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25/04/2015

Surveillance généralisée

De l'utilisation très extensible des boites noires dont il est question dans la loi "Renseignement" et des initiatives dont on peut s'inspirer  pour s'y opposer...

loi renseignement

 

Pourquoi la loi renseignement est de la surveillance généralisée ?

 

Proposé par la section LDH de Manosque, un modèle de lettre à adresser en urgence -c'est très à la mode-, au parlementaire de votre choix (vous pouvez aussi l'appeler) :

Objet : LOI RENSEIGNEMENT
Madame ou Monsieur la(e) Sénatrice(teur),
ou
Madame ou Monsieur la(e) Député(e),

Nous avons le devoir de vous informer d’une inquiétude très largement partagée concernant la loi «Renseignement» qui viendra en discussion au Sénat, après le vote par l’Assemblée Nationale le 5 mai prochain.
En effet, il ne vous aura pas échappé que :

  • l’actuel projet de loi contient des articles qui, s’ils étaient adoptés en l’état, permettraient une surveillance massive de l'ensemble de la population, incompatible avec notre démocratie laquelle, au travers de la loi fondamentale qu’est la Constitution, consacre les libertés d'expression, de réunion, de pensée et d'action.
  • de plus, la commission de contrôle chargée de «surveiller les surveillants» n'a qu'un avis consultatif, le recours effectif des citoyens devant les tribunaux étant inexistant et aucune sanction n'est prévue à l’encontre des agents de l’État qui abuseraient de leur pouvoir.

    Au contraire, des contre-pouvoirs forts devraient être mis en place pour protéger nos libertés !

Du juge antiterroriste  Marc TREVIDIC, au vice-président socialiste de la Commission de la défense à l'Assemblée Nationale Nicolas BAYS qui annonçait : «Après avoir suivi les débats, lu les argumentaires des uns et des autres, le 5 mai, en conscience, je voterai contre le projet de loi renseignement», en passant par Pierre LELLOUCHE, député UMP spécialiste des questions de défense et de sécurité, tous s’accordent à reconnaître qu’en l’état,  cette loi est attentatoire à nos libertés.

L’annonce faite par François HOLLANDE d’une saisine du Conseil Constitutionnel ou tout autre stratagème permettant de justifier une absence de débat, ne saurait évidemment vous dissuader de vous exprimer librement au sujet de cette loi et de vous y opposer comme nous vous le demandons.

Attentif à votre prise de position, nous vous prions de croire, Madame (Monsieur) la sénatrice (le Sénateur), en l’expression de mes respectueuses salutations.


Votre nom
& signature

20/04/2015

Le chant des migrants

En pensant à ces migrants qui n'ont pas eu le temps de se réfugier. Ils voulaient survoler les mers pour fuir la misère et n'ont trouvé que naufrageurs sans atteindre ce qu'ils croyaient être leur eldorado.
Leur chant rejoint celui des oiseaux.
En 15 ans, 23 000 migrants sont morts en voulant rejoindre l'Europe. A cette heure, un énième bateau est en train de couler sans que cela ne change quoique ce soit à inhumanité de l'Europe et à nos palabres indécents.

réfugiés,naufrage,méditerranée

Le chant des oiseaux

« Quand j'étais en exil, après la guerre civile, j'ai souvent fini mes concerts et festivals avec une vieille chanson populaire catalane qui est réellement une chanson de Noël. Elle s'appelle El Cant dels ocells, «Le Chant des Oiseaux ». Depuis lors, la mélodie est devenue la chanson des réfugiés espagnols, pleins de nostalgie »
Pablo Casals



En voyant se lever
La plus grande lumière
Dans la plus douce des nuits
Les oiseaux chantent
Ils vont le fêter
avec leur voix délicate.

L'aigle impérial
S'envole haut dans le ciel
Chante mélodieusement
En disant « Jésus est né
Pour nous libérer du péché
et nous donner la joie ».

Le moineau lui répond:
« Aujourd'hui, nuit de Noël,
est une nuit de grand bonheur ».
Le verdier et le tarin
disent en chantant aussi :
« Quelle joie je sens ».

La linotte chante :
«O h, qu'est-ce qu'il est joli
l'enfant de Marie ! »
Et la grive lui répond :
« La mort est vaincue,
Maintenant commence ma vie ».

Le rossignol poursuit :
« Il est plus joli que le soleil
plus brillant qu'une étoile ! »
Le rouge-queue et le tarier
fêtent l'enfant
et sa Mère vierge.

Le roitelet chante
Pour la gloire du Seigneur,
Gonflant avec fantaisie.
Le canari continue :
« Leur musique semble
Une grande mélodie céleste ».

Maintenant entre l'alouette
En disant : « oiseaux, venez
fêter l'aurore ! »
Et le merle, en sifflant
allait fêter
la plus grande dame

La mésange dit :
«Ce n'est ni l'hiver, ni l'été
mais c'est le printemps :
puisqu'une fleur est née
qui embaume partout
et emplit la terre entière».

Le francolin noir chantait:
« Oiseaux, qui veut venir
aujourd'hui au lever du jour
pour voir le grand Seigneur
et sa grande splendeur
dans une étable?»

La huppe vient en chantant :
« Cette nuit est venu
le Roi le plus grand
La tourterelle et la colombe
éblouissent tout le monde
en chantant sans tristesse. »

Les pics verts et les bouvreuils
volent dans les vergers
en chantant leur joie
la caille et le coucou
sont venus de très loin
pour contempler le Messie.

