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29/07/2010

L’île de Lilliput

Les liens qui se sont inexorablement tissés entre ce qui nous sert de président et Lilliane Bettancourt ramènent plus d’un observateur à Napoléon et aux caricatures dont il a été l’objet.

« Irrévérencieuse, par essence, la caricature a exploité les failles et les travers du système et pris d'autant plus d'ampleur que la chute irrémédiable s'annonçait dès la fin de 1811. Le peuple Français commençait à se démobiliser et à se lasser des excès de Napoléon lui-même (guerres interminables et massacres de plus en plus grands sur les champs de bataille, conscription anticipée, restriction drastique des libertés, impôts, …) et par la crise économique commencée cette même année. »

Près de deux siècles sont passés. Le miroir de l’histoire se rappelle donc au bon souvenir du néo-lilliputien… à cela près que la caricature suffit de moins en moins à expurger le dégout et le rejet qu’il inspire. Le mot même de président en a perdu sa majuscule.


(*) Evacuation de familles sans logement à la Courneuve
envoyé par Mediapart. - L'info internationale vidéo.

L’Affaire-paravent dite "Woerth-Bettancourt", - elle-même abondamment enfumée par d’écœurants exploits dits sécuritaires (*); contrôles fiscaux qui pourraient être exercés sur les Roms et les gens du voyage; visites estivales à Grenoble (préfecture) et en Andorre (paradis fiscal dont il est Prince) -, lui aura sans doute permis de prévoir une retraite discrète sur l’île d’Arros, son île d’Elbe à lui …

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Triste fin pour qui se rêvait Gulliver !

Aude Doiderose a écrit un poème sur le sujet…

« Rattrapée, dans ma course vaine/ Par mes pensées dans les nuits d’ombre/ Suivie de mes fantômes sombres/ Tu vis, malaise, dans mes veines

Je résiste aux assauts du vrai/ Qui encercle ma citadelle/ Et dresse de longues échelles/ Où grimpe tout ce qui m’effraie

Combien de temps me reste-t-il/ Avant de céder sous leur nombre/ De m’effondrer sous les décombres/ De mes illusions si futiles ?

Comme une femme Gulliver/ Vaincue par leurs fines aiguilles/ Je saigne, souffre et je vacille/ Et tombe avec mon univers »

27/07/2010

Râteau d’honneur

Ou « La lettre dont on ne parlera pas », et c’est bien dommage de ne pas parler de dignité par les temps qui courent !

Rateau barbizon.jpg
En réaction à l’attribution d’une Légion d’honneur qu’il n’a jamais demandée, Jacques Bouveresse  a transmis aux Editions Agone copie d'une lettre en date du 17 juillet 2010 par laquelle il a refusé cet «honneur».

A coté d’une Légion d’Honneur accordée, acceptée et reçu des mains sales de Monsieur W. par le gestionnaire de fortune de L. Bettencourt ; le projet de donation de deux appartements à la comptable de la même L. Bettencourt, - très probablement un faux glissé dans un des tiroirs du notaire et néanmoins ami de la famille par qui le scandale arrive -, il y a aussi, et c’est très heureux :

  • une lettre adressée à un ministre de la République, V. Pécresse, par laquelle son auteur refuse très clairement de servir de caution intellectuelle à une politique «inacceptable». Un euphémisme. Cette lettre est signée par Jacques Bouveresse, philosophe exigeant et connu pour ses positions critiques contre les impostures. A noter que Jacques Bouveresse  avait déjà refusé cet «honneur supposé» à Jack Lang.

Il a répondu en Mars 2008, à une interview dans Médiapart qui éclaire les non philosophes sur sa pensée.

Lettre de Jacques Bouveresse à Mme Valérie Pécresse,
ministre de l’Enseignement supérieur

« Madame la ministre,

Je viens d’apprendre avec étonnement par la rumeur publique et par la presse une nouvelle que m’a confirmée la lecture du Journal officiel du 14 juillet, à savoir que je figurais dans la liste des promus de la Légion d’honneur, sous la rubrique de votre ministère, avec le grade de chevalier.

Or non seulement je n’ai jamais sollicité de quelque façon que ce soit une distinction de cette sorte, mais j’ai au contraire fait savoir clairement, la première fois que la question s’est posée, il y a bien des années, et à nouveau peu de temps après avoir été élu au Collège de France, en 1995, que je ne souhaitais en aucun cas recevoir de distinctions de ce genre. Si j’avais été informé de vos intentions, j’aurais pu aisément vous préciser que je n’ai pas changé d’attitude sur ce point et que je souhaite plus que jamais que ma volonté soit respectée.

