

Consultée par la mission de réflexion sur le Panthéon, chargée de proposer des noms de personnes méritant de reposer dans la nécropole nationale, la Ligue des droits de l’Homme a proposé les noms de Victor Basch et de son épouse Ilona, assassinés par la milice le 10 janvier 1944. Le 10 janvier 2014 sera l’occasion pour la section de Rennes de la LDH d’honorer son fondateur, en collaboration avec le lycée Victor Basch et  du conseil régional de Bretagne. Plusieurs historiens et personnalités politiques interviendront pendant cette journée dont nous vous détaillerons le programme prochainement. Les sections LDH de Montrouge (92) et Villeurbanne (69) s’associeront à cet hommage, et cosignent avec la section de Rennes un appel en faveur de la proposition de la Ligue des droits de l’Homme de faire entrer au Panthéon le couple Victor et Ilona Basch. Voici, ci-dessous, l’appel commun qu’elles lancent.

Victor Basch, 70 ans après son assassinat

victor bash

Ancien président de la Ligue des droits de l’Homme, Victor Basch est assassiné avec son épouse Ilona, le 10 janvier 1944 près de Lyon par la milice française et la Gestapo. Des commémorations sont d’ores et déjà programmées à Rennes (35), à Villeurbanne (69) et à Montrouge (92) en l’honneur de cet homme d’action, fervent dreyfusard, militant acharné de la défense du droit et de la justice.

La Ligue des droits de l’Homme et du citoyen, tout en appuyant récemment l’entrée simultanée de plusieurs femmes au Panthéon, estimait également « que le rôle de Victor Basch mérite lui aussi d’être honoré par la République et que celui-ci pourrait, avec sa femme Ilona, être inhumé dans le haut lieu de la République que constitue le Panthéon ».

C’est à Rennes, à l’occasion de l’affaire Dreyfus, que débute l’engagement politique de Victor Basch. Ce combat l’amène à faire partie dès juin 1898 des premiers adhérents de la Ligue française pour la défense des droits de l’homme et du citoyen dont il assurera la présidence de 1926 jusqu’à sa mort, et à jouer un rôle essentiel dans la fondation de la section de Rennes, une des premières à voir le jour. En sa mémoire, la section de la Ligue des droits de l’Homme de Rennes organisera le vendredi 10 janvier 2014 une journée d’hommage sur le thème « Militer hier et aujourd’hui » avec la participation d’historiens et de responsables associatifs et politiques.

L’engagement militant de Victor Basch l’amène à être également un acteur important du Front populaire. C’est ainsi qu’il préside à Montrouge, le 14 juillet 1935, au vélodrome Buffalo, les « Assises de la paix et de la liberté », évènement fondateur du Front populaire et de ses avancées sociales. La section de la Ligue des droits de l’Homme de Montrouge dévoilera une plaque rappelant cet événement, le mercredi 16 avril 2014, rue Victor Basch à Montrouge.

Réfugié pendant la guerre, avec son épouse Ilona, à Caluire-et-Cuire (69), Victor Basch devient membre du comité directeur du mouvement de résistance Front national pour la zone sud. Arrêtés tous les deux le 10 janvier 1944 par la milice française et la Gestapo, ils sont assassinés à Neyron (01) et sont inhumés à la Nécropole nationale de la Doua, à Villeurbanne (69). La Fédération de la Ligue des droits de l’Homme du Rhône invitera à se recueillir sur leur tombe le vendredi 10 janvier 2014 et proposera une projection-débat autour du film documentaire « Victor Basch, dreyfusard de combat ».

Le 10 janvier 2014, cela fera 70 ans que Victor Basch fut tué, avec son épouse Ilona, pour ses engagements et du fait de ses origines. Les assassins déposèrent sur leurs corps l’inscription « Terreur contre terreur : le juif paye toujours ». Alors qu’en France les propos racistes se multiplient, les diverses commémorations qui se dérouleront autour de l’action militante et de l’assassinat de Victor Basch appuieront la volonté de la Ligue des droits de l’Homme de dénoncer sans relâche et sans complaisance les incitations actuelles à la haine et de refuser que la brutalité verbale toujours annonciatrice de passages à l’acte dramatiques envahisse l’espace démocratique.

06/01/2014

Qu'opposer aux "spectacles" antisémites ...

Contre l’antisémitisme, les principes républicains doivent triompher

Communiqué LDH
Quand une démocratie est attaquée dans ses fondements, elle se montre forte quand elle applique ses principes. Elle est faible si, face aux extrémismes, elle les abdique.

antisémitisme,dieudonnéDieudonné a réussi ce tour de force : le Front national défend la liberté d’expression, alors que le ministre de l’Intérieur a déclaré vouloir interdire a priori son spectacle et lui sera en tournée dans de très nombreuses salles, notamment les Zéniths qui sont sous contrat avec l’État.

Or, en France, depuis le début du XXe siècle, la loi, et c’est heureux, ne permet plus l’interdiction a priori des spectacles. Dieudonné et ses zélateurs s’indignent donc de ce que l’État s’apprête à violer une liberté fondamentale, la liberté d’expression.