La perdrix chantait :
« Je m'en vais faire le nid
dans cette étable
pour voir l'Enfant
comme il tremble
dans les bras de Marie.»

La pie, la grive et le geai
disent : Maintenant arrive Mai !
Le chardonneret répond :
« Tous les arbres reverdissent
toutes les branches fleurissent
comme si nous étions au printemps ».

Le pinson sifflote :
« Gloire aujourd'hui et demain
Je sens une grande joie
de voir le diamant
si joli et brillant
dans les bras de Marie ».

Le hibou et la chouette
en voyant se lever le soleil
confus se retirent
la hulotte et le grand-duc
disent « je ne peux pas regarder;
de telles splendeurs m'éblouissent ».

"Loi sur le renseignement : un attentat aux libertés"

Pour celles et ceux qui ne sont pas abonnés à Médiapart, le billet d’Edwy Plenel du 18 avril intitulé "Loi sur le renseignement : un attentat aux libertés".

Le projet de loi relatif au renseignement, dont le vote final est prévu le 5 mai, instaure une surveillance généralisée de la population, sans contrôles efficaces ni contre-pouvoirs forts. Comme l’ensemble des défenseurs des libertés, des associations et professions concernées, des autorités administratives impliquées, des acteurs de la révolution numérique, Médiapart dit non à cette loi scélérate. Et vous donne rendez-vous en ligne lundi 4 mai pour une journée de mobilisation.

loi Renseignement

Un attentat à nos libertés fondamentales est en cours. Ses auteurs sont ceux qui nous gouvernent, tous embarqués aux côtés de l’auteur principal, le premier ministre, jusqu’à celle qui devrait protéger nos droits et nos libertés, la garde des Sceaux, dont le profond silence vaut approbation. Leurs complices sont ceux qui nous représentent, droite et gauche confondues, empressés, à quelques rares et courageuses exceptions, d’approuver ce crime officiel, au point de l’aggraver par leur zèle législatif.

Des amendements cosmétiques n’y changeront rien : cette loi instaure une société de surveillance généralisée. Profitant des potentialités techniques de la révolution numérique et des opportunités politiques de l’émotion sécuritaire, elle autorise l’État profond, cette part d’ombre du pouvoir exécutif qui, à l’abri du secret-défense, n’a pas de visage et ne rend jamais de compte, à espionner tout un chacun, n’importe qui, n’importe quand, n’importe où.

L’avènement de cette loi signifiera qu’en France, désormais, de façon légale, l’État de police l’emportera sur l’État de droit. Que le pouvoir en place pourra faire surveiller des citoyens et leurs entourages sans restrictions solides, sans contrôles indépendants, sans autorisations judiciaires. Que le soupçon remplacera la preuve. Que des opinions deviendront des délits. Que des fréquentations s’avéreront coupables. Que des curiosités se révéleront dangereuses. Que des différences ou des dissidences à l’égard des pensées dominantes ou des politiques officielles seront potentiellement criminelles.

Il suffit de lire l’avis circonstancié que vient de rendre à l’unanimité la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) pour en être convaincu (il est ici sur Médiapart). De ne pas se laisser rebuter par sa longueur ni par son juridisme pour entendre l’alarme inquiète qui l’habite derrière son langage précautionneux. Ce texte fait litière radicale de la vulgate gouvernementale selon lequel ce projet de loi, d’une part, donnerait enfin un cadre légal respectable aux activités occultes des services de renseignement et, d’autre part, instaurerait un contrôle efficace de ces mêmes activités.

D’emblée, la CNCDH souligne au contraire que la façon dont ce projet de loi a surgi en dément totalement les intentions vertueuses proclamées. Elle souligne que ce texte est passé en conseil des ministres « à peine deux mois » après les crimes terroristes de janvier et « quelques jours seulement avant la tenue d’élections cantonales dont la campagne a été marquée par une forte présence du populisme et de l’extrémisme ». Qu’il a, de plus, été élaboré quelques mois après l’entrée en vigueur d’une énième loi antiterroriste, « consécutive à l’affaire Nemmouche », elle-même faisant suite à deux autres lois antiterroristes récentes, « consécutives, elles, à l’affaire Merah ».

Tandis que chômage, précarité, insécurités sociales et injustices économiques, mal-vivre et mal-être sont relégués en fond de décor de notre vie publique, sans urgences ni priorités de nos gouvernants, plus de vingt-cinq lois relatives à la sécurité intérieure ont été adoptées ces quinze dernières années, entre 1999 et 2014. Déplorant « cette prolifération de textes législatifs relevant davantage de l’opportunité politique que du travail législatif réfléchi », la CNCDH « rappelle l’importance d’une politique pénale et de sécurité pensée, cohérente, stable et lisible, dont la qualité ne se mesure pas à son degré de réactivité aux faits divers et aux circonstances du moment ».

Traduite par la procédure accélérée imposée par le gouvernement, la « plus grande précipitation » a été voulue pour ce projet de loi, selon les mots de la CNCDH qui rappelle sa « ferme opposition » à cette procédure. Aucune urgence effective ne la justifie. C’est en fait une arme de pouvoir, un moyen de faire taire les oppositions, de prendre de court les protestations, d’entraver le fonctionnement normal du Parlement, de restreindre « considérablement le temps de réflexion et de maturation nécessaire au débat démocratique ».

Cette procédure arbitraire dévoile l’intention de ses promoteurs : jouer sur l’émotion pour imposer la régression. Le pouvoir exécutif réclame un chèque en blanc pour l’État profond, de surveillance et de police, sans expertise ni bilan, sans critique ni autocritique. Aucun débat préalable, aucune enquête parlementaire, aucune audition contradictoire pour évaluer les récents fiascos sécuritaires des services chargés de la lutte antiterroriste, alors même que les itinéraires de Merah, de Koulibali et des frères Kouachi le justifieraient amplement, révélant des failles de surveillance et des manques de vigilance.