Il ne peut, dans ces conditions, être question en aucun cas pour moi d’accepter la distinction qui m’est proposée et – vous me pardonnerez, je l’espère, de vous le dire avec franchise – certainement encore moins d’un gouvernement comme celui auquel vous appartenez, dont tout me sépare radicalement et dont la politique adoptée à l’égard de l’Éducation nationale et de la question des services publics en général me semble particulièrement inacceptable.

J’ose espérer, par conséquent, que vous voudrez bien considérer cette lettre comme l’expression de mon refus ferme et définitif d’accepter l’honneur supposé qui m’est fait en l’occurrence et prendre les mesures nécessaires pour qu’il en soit tenu compte.

En vous remerciant d’avance, je vous prie, Madame la ministre, d’agréer l’expression de mes sentiments les plus respectueux. »

Jacques Bouveresse

23/07/2010

Violences

Violence des propos : jeudi 22 juillet sur France Inter, le président du MoDem, François Bayrou a estimé, après les voies de faits constatées à Grenoble et dans le Loir-et-Cher, que la politique de sécurité de Nicolas Sarkozy montrait aujourd'hui «ses très grandes limites» et qu'il fallait la remettre en question. La très grande violence des propos ainsi tenus a empêché le leader de garder tout son calme pour entretenir les auditeurs, qui n'attendaient pourtant que ça, du financement de :

etc, etc… Silence sur ces points névralgiques pour les moins bien lotis de l’hexagone. On avait pourtant connu le président du modem plus convaincant et incisif. Plus aérien.

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Les retraites négociées en douce, l’imperceptible mais nécessaire courtoisie que l’on se doit entre gens de pouvoir, l’éducation des jeunes enfants et la grande déréliction de l’Etat ont tant accaparé F. Bayrou, qu’il a du aussi faire silence sur le fond de l’Affaire W-B et ses satellites. Il a notamment ignoré de rappeler le pourquoi de l’arrêt Medvedyev concernant l’indépendance de la Justice,  tout comme ce qui constituait à juste titre l’un de ses chevaux de bataille en 2007 : la séparation des pouvoirs.

A sa décharge, et sans être pour autant à ranger aux oubliettes d’une opinion publique mithridatisée, ("la mithridatisation consistant à ingérer des doses croissantes d’un produit toxique afin de devenir insensible vis-à-vis de celui-ci"), l’affaire Woerth-Betancourt occulte d’autres turpitudes. D’où l’importance réitérée ici de signer l’appel pour une justice indépendante et impartiale, pour que soit levé le discrédit jeté sur elle.

Au moment où une autre affaire, Woerth-Wildenstein, impliquant sociétés écran, paradis fiscaux et «optimisation fiscale», revient sur le tapis, ce serait bien le minimum.

13/07/2010

Médiapart

Sans contre-pouvoirs, plus rien ne nous protègera de la racaille obscène qui nage dans le déni. Si l’indépendance de la presse est une priorité, Médiapart est devenu un symbole à défendre à tout prix.

Pour l’Elysée, Isabelle Prévost-Desprez, présidente la chambre financière du tribunal de grande instance de Nanterre et Claire Thibout, ex comptable de Liliane Bettancourt, sont elles aussi à abattre. La première a écrit un opus sur le sujet (*), les déclarations de la seconde sont loin de relever du  phantasme ou de l'imagination.

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A lire : un article éclairant d’Antoine Perraud paru sur Mediapart le 11 juillet et intitulé « Les aboutissants de la contre-attaque élyséenne »

«Comparaison n'est pas raison; surtout maniée à mauvais escient. Or dans l'affaire Bettencourt-Woerth-Sarkozy, les voltigeurs du verbe au service de l'Élysée établissent des parallèles, non pas pour clarifier mais en vue de circonvenir.

Les hommes politiques, prétendus stipendiés par l'ex-comptable Claire Thibout, sont-ils comparables à Dominique Baudis, accusé en 2003, par deux anciennes prostituées (Christelle Bourre dite «Patricia» et Florence Khelifi dite «Fanny»), de crimes sexuels imaginaires à Toulouse? Les visiteurs pour cause électorale de la maison Bettencourt, qui seraient rarement repartis les mains vides, sont-ils calomniés au même titre que le «réseau pédophile» victime des sornettes d'une égarée (Myriam Badaoui) à Outreau entre 2001 et 2005?