Tour de force, donc, que de se faire passer pour une victime quand on est celui qui a fait son fonds de commerce de l’agression systématique d’un groupe de personnes à raison de leur origine ethnique, de leur religion, et des horreurs qu’elles ont subies.

Dieudonné a pourtant tort de se revendiquer de la liberté de création pour justifier, dans ses spectacles, ses insultes antisémites, son apologie du révisionnisme, ce pour quoi la LDH s’honore de l’avoir fait condamner. Reste qu’il a toujours transformé ses procès en tribunes, organisant son insolvabilité de façon à échapper aux condamnations financières, qu’elles soient des amendes pour l’État ou des dommages et intérêts pour les associations qui, comme la LDH, l’ont poursuivi avec un succès qui reste théorique.

Le ministre de l’Intérieur, en cherchant à obtenir des préfets qu’ils interdisent ses spectacles, prend un risque d’une autre dimension, celui de fédérer autour de Dieudonné une sympathie réactionnelle de ceux qui se considèrent, pour des raisons qui peuvent par ailleurs parfaitement se comprendre, opprimés, socialement ou politiquement. Et auprès de ce public, le jeu ambigu, voire pervers, entre humour et haine, agression et victimisation, politique et show-business, peut marquer les esprits dans un sens particulièrement dangereux.

Dieudonné, dont les sympathies avec les thèses les plus extrêmes de la droite antisémite ne sont plus un mystère pour personne, met donc en défaut la démocratie, lorsqu’elle répond à la haine par une menace de restriction de la liberté d’expression.

La LDH rappelle donc que la règle qui doit prévaloir est la liberté, et que tout abus de celle-ci doit être condamné de façon ferme et efficace. La LDH et ses militants seront très vigilants et attentifs à ce que les propos de Dieudonné qui méritent une sanction pénale soient poursuivis, comme elle l’a fait par le passé, et elle engage vivement les pouvoirs publics à poursuivre les atteintes à la loi une fois qu’elles sont commises, plutôt qu’à se lancer dans des interdictions préalables au fondement juridique précaire et au résultat politique incertain, voire contreproductif.

Il est scandaleux que les associations parties civiles dans les procès qui ont été fait contre cet individu n’aient aucun moyen de le forcer à exécuter les condamnations, que les magistrats n’aient pas à ce sujet de plus amples pouvoir d’investigation, et prononcent donc des peines dont ils savent par avance qu’elle ne seront pas exécutées.

Puisque Dieudonné a fait son fonds de commerce de la haine, il faut qu’il soit condamné à chaque fois qu’il l’exprime, et que les peines prononcées soient effectives et décourageantes.

Paris, le 6 janvier 2014

05/01/2014

Dieudonné, l’imposteur raciste, n’est pas l’ami du peuple palestinien

Pour l'Association France Palestine Solidarité "Dieudonné, l’imposteur raciste, n’est pas l’ami du peuple palestinien". Exact et argumenté. Simplement, clairement. Et c’est bien parce que le personnage est en France médiatiquement surexposé que l’AFPS se devait de prendre position

Rappels :

palestine, Dieudonné

Dernièrement Dieudonné a déclaré au sujet de Patrick Cohen, journaliste à France Inter : « Moi, tu vois, quand je l’entends parler, Patrick Cohen, j’me dis, tu vois, les chambres à gaz… Dommage. » Il ne s’agit ni d’une « erreur » ni d’un dérapage. Mais de positions antisémites clairement et délibérément assumées depuis une bonne dizaine d’années. Les exemples en sont innombrables.

Dieudonné n’est pas un simple humoriste, c’est avant tout un militant politique d’extrême-droite. Et il y a une spécificité. Avec une forme d’expression particulière (humour), un vocabulaire pseudo-​​révolutionnaire (anti­système), et une cible du style fasciste des années 30 (le complot du "pouvoir juif mondial", de la finance mondiale, de l’axe Israël-​​USA …), Dieudonné attire certaines catégories, particulièrement dans la jeunesse, que le Front national serait incapable de mobiliser.

C’est le cas par exemple quand il fait applaudir le négationniste Robert Faurisson par 5.000 personnes au Zénith en 2008. C’est le cas aussi quand il inter­viewe Serge Ayoub, alias Batskin, le chef de l’organisation d’extrême-droite JNR, Jeunesses nationalistes révolutionnaires, dissoute après la mort de Clément Méric. La vidéo se conclut par une poignée de main entre ces deux hommes et une déclaration « On représente la France d’en bas … on a le même ennemi, c’est une évidence ».

C’est le cas aussi quand il prétend défendre les Palestiniens en développant des thèses racistes et antisémites sous le couvert de l’anti-sionisme. Il détourne ainsi au profit de l’extrême-droite le juste sentiment d’exaspération face à l’amalgame fait par les soutiens de la politique israélienne entre anti­sionisme et anti­sémitisme. Il donne prise à tous ceux qui se complaisent dans une dénonciation sélective des diverses formes de racisme. Il fait le jeu d’Israël et de tous ses soutiens qui cherchent à discréditer voire criminaliser toute forme de contestation de la politique israélienne..