Pis, la CNCDH relève « la pauvreté » de l’étude d’impact qui accompagne le projet de loi, son caractère succinct, ses formulations vagues, sa façon de procéder « par simple affirmation en s’exonérant de toute référence documentaire ». Car cette loi n’est pas seulement un mauvais coup, elle est aussi de mauvaise qualité, mal rédigée, imprécise ou incomplète. Voulu, ce flou cache évidemment mille loups : c’est un moyen d’échapper à l’exigence d’extrême précision pour toute disposition permettant de porter atteinte au droit au secret privé et familial, une ruse pour ne pas se plier à l’encadrement rigoureux d’un pouvoir de surveillance qui, toujours, s’accompagne du risque de l’arbitraire.

Appelant en conclusion à des « amendements du Gouvernement et du Parlement [qui] permettent de renforcer la garantie des libertés publiques et des droits fondamentaux », la CNCDH ne va pas jusqu’au terme logique de son réquisitoire : le retrait ou la suspension de cette loi attentatoire à nos droits fondamentaux, au respect de nos vies privées et familiales, à nos libertés d’opinion, d’expression et d’information, à notre droit de savoir et de communiquer.

Car c’est bien « une surveillance de masse », écrit-elle, qu’autorise ce projet, par la collecte généralisée et la conservation durable de données collectées sur nos ordinateurs, nos téléphones, nos tablettes, tous les instruments électroniques qui, désormais, sont le quotidien de nos vies. À plusieurs reprises, son avis affirme que le dispositif de la loi contient « une violation flagrante de l’article 8 » de la Convention européenne des droits de l’homme énonçant le « droit au respect de la vie privée et familiale ».

« Le risque d’un “État panoptique” est à prendre au sérieux », ajoute-t-elle, autrement dit d’un État ayant à sa libre disposition des instruments technologiques qui lui donnent accès à une transparence totalitaire sur la vie privée des individus, leurs pensées secrètes, leurs personnalités intimes. Pis, en étendant le recours aux techniques de renseignement jusqu’aux intérêts de la politique étrangère comme aux intérêts économiques et industriels, sans compter la surveillance préventive des violences collectives, le projet de loi offre un champ « potentiellement illimité » aux curiosités intrusives des services de renseignement.

Quant à la « Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement » que la loi entend instaurer, son indépendance, son impartialité, sa technicité et sa compétence sont radicalement mises en doute par la CNCDH pour qui elles « ne sont pas garanties ». Son contrôle, conclut-elle, « risque fortement de ne pas être effectif ». Ultime reproche, et non des moindres, de cette commission qui réunit l’ensemble des acteurs français de la promotion et de la défense des droits humains : en faisant basculer dans le champ de la police administrative des mesures répressives qui devraient bénéficier de garanties judiciaires, ce projet de loi « porte atteinte au principe de la séparation des pouvoirs ».
Faire payer à la liberté les frais d’une sécurité menteuse

Autrement dit, ce projet de loi est anticonstitutionnel, violant notre loi fondamentale, celle dont le président de la République est normalement le gardien. « Toute Société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution », énonce l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Comment François Hollande ou Christiane Taubira, qui ni l’un ni l’autre ne sont juristes, peuvent-ils rester inertes face à ce réquisitoire aussi rigoureux qu’implacable de la CNCDH, commission éminemment représentative de la société dans sa diversité dont l’efficace présidente, Christine Lazerges, est de ces professeurs de droit qui se font fort de « raisonner la raison d’État » ?

Si, d’une manière ou d’une autre, ils ne se mettent pas en travers de ce coup d’État à froid contre nos droits fondamentaux, leurs noms resteront définitivement associés à la pire régression de nos libertés individuelles et collectives depuis l’État d’exception de l’aveuglement colonial, ces pouvoirs spéciaux imposés à leur majorité par, déjà, des gouvernants de gauche. L’auraient-ils oublié ? Une République en est morte, gangrénée par des factieux et des tortionnaires, des hommes qui se voulaient gardiens sans contrôle d’une sécurité devenue un absolu au mépris de la liberté, promue fin en soi quels qu’en soient les moyens.

Voulu par le premier ministre Manuel Valls, qui s’en est fait symboliquement le rapporteur devant l’Assemblée, porté par le député socialiste Jean-Jacques Urvoas, qui se comporte en représentant des services bien plus qu’en élu de la Nation, ce projet de loi est bien un Patriot Act français tant ses intentions et la méthode pour les imposer sont similaires à celles des néoconservateurs américains en 2001, après le 11-Septembre. Il s’agit bien d’autoriser une surveillance étatique de la société sans limites sérieuses ou solides en jouant sur l’affolement provoqué par les attaques terroristes.