Avons-nous, de nouveau, affaire à une ardente égérie dénonciatrice, capable de susciter ce que l'universitaire américaine Elaine Showalter a baptisé l'«Hystoire»: ce grand concours d'agitation de l'inconscient collectif à l'ère électronique, qui s'inscrit dans de précédents récits médiatiques, et balise, jusqu'au cliché, la révélation sidérante de turpitudes propres aux notables?

Claire Thibout n'a ni le profil psychologique, ni la désespérance sociale des Pythies de Toulouse ou d'Outreau, dont les oracles diffamatoires entraînèrent les emballements médiatiques et judiciaires de sinistre mémoire. De plus, Claire Thibout ne fut pas soumise à quelques conciliabules étouffants avec un juge (comme à Outreau) ou un gendarme (comme à Toulouse). Ceux-ci profitèrent des fragilités d'êtres déchus se rêvant reine d'un jour, pour siphonner leurs aveux au cours de séances en tête-à-tête. Un homme de loi buvait les paroles d'une délatrice ; celle-ci mesurait que c'est en mentant qu'on devient écoutée...

Claire Thibout n'a jamais été exposée à une telle économie libidinale de la confession: livrer, seul à seul, son philtre sans trouver aucun filtre. Au contraire, son avocat, Me Antoine Gillot, tout comme le journaliste de Mediapart, Fabrice Lhomme, n'ont cessé de lui rappeler les risques et les conséquences de ses déclarations, non pas recueillies en face à face mais toujours en présence d'un témoin. Nul vampirisme, donc, mais une médiation.

Surtout, les déclarations de Claire Thibout ne constituent pas l'alpha et l'oméga d'un scandale fantasmagorique, qui se déclinerait à partir et en fonction de cette pièce unique au dossier. Les allégations de l'ancienne comptable s'inscrivent dans une enquête politico-financière sérieuse menée par Mediapart, fondée sur des révélations vérifiées (les 30 millions d'euros restitués à Liliane Bettencourt au titre d'un curieux «bouclier», mais surtout un système d'évasion fiscale sous égide étatique, sur fond de conflit d'intérêts touchant la femme d'un ministre du Budget au service de la millardaire).

«Cantonner la justice dans un périmètre qui ne menacera plus les puissants»

Nous sommes donc loin des délires de l'affaire Alègre. Là, les accusatrices étaient aux mains des gendarmes et des magistrats, qui peaufinaient leurs propos calomniateurs. Un quotidien régional instrumentalisait leur parole pour détruire Dominique Baudis, en position de faiblesse malgré sa condition de président du CSA. La presse nationale, savamment enfumée, suivait lamentablement. Le moindre revirement de la partie dénonciatrice devenait un grain de sable dans la machine à broyer. C'était signe d'affranchissement.

Dans le scandale actuel, l'accusatrice se retrouve face à des policiers et à des magistrats qui veulent lui faire rendre gorge, pour disculper un président de la République et un ministre gênés par son témoignage. L'essentiel des moyens de communication, notamment audiovisuels, n'assaillent pas les suspects mais les protègent. Le moindre revirement de la partie dénonciatrice reflète donc la pression exercée sur elle de la part d'un pouvoir étatique ayant mobilisé les grands moyens. Ce n'est pas un signe d'affranchissement mais d'assujettissement. Voilà ce que n'a pas voulu comprendre Dominique Baudis, interrogé par Le Figaro de Serge Dassault sur l'affaire Bettencourt-Woerth-Sarkozy.

Cette propension du régime à tirer profit des graves dérives passées de la justice et des médias, pour dorénavant neutraliser l'une comme les autres, s'avère essentielle.

Isabelle Prévost-Desprez préside la chambre financière du tribunal de grande instance de Nanterre (Hauts-de-Seine). Là, elle se heurte au procureur Courroye, truchement zélé de la Chancellerie voire de l'Élysée, qui veille sur le suivi de l'affaire Bettencourt en dépit du bon droit. Écœurée par le monde judiciaire où l'on verse, selon l'expression d'un magistrat, dans la «torpeur de la soumission récompensée», Isabelle Prévost-Desprez vient de publier: Une juge à abattre (Fayard, 248 p., 16€), qui entend témoigner d'une défaite de la démocratie: «Le pouvoir de l'argent a fini par vaincre la justice.»

Elle revient sur la visite de Nicolas Sarkozy le 30 août 2007 à l'université du Medef, qui accueillait ainsi son premier chef de l'État en exercice. L'assistance exulta quand le président s'est égosillé: «À quoi sert-il d'expliquer à nos enfants que Vichy, la collaboration, c'est une page sombre de notre histoire, et de tolérer des contrôles fiscaux ou des enquêtes sur des dénonciations anonymes (... ) On ne peut continuer à mener aux entrepreneurs une guerre judiciaire sans merci.»