L’AFPS condamne et rejette ces amalgames qui amènent à traîner devant les tribunaux en toute ignominie les militants du boycott citoyen qui dénoncent la politique coloniale et raciste de l’État d’Israël.

L’AFPS condamne et rejette toute instrumentalisation de la cause palestinienne au service de délires complotistes racistes qui font le jeu de ses adversaires.

Le peuple palestinien n’a aucun besoin de tels faux amis. Notre combat pour les droits nationaux du peuple palestinien se fonde sur les principes universels du droit des peuples. Il suppose le rejet déterminé de toute forme de racisme, d’antisémitisme et d’islamophobie, poisons dangereux que nous combattrons sans faiblesse.

Vendredi 3 janvier 2014
Le Bureau national de l'AFPS

03/01/2014

Vœux d’épopée d’Ariane Mnouchkine

"(...) fuir la peste de cette tristesse gluante, que par tombereaux entiers, tous les jours, on déverse sur nous, cette vase venimeuse, faite de haine de soi, de haine de l’autre, de méfiance de tout le monde, de ressentiments passifs et contagieux, d’amertumes stériles, de hargnes persécutoires.(...)"

 

Via Mediapart

« Mes chères concitoyennes, mes chers concitoyens,
À l’aube de cette année 2014, je vous souhaite beaucoup de bonheur.

Une fois dit ça… qu’ai-je dit? Que souhaité-je vraiment ?
Je m’explique :

Je nous souhaite d’abord une fuite périlleuse et ensuite un immense chantier.

Voeux Mnouchkine 2014

D’abord fuir la peste de cette tristesse gluante, que par tombereaux entiers, tous les jours, on déverse sur nous, cette vase venimeuse, faite de haine de soi, de haine de l’autre, de méfiance de tout le monde, de ressentiments passifs et contagieux, d’amertumes stériles, de hargnes persécutoires.

Fuir l’incrédulité ricanante, enflée de sa propre importance, fuir les triomphants prophètes de l’échec inévitable, fuir les pleureurs et vestales d’un passé avorté à jamais et barrant tout futur.

Une fois réussie cette difficile évasion, je nous souhaite un chantier, un chantier colossal, pharaonique, himalayesque, inouï, surhumain parce que justement totalement humain. Le chantier des chantiers.

Ce chantier sur la palissade duquel, dès les élections passées, nos élus s’empressent d’apposer l’écriteau : “Chantier Interdit Au Public“

Je crois que j’ose parler de la démocratie.

Être consultés de temps à autre ne suffit plus. Plus du tout. Déclarons-nous, tous, responsables de tout.

Entrons sur ce chantier. Pas besoin de violence. De cris, de rage. Pas besoin d’hostilité. Juste besoin de confiance. De regards. D’écoute. De constance.

L’État, en l’occurrence, c’est nous.

Ouvrons des laboratoires, ou rejoignons ceux, innombrables déjà, où, à tant de questions et de problèmes, des femmes et des hommes trouvent des réponses, imaginent et proposent des solutions qui ne demandent qu’à être expérimentées et mises en pratique, avec audace et prudence, avec confiance et exigence.

Ajoutons partout, à celles qui existent déjà, des petites zones libres.

Oui, de ces petits exemples courageux qui incitent au courage créatif.

Expérimentons, nous-mêmes, expérimentons, humblement, joyeusement et sans arrogance. Que l’échec soit notre professeur, pas notre censeur. Cent fois sur le métier remettons notre ouvrage. Scrutons nos éprouvettes minuscules ou nos alambics énormes afin de progresser concrètement dans notre recherche d’une meilleure société humaine. Car c’est du minuscule au cosmique que ce travail nous entrainera et entraine déjà ceux qui s’y confrontent. Comme les poètes qui savent qu’il faut, tantôt écrire une ode à la tomate ou à la soupe de congre, tantôt écrire Les Châtiments. Sauver une herbe médicinale en Amazonie, garantir aux femmes la liberté, l’égalité, la vie souvent.

Et surtout, surtout, disons à nos enfants qu’ils arrivent sur terre quasiment au début d’une histoire et non pas à sa fin désenchantée. Ils en sont encore aux tout premiers chapitres d’une longue et fabuleuse épopée dont ils seront, non pas les rouages muets, mais au contraire, les inévitables auteurs.

Il faut qu’ils sachent que, ô merveille, ils ont une œuvre, faite de mille œuvres, à accomplir, ensemble, avec leurs enfants et les enfants de leurs enfants.

Disons-le, haut et fort, car, beaucoup d’entre eux ont entendu le contraire, et je crois, moi, que cela les désespère.

Quel plus riche héritage pouvons-nous léguer à nos enfants que la joie de savoir que la genèse n’est pas encore terminée et qu’elle leur appartient.

Qu’attendons-nous ? L’année 2014 ? La voici.

PS : Les deux poètes cités sont évidemment Pablo Neruda et Victor Hugo »