Avec ses mots feutrés, la CNCDH souligne ce chantage dont la représentation nationale et l’opinion publique sont actuellement l’objet : « Tout se passe comme si la simple invocation d’une plus grande efficacité pouvait justifier l’adoption, sans aucune discussion, des mesures les plus attentatoires aux libertés. » C’est pourquoi elle prend la peine de « réaffirmer avec force que les États ne sauraient prendre, au nom d’intérêts considérées à juste titre comme primordiaux, n’importe quelle mesure ». « La plus grande victoire des ennemis des droits de l’homme (terroristes ou autres), ajoute-t-elle, serait de mettre en péril l’État de droit par l’émergence et la consolidation d’un État prétendu de sécurité qui se légitimerait par l’adoption de mesures de plus en plus sévères et de plus en plus attentatoires aux droits et libertés fondamentaux. »

Nous y sommes, et c’est pourquoi, d’ici le 5 mai, toutes les bonnes volontés doivent converger pour faire échouer ce projet de loi. Et, s’il est néanmoins adopté, continuer sans relâche à se mobiliser pour qu’il échoue sur d’autres obstacles, le Conseil constitutionnel, la Cour européenne des droits de l’homme ou, tout simplement, la société elle-même, soulevée par ce « droit de résistance à l’oppression » que lui reconnaît, depuis 1789, l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme.

Car, outre l’abandon par la gauche de gouvernement du terrain des libertés, de leur élargissement et de leur conquête, le plus stupéfiant dans cette régression démocratique est le spectacle d’un pouvoir qui prétend défendre la société contre elle-même. Il n’y a en effet aucune voix discordante parmi tous les acteurs sociaux : des avocats aux magistrats, des journalistes aux blogueurs, des Autorités administratives indépendantes au Défenseur des droits, des associations de défense des droits de l’homme aux organisations syndicales, des acteurs du numérique aux réseaux sociaux, etc., tous ont fait part unanimement de leur refus d’une loi liberticide (lire ici).

Mais, pour les sachants qui prétendent nous gouverner, leurs cabinets et leurs communicants, cette expertise citoyenne ne compte pas, y compris quand elle s’exprime jusqu’à l’Assemblée nationale, au sein d’une commission sur le droit et les libertés à l’âge du numérique composée de parlementaires et de représentants de la société civile (lire là son avis). Pour eux, la société qui proteste a forcément tort. Elle est mal informée, mal éduquée, mal intentionnée. Il y a là une pédagogie antidémocratique au possible, où les représentants ignorent superbement ceux qu’ils sont supposés représenter, où le pouvoir exécutif s’affirme comme le tuteur autoritaire d’une société ignorante ou menaçante, dans tous les cas mise à distance et sous contrôle.

« La France a connu à plusieurs reprises, au cours de ce siècle, ces paniques provoquées par certains attentats, savamment exploitées par la réaction et qui ont toujours fait payer à la liberté les frais d’une sécurité menteuse. » Ainsi commence, en 1899, l’article du fondateur de la Ligue des droits de l’homme, Francis de Pressensé, contre les lois d’exception votées en 1893 et 1894 sous le choc des attentats anarchistes qui ensanglantaient alors la Troisième République.

Il s’intitulait « Notre loi des suspects », et s’en prenait à ceux qui, en l’ayant adoptée, abaissaient la République, son idéal et ses principes : « Un Président-parvenu qui joue au souverain, un premier ministre sournoisement brutal qui essaye d’adapter à sa lourde main la poignée du glaive de la raison d’État, un Parlement où tout est représenté, sauf la conscience et l’âme de la France. » Forgés par la haute bataille du dreyfusisme qui les occupait alors, Francis de Pressensé et ses pareils, dont Jean Jaurès, en concluaient qu’il revenait à la société, aux citoyens qui la composent, bref au peuple souverain, de relever cette conscience et cette âme, abandonnées et meurtries par la politique professionnelle.

Nous avons tous rendez-vous aujourd’hui avec la même exigence : le devoir de nous dresser contre ce crime légal, officiel, gouvernemental et, peut-être, parlementaire, puis présidentiel si la loi est adoptée puis promulguée. Un devoir qu’au temps des combats fondateurs de la République, à la fin du XIXe siècle, avait rejoint un jeune conseiller d’État qui, à la suite de Francis de Pressensé, dressait un réquisitoire contre les lois de 1893-1894 aussi informé que celui de la CNCDH contre le projet de loi qui nous occupe. Par obligation de réserve, il signait anonymement « Un Juriste ». Mais l’on sait, depuis, qu’il s’agissait de Léon Blum, le futur leader du socialisme français, l’homme du Front populaire, dont c’était le premier acte politique.

« Telle est l’histoire des lois scélérates, concluait-il avec des mots que nous n’hésitons pas à reprendre aujourd’hui : il faut bien leur donner ce nom, c’est celui qu’elles garderont dans l’histoire. Elles sont vraiment les lois scélérates de la République. J’ai voulu montrer non seulement qu’elles étaient atroces, ce que tout le monde sait, mais ce que l’on sait moins, avec quelle précipitation inouïe, ou quelle incohérence absurde, ou quelle passivité honteuse, elles avaient été votées. »

Mesdames et Messieurs les députés, d’ici le 5 mai, vous avez le choix entre la honte ou l’honneur. La honte d’être complices d’un attentat aux libertés. L’honneur d’être fidèles à la République véritable.



18/04/2015

Retrait du délit de racisme de la loi de la presse

Le Plan d'action contre le racisme ne règle en rien le traitement de "discours politiques ambigus", qui alimentent le racisme sous toutes ses formes dont celle de l’antisémitisme, notamment sur les Roms ou par exemple la question du port du voile.

On rappellera aussi que « Sortir les injures et diffamations du droit de la presse – loi du 29 juillet 1881 – pour les introduire dans le code pénal lorsqu’elles sont aggravées par une circonstance liée au racisme, à l’antisémitisme, à l’homophobie » était un projet porté par Christiane TAUBIRA.
Le 9 avril 2015, plusieurs organisations dont le SNJ, le Syndicat de la Magistrature et  la LDH avaient attiré l’attention du pouvoir en place sur les dangers que ce projet faisait courir à Liberté de la Presse. Lire ce courrier

Le Plan d’action contre le racisme du gouvernement est ambitieux mais déséquilibré.
Et surtout, la LDH condamne le retrait du délit de racisme de la loi de la presse.