Isabelle Prévost-Desprez affirme: «Après un tel discours, même les juges d'instruction financiers les plus optimistes ne pouvaient que perdre leurs dernières illusions. La plus haute instance de l'État venait d'annoncer leur enterrement (...) Ne s'en remettre qu'à une supposée éthique des entreprises pour faire barrage aux dérives de l'argent n'était pas un pari naïf, c'était poser le principe de l'inégalité devant la loi pénale comme une évidence.»

L'auteure explique ensuite comment le pouvoir actuel, pour vouer aux gémonies la pénalisation du droit des affaires, pour envoyer aux oubliettes le juge d'instruction jugé trop fouineur, se servit de l'épouvantail d'Outreau; en tablant sur l'effet produit par la diffusion, en direct à la télévision, des auditions de la commission d'enquête parlementaire. Et elle conclut: «Ce trou noir de notre histoire judiciaire a été utilisé pour cantonner la justice dans un périmètre qui ne menacera plus les puissants. Les politiques et les décideurs économiques auront dès lors beau jeu de renvoyer les juges aux erreurs d'Outreau, pour se présenter eux-mêmes comme des victimes de l'institution judiciaire.» Ajoutons «ainsi que des victimes du journalisme», et nous y sommes !

«Quand le pouvoir de l'argent ne reconnaît plus aucune légitimité à la justice et entend se soustraire aux lois de la République, le contrat social est rompu», souligne Isabelle Prévost-Desprez dans son épilogue. Sous nos yeux, s'écrit cet additif : quand le pouvoir politique ne reconnaît plus aucune légitimité au journalisme et entend se soustraire aux lois de l'admonestation, le contrat moral est rompu.

Ainsi va la régression de cette culture de contre-pouvoir si fragile en France, que rêvent d'achever nos puissants qui s'érigent en victimes de l'affaire Bettencourt.»

(*) « Une juge à abattre »
Jacques Follorou, Isabelle Prévost-Desprez

Date de Parution : 19/05/2010

Collection : Documents
Prix public TTC : 16,00 €
Code ISBN / EAN : 9782213643168 / hachette : 3549011

04/07/2010

Merde à Vauban

Ils, Simone Veil et Michel Rocard, ont osé déclarer  :

(…)

« Mesure-t-on bien les effets dévastateurs du spectacle affligeant qui se donne jour après jour devant l'opinion autour de « l'affaire Bettencourt » ? Veut-on définitivement démonétiser une parole politique déjà suffisamment dévalorisée, décriée, diminuée ?

Les sondages nous disent ces jours-ci que nos compatriotes trouvent cette « affaire » (ndlr : Bettencourt) grave. Grave, elle l'est d'autant plus en effet que les représentants des institutions les plus éminentes de notre pays - présidence, gouvernement, Parlement, justice - se trouvent interpellés, parfois en des termes plus qu'inappropriés, par des responsables politiques plus soucieux de leur carrière que de l'intérêt public. Qu'ils soient de droite ou de gauche, aux affaires ou dans l'opposition.

Comprenons-nous bien : chacun a parfaitement le droit, et même le devoir démocratique, de dénoncer, ou de défendre, telle ou telle situation de cumul de responsabilités, tel ou tel risque de conflit d'intérêts, tel ou tel motif de confusion des genres. Rien de plus normal, ni de plus sain, que cela : c'est l'essence même du débat politique en démocratie.

Mais débattre est une chose, vouloir à tout prix abattre l'adversaire en est une autre. Attaquer ad hominem, harasser sans relâche, dénoncer sans preuves, d'un côté comme de l'autre, ce n'est pas servir le débat, c'est desservir la démocratie, l'affaiblir et finalement l'asservir au nom même des principes que l'on croit si bien défendre. C'est porter atteinte à la dignité de la personne, c'est porter un coup à la politique, à la République.

N'oublions pas que le mot « république » vient de la res publica latine, la « chose publique », qui désigne l'intérêt général et le fonde en principe supérieur à tous les autres.