Liberté de la presse

Communiqué LDH

La Ligue des droits de l’Homme prend acte de ce que le gouvernement adopte un Plan d’action contre le racisme affichant de grandes ambitions. C’est en soi une bonne nouvelle, notamment au vu de la situation inquiétante que connaît notre pays en ce domaine.

La LDH déplore que ce Plan ne comporte aucune mesure pour lutter contre le développement des inégalités, lequel porte une grande responsabilité dans l’exacerbation des frustrations, des colères et des dérives haineuses. Elle souligne que le budget annoncé de cent millions d’euros sur trois ans apparaît en deçà des ambitions annoncées, qui portent sur les champs pénal, éducatif, sportif et des réseaux sociaux. Elle salue les propositions concernant la mémoire et la création, pour éduquer contre le racisme et l’antisémitisme. Elle regrette que sur les cent millions annoncés, vingt-cinq soient annuellement dévolus à des actions locales dans le cadre des contrats de ville et des contrats locaux de sécurité, puisque ceux-ci ne concernent que les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Elle regrette également que ce Plan n’aborde pas les questions des rapports entre la police et la jeunesse, et ignore la dimension particulière de certaines politiques et déclarations publiques à l’encontre de populations stigmatisées.

Elle condamne vigoureusement l’un des points phares du plan, à savoir le fait de faire basculer le délit de racisme dans le Code pénal. Comme la plupart des associations antiracistes, comme la totalité des syndicats de journalistes, la LDH estime que cette mesure, loin de régler quelque problème que ce soit, ne fera que brouiller les termes du débat public.

Enfin, l’appel – aux accents de mobilisation décrétée – des acteurs de l’Éducation, du monde sportif et du monde associatif constitue un hommage, hélas tardif, à leur rôle et à la qualité de leur engagement. Mais la tonalité est largement répressive, au détriment du volet pédagogique, lequel en est dénaturé. C’est également le cas concernant Internet, dans le droit fil de la loi sur le renseignement. La répression est certes nécessaire, ainsi d’ailleurs que la pédagogie ; encore faut-il que l’une épaule l’autre, que la dernière ne soit pas strictement descendante et que les deux soient placées au service d’un projet de société clairement solidaire, traitant chacun sur un pied d’égalité. C’était l’esprit qui prévalait lors de la grande manifestation du 11 janvier ; on en est loin.

La LDH se saisira en tout état de cause de tout ce qui, dans ce plan national, est susceptible d’appuyer les efforts développés par ses sections, ses militantes et militants, en lien avec tous les acteurs locaux de l’Éducation nationale, les associations de quartier et les mouvements d’éducation populaire.

Paris, le 17 avril 2015

16/04/2015

Nos vies ne sont pas des confettis

Qui que soit Joséphine Witt laquelle, sous forme de confettis, a jeté, à la figure de Mario Dragui, sous-fifre affable installé à la BCE par la banque Goldman Sachs, le message suit, nous sommes propriétaires de nos vies et nous ne sommes évidemment pas des confettis.

bce,dragui et cie,joséphine de witt

Il fallait oser. Merci Joséphine. 
Reste à mettre la BCE en liquidation judiciaire et
Mario Dragui, ses employeurs & C° en examen.

« Nous sommes propriétaires de nos propres vies
et la puissance écrasante
de la police monétaire de la BCE
a parfois du mal à s’en rappeler.

Nous sommes propriétaires de nos propres vies,
pas des jetons dans le jeu de la BCE
avec lesquels on joue, qu’on vend ou qu’on dévaste.

Nous sommes propriétaires de nos propres vies !
Voilà le cri de ceux qui font face à la répression
quand nous commençons à ne plus considérer notre pauvreté comme une défaite personnelle
ou un destin immuable.

BCE, maître de l’univers,
je viens te rappeler qu’il n’y a pas de dieu,
mais qu’il y a des gens derrière ces vies,
et si tu gouvernes au lieu de servir,
tu entendras nos cris plus fort, plus lumineux, à l’intérieur et à l’extérieur de tes salles,
partout, et tu n’auras plus aucun repos.

Et tant que la BCE persistera dans son hégémonie autocratique,
dépendant de plans de surveillance et de contrôles policiers,
bref, toute cette violence quotidienne qui est enracinée ici,
alors nous trouverons nos réponses radicales
et nous agirons sans violence contre ces désastres humains.

Parce que nous n’accepterons pas le récit fou que la BCE veut imposer à toutes les personnes dans lequel même la liberté de parole et la dignité peuvent être vendues à la banque pour survivre. Persistant dans son arrogance contre le peuple, la BCE augmente dangereusement sa propre dette envers eux. Une conférence de presse n’est pas suffisante pour qu’on l’appelle "démocratie".
Je n’attends pas que cette institution illégitime entende ma voix, ni même qu’elle comprenne mon message, ce serait trop demander,
mais je sais que beaucoup de gens en comprendront très bien la raison.
Aujourd’hui, je suis juste un papillon venu vous adresser un message, mais soyez sûrs que beaucoup d’autres viendront.
Nous allons reprendre le pouvoir sur nos propres vies.
La dette de la BCE n’est pas encore payée. »

Dédié à celles et ceux qui aimeraient pouvoir enfin s'en sortir.

Le cimetière marin ne cesse de s'agrandir

« 400 morts supplémentaires en Méditerranée »

Communiqué de Marie-Christine Vergiat, membre de la Ligue des Droits de l'Homme et députée européenne (FdG)

Méditérranée Migrations.jpg

Selon les témoignages des survivants, près de 400 migrants auraient encore disparu dans le naufrage de leur embarcation dimanche en Méditerranée. Alors même que les gardes côtes auraient porté secours à près de 42 embarcations et 8 000 personnes depuis vendredi.

Si ce naufrage est confirmé, ce serait le pire que la Méditerranée ait jamais connu.

Morbide décompte que celui que nous faisons depuis le début de l'année : au moins 900 personnes seraient mortes ou disparues cette année en tentant de traverser la Méditerranée.

Morts qui viennent s'ajouter aux 30 000 au moins déjà recensés des vingt dernières années.

Le cimetière marin ne cesse de s'agrandir.

Cela n'est plus supportable, la route migratoire vers l'Europe est devenue la plus dangereuse du monde.

Il ne suffit pas de s'émouvoir à chaque naufrage, il faut agir pour stopper l'hécatombe.

Combien notamment de Syriens, d’Érythréens, de Soudanais, de Somaliens, tous des demandeurs d'asile potentiels, devront encore perdre la vie avant que les gouvernements des États membres de l'UE respectent enfin leurs obligations internationales,  au moins en matière de sauvetage en mer et d'accueil des réfugiés et se décident à changer de politiques migratoires.

Nous faisons aujourd'hui face à l'une des pires crises humanitaires qu'ait connue la planète depuis la Seconde Guerre mondiale, en raison notamment de la situation au Moyen-Orient, et nos dirigeants se lavent les mains de tous ces morts. Les décisions prises ces dernières semaines par le Conseil de l'UE et la Commission européenne vont toujours dans le même sens : plus de fermeture, plus d'externalisation et donc plus de risques pour les migrants, plus de violences sur leurs parcours. Et toujours plus de morts.

Le HCR, l'Organisation Internationale pour les Migrations, les ONG et bon nombre de parlementaires européens avaient pourtant prévenu que la fin de l'opération Mare Nostrum et son pseudo-remplacement par l'opération Triton sous l'égide de Frontex étaient dangereuses. Cela fait des mois maintenant que nous sonnons l'alarme :

SANS POSSIBILITÉ DE VOIES LÉGALES D’ACCÈS
AU TERRITOIRE EUROPÉEN,
L’HÉCATOMBE CONTINUERA.

Les États membres de l'UE sont tous signataires de la Convention de Genève de 1951. Ils se sont donc engagés à accueillir tous ceux qui fuient la violence et les persécutions. Il est temps de mettre en place des politiques migratoires répondant aux défis du XXIe siècle. Cela passe par l'abrogation de la directive retour, la réforme du Règlement de Dublin, des politiques en matière de visas ambitieuses, l'ouverture de voies d'immigration en partenariat avec les pays concernés et l'abandon des "processus de Rabat" et surtout de "Khartoum". Assez de cette Europe forteresse qui tue un peu plus chaque jour à ses frontières.

C'est d'humanité, de dignité, de respect du droit international et des droits fondamentaux dont ces femmes, ces hommes et ces enfants ont besoin.

09/04/2015

Destination Israël

Des avocats en « formation continue », d’autres pas !

Au recto :
Salah Hamouri, franco-palestinien, a cruellement effectué 7 ans de prison dans les geôles israéliennes sans que le moindre acte concret répréhensible puisse lui être reproché. Il avait 20 ans quand il a été arrêté.
Ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, pouvait écrire à son sujet, le 31 mars 2011, « Je déplore que les autorités israéliennes n’aient pas pris de décision de remise de peine, d’autant que les aveux faits à l’audience n’ont été corroborés par aucun élément de preuve. »
Salah est sorti de prison le 18 décembre 2011. Il a alors entrepris de suivre à Ramallah des cours de Droit pour devenir avocat. Il doit passer son examen final en juillet prochain au terme de ses études.
Il habite Jérusalem et se trouve privé de nationalité – palestinienne ou israélienne –, en raison de l’annexion de la partie Est de la ville par Israël, ceci contre le droit international.

Salah Hamouri, voyage,avocat,israel-palestine

Le 27 mars 2015, il a été convoqué par les forces armées israéliennes qui, par ordre militaire, lui ont interdit de circuler pendant 6 mois dans les Territoires palestiniens occupés, au motif invraisemblable de «raisons de sécurité pour l’État et les citoyens d’Israël». Ceci sans le moindre fait à lui reprocher. Rien. Un simple ordre militaire unilatéral et cynique : « Tu es une menace pour Israël et donc tu dois rester en Israël » !
C’est une attaque insupportable et une violation flagrante de la liberté de circulation et d’étudier telles qu’en dispose la Déclaration universelle des droits de l’Homme.

Extrait de la pétition lancée par Jean-Claude LEFORT et qu’il faut impérativement signer.

Au verso :
Euro Palestine signale un intéressant « voyage d’étude » à destination d’Israël pour avocats confirmés et inscrits au barreau de Paris. Au menu de ce séjour très « pédagogique » :

"Visite du Musée de Yad Vashem", visites de souks, "recueillement au Mur des Lamentations", "office de Shabbat, "dîner de shabbat", "déjeuner dans la vieille ville" (annexée comme on sait) , "spectacles son et lumière à la tour de David", "montée sur l’esplanade des mosquées très tôt le matin" ...