Aussi, reprenons quelque hauteur, ne cédons pas aux facilités rhétoriques et aux emportements à visée scénique, cessons les excès de tous ordres et débattons. Dignement. »

Voilà donc deux « sages » qui estiment encore devoir « débattre » dans un club privé, le club Vauban, pour savoir si à travers les comportements du sieur Woerth, honnête homme s'il en est, et des affaires en cours, la « chose publique » - la république - serait mise à mal par … celles et ceux qui s’indignent d’apprendre que l’on fait si peu cas dans leur pays des règles de droit constitutionnel ou simplement pénal. Qui s’étonnent aussi et surtout que les sanctions à l’encontre de la délinquance en col blanc soient si difficiles à prendre.

Si l’on s’intéresse à cette chose publique, de quoi peut-on bien débattre aujourd’hui ? De qui, de quoi, doit-on prendre la défense ? A part précisément de la République qui est aujourd'hui vidée de son contenu.

A qui cette injonction «halte au feu» est-elle adressée ? Où se trouve l'anathème lorsque les personnes et les institutions se trouvent dans un état tel, qu'il y a en effet de quoi s'indigner. Le mot est faible.

La «parole politique» a-t-elle plus de valeur que ce qu’elle est présumée défendre, à savoir les principes sans lesquels la «chose publique», toujours elle, risque de disparaître si ce n’est déjà fait ?

Pauvres petits vieux Veil et Rocard ! Ils ont l'âge d'une retraite bien méritée et ils s'agitent encore pour tenter d'allumer un contrefeu à ce qui «fait les titres de la presse ces derniers jours». Qui cherchent-ils à protéger en prenant le risque de ternir leur réputation ?

Pourquoi ne leurs conseille-t-on pas de prendre un peu de repos ?

02/07/2010

Tolérance zéro,... jusqu’où ?

Dans l’actuel imbroglio juridico-politico-financier, une proposition de loi apparemment assez simple, portant le modeste n°268, restera à valider cet automne par l’AN en pleine tempête woerthienne. Elle risque non seulement de passer inaperçue, mais encore de soulager un certain nombre de personnes publiques impliquées dans des affaires déprimantes pour le corps électoral. Elle propose de modifier le texte de l'article L 432-12 du Code pénal concernant la prise illégale d’intérêt. Cet article deviendrait :

«Le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public ou par une personne investie d’un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque (supprimé) "personnel distinct de l’intérêt général" (rajouté) dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l’acte, en tout ou partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement, est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75000 euros d’amende» (inéligibilité incluse).

Très pernicieusement, il s’agit donc de réduire en le supprimant, le risque «gestion de fait de fonds publics», de dépénaliser les situations ou l’élu favorise un tiers avec qui il n’a pas de lien personnel pour en retirer malgré tout un avantage. Favoriser un membre de sa famille civile continuerai d’être considéré comme un délit, mais pas la faveur accordée à sa «propre famille politique», à sa propre association, voire à une autre structure rattachée administrativement (intérêt général) à sa «propre» personne.

Le Sénat, club d’élus locaux, a naturellement voté ce texte comme un seul homme et il ne serait pas étonnant que l’Assemblée Nationale en fasse autant avec la même unanimité.

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En résumé, la modification du texte, tend à exclure le délit de prise illégale d'intérêt d'un élu local en l'absence d'enrichissement personnel. Ca vaut le coup (en anglais : worth it) d’essayer.

Rapport à l’actualité : si cette loi était votée, un des présumés chefs d’accusation à l’encontre du ministre Woerth, qui précisément, ne manquera pas de plaider «l’absence d’enrichissement personnel», pourrait bien tomber.

C’est la nouvelle piste incidemment découverte par Médiapart qui s'est procuré le rapport sur les comptes 2008 de ce mystérieux parti «woerthien» (agréé en janvier 2008 et basé à Senlis), auprès de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (en usant du droit à l'accès aux documents administratifs).

On y découvre que ce parti sans adhérents et donc sans cotisation, a une trésorerie plus que confortable, ce qui en soit n’est pas répréhensible.


Par contre, « dans la colonne «produits», on s'aperçoit que «l'Association de soutien à l'action d'Eric Woerth» a bénéficié, au fil du temps, de quatre versements de la part de l’UMP : 3.000 euros les 30 mai et 24 décembre 2008, 5.250 euros le 9 mai, carrément 55.000 euros en janvier.

En clair, Eric Woerth, trésorier du parti présidentiel, s'arrange pour que l'UMP finance un parti politique local à son service... Le ministre est à l'origine, en même temps qu'à l'arrivée, des subventions, se mettant lui-même sous perfusion. Sacrée confusion des genres... On comprend mieux qu'Eric Woerth ne dise mot sur cette «Association»... »

Si ce n’est pas de la prise illégale d’intérêt, çà y ressemble énormément !

Mis