Extrait de l’annonce parue  sur le site de l'agence "Bon Voyage" , qui du coup (?) est en train d'actualiser ses « forfaits » Vol + Hôtel !!!


Au verso encore :
Le Barreau de Virginie, qui regroupe les 29.000 avocats exerçant dans cet État proche de la capitale Washington, vient d’annuler un voyage d’études qui devait avoir lieu à Jérusalem, en raison des discriminations israéliennes à l’encontre des citoyens américains ayant des origines palestiniennes et/ou musulmanes.
Raison invoquée : la mise en avant du « (…)«fait que la police des frontières israélienne a des pratiques discriminatoires inacceptables à l’encontre de certains voyageurs» ! ! ! source

ENCORE UN CAS « D'UN POIDS - DEUX MESURES » !

Moralité :
S'IL Y A LIEU DE SOUTENIR LES CAMPAGNES BDS  - DANS LA MESURE OU ELLES NE SONT ENTACHÉES D’AUCUNE CONNOTATION ANTISÉMITE OU ISLAMOPHOBE -, DANS CE CAS, POURQUOI NE PAS BOYCOTTER LES AGENCES DE VOYAGE INCITANT LES AVOCATS A DES SÉJOURS AUSSI  «FORMATEURS»  QUE CELUI PROPOSE AU BARREAU DE PARIS ?

02/04/2015

Patriot-Act à la française

Oh surprise, au communiqué commun qui suit faisant le point sur une énième loi portant atteinte aux libertés, un éditorial à charge du « New York Times » vient au secours des citoyens et n’hésite pas à s'adresser aux élus !
Ce que la Quadrature du Net et la Ligue des Droits de l'Homme pour ne citer que ces deux associations avaient entrepris quelques heures plus tôt sous une autre forme.

Qui aurait pu prédire un tel soutien et, pour le gouvernement Valls un tel désaveu ??!!!

« Il est compréhensible que les Français soient nerveux après les attaques de Paris et de Tunis et qu'ils s'alarment de la radicalisation de certains qui, en France, sont devenus la proie du recrutement djihadiste sur internet », écrit la direction du quotidien américain. »

Elle poursuit :

« Les législateurs français ne devraient pas approuver la loi à moins qu'il ne soit donné aux juges un rôle approprié, que les définitions vagues de ce qui constitue une menace terroriste soient retirées du projet de loi et que la liberté de la presse soit protégée. »

Plus loin encore :

« Par cette loi, des pouvoirs extraordinaires  sont placés dans les mains du premier ministre plutôt que dans celles de la justice, le contrôle du processus d'approbation des demandes de surveillance des agences de renseignement ».

Le  « New York Times » sait bien entendu de quoi il parle, puisque les États Unis n'en finissent pas d'expérimenter l’inefficacité et la nocivité du Patriot-Act mis en place par l'administration Busch après les attentats du 11 septembre à New York.
Ici, l'important reste d'être entendu et mobilisé avant qu'il ne soit trop tard...
[Sur le sujet, on peut suivre
ici les échanges qui ont eut lieu le 26 mars au siège de la Quadrature du Net.]

loi Renseignement

Inquiétude des organisations des droits de l’Homme donc face à un projet de loi visant à donner aux agences de renseignement de nouveaux pouvoirs en une surenchère liberticide et inutile.
 

Communiqué commun cosigné à ce jour par :
Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), Ligue des droits de l’Homme (LDH), Reporters sans frontières, Amnesty International, Privacy International

Privacy International, Amnesty International, la FIDH, la Ligue des droits de l’Homme et Reporters sans frontières font part de leur vive inquiétude face aux pouvoirs de surveillance accrus dont devraient bénéficier les agences de renseignement, comme le prévoit un projet de loi qui sera présenté au Parlement français ce jeudi. La nouvelle loi prévoit en effet que les agences de renseignement françaises seront autorisées à pirater les ordinateurs et autres appareils, et pourront espionner les communications de toute personne ayant été en contact, même par hasard, avec une personne suspecte. Le projet de loi prévoit en outre que les agences de renseignement pourront réaliser ces opérations sans devoir obtenir d’autorisation judiciaire.

Nos organisations expriment leur plus vives inquiétudes par rapport à cette proposition de loi qui propose d’installer des technologies de surveillance directement chez les fournisseurs d’accès à Internet et dans les entreprises de télécommunication afin d’analyser toutes les activités sur Internet grâce à des algorithmes développés par le gouvernement. Nos organisations considèrent qu’il s’agirait là de la mise en place de systèmes de surveillance de masse qui iraient à l’encontre du respect de la vie privée des internautes, et que ces systèmes pourraient potentiellement mettre à mal la liberté d’expression et entraîner de graves dérives.

Ce projet de loi donne des pouvoirs sans précédent au Premier ministre dans la mesure où c’est le Premier ministre lui-même qui aura l’autorité d’autoriser toute forme d’activité de surveillance, sans autorisation d’un quelconque tribunal. Certes, le projet de loi prévoit la création d’une Commission nationale étendue pour le contrôle des technique de renseignement, mais les recommandations de cette commission ne seraient pas contraignantes ni pour le Premier ministre, ni pour ses délégués. En supprimant le contrôle en amont des juges sur les activités de renseignement, le projet de loi constitue une grave atteinte à la vie privée des citoyens ordinaires et augmente le risque d’abus. Ce projet de loi peut également accroître les risques que la surveillance de masse fait déjà planer sur les personnes travaillant sur des sujets sensibles et qui dépendent de sources confidentielles, notamment les journalistes et les organisations de défense des droits humains.

Les pouvoirs de surveillance à l’étranger prévu dans le projet de loi sont très étendus et s’apparentent à ceux contre lesquels des plaintes ont été déposées au Royaume-Uni. Ils permettent au Premier ministre d’ordonner que soient interceptées toutes les communications émises ou reçues à l’extérieur du territoire français. Toujours d’après le projet de loi, les mesures techniques qui pourraient être déployées par les agences de renseignement seront décidées par le Conseil d’Etat, dans le cadre d’un décret d’application non publié.

Outre les mesures de filtrage proposées, le projet de loi donne de nouveaux pouvoirs de surveillance aux agences du gouvernement, ce qui ne va pas sans susciter de sérieuses inquiétudes :

  • le projet de loi prévoit de manière explicite que les agents de renseignement pourront, en dernier ressort, pirater les ordinateurs et autres appareils de communication. Le piratage constitue une forme extrêmement intrusive de surveillance et son utilisation par des autorités gouvernementales quelles qu’elles soient, et notamment par des agences de renseignement, doit être fortement réglementée afin d’assurer une protection contre les abus de pouvoir ; le projet de loi ne prévoit cependant aucune intervention des autorités judiciaires dans le but de contrôler ce pouvoir de piratage ;
  • le projet de loi donne le pouvoir aux agences de renseignement d’utiliser des « capteurs de proximité » dans le cadre d’opérations de terrain, afin de confirmer la localisation et l’identité de certaines personnes. Selon la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil – autorité française chargée de la protection des données personnelles) cette disposition cherche en réalité à doter les services de renseignement français de la capacité à intercepter et à écouter les conversations téléphoniques grâce à des capteurs IMSI ; la Cnil a obtenu du gouvernement qu’il inclue différentes protections supplémentaires à son projet de loi avant que celui-ci ne soit examiné par le Parlement. Les systèmes d’interception et d’écoute IMSI sont des systèmes d’interception mobiles dont l’exportation est contrôlée tant aux Etats-Unis qu’en Europe ; ils ont récemment fait l’objet d’une grande attention de la part des tribunaux et des assemblées législatives américaines. Le projet de loi stipule que les capteurs IMSI pourront être utilisés pour la collecte d’informations de géolocalisation de personnes en temps réel, en utilisant leurs appareils de communication. Dans la mesure où les capteurs IMSI ne sont pas ciblés mais permettent simplement de géolocaliser une personne dans une zone donnée (par exemple un centre commercial ou un aéroport), leur utilisation va inévitablement faciliter la surveillance de nombreuses personnes qui ne sont suspectes d’aucune activité criminelle ;
  • les communications électroniques de toute personne ayant été, par hasard, en lien avec une personne suspectée – et y compris les connexions ou les rencontres en ligne ou hors ligne – seraient susceptibles d’être interceptées et étudiées par les agences de renseignement, grâce aux nouveaux pouvoirs que leur conférerait le projet de loi.

Nos organisations lancent un appel au Parlement français et lui demandent d’étudier ce projet de loi de manière approfondie dans les semaines à venir, afin de vérifier que la loi française soit conforme aux règles internationales sur les droits de l’Homme et aux standards applicables en matière de surveillance.

Carly Nyst, directeur juridique de Privacy International, a déclaré :
« L’introduction de cette loi, un mois à peine après la tragédie de Charlie Hebdo, est une tentative visant à étendre les pouvoirs de surveillance, aux prétextes de prévenir le terrorisme. Une sécurité accrue de doit pas être au prix d’un moindre respect de la vie privée et la lutte contre le terrorisme ne doit pas être utilisé comme argument pour justifier le contrôle de masse des activités de chaque citoyen français sur Internet. Si toutes les mesures proposées devaient être adoptées par le parlement, sans étude approfondie, la France serait bel et bien en passe de devenir un Etat espion. »

Joshua Franco, chercheur en technologies et droits de l’Homme chez Amnesty International a ajouté :
« La France ne peut accepter que sa quête de sécurité se fasse au détriment du respect du droit qu’a tout être humain de s’exprimer et de voir respecter sa vie privée. Ces pouvoirs de surveillance invasifs et très étendus ne seraient aucunement contrôlés et pourraient inciter les gens à s’autocensurer sur Internet. »

Karim Lahidji, président de la FIDH a déclaré :
« L’absence de contrôle judiciaire nous inquiète beaucoup et ces dispositions donnent au gouvernement le pouvoir d’autoriser une surveillance élargie de toute personne quelle qu’elle soit, sans que celle-ci puisse le contester devant un tribunal. Nous sommes également inquiets de constater cette tendance croissante à abuser de la rhétorique de la lutte contre le terrorisme pour mettre à mal les libertés. »

Christophe Deloire, secrétaire général de Reporters sans frontières a précisé :
« Nous exigeons que cette loi protège le droit des journalistes à travailler sans être espionné, faute de quoi elle constituerait une grave violation de la liberté de la presse et des médias. Le gouvernement doit rétablir la protection de la confidentialité des sources des journalistes en réintroduisant dans les procédures la référence à un magistrat. Il est crucial que le système de surveillance envisagé dans ce projet de loi prévoit une exception pour les journalistes. »

Pierre Tartakowsky, président de la Ligue des droits de l’Homme a déclaré :
« Les droits fondamentaux des citoyens ne seront respectés que si l’on rétablit le principe d’un contrôle efficace et proportionné, impliquant des garanties judiciaires et une place au contradictoire préalablement à l’autorisation de mesures qui, par ailleurs, ne doivent être mises en place que dans un but strictement défini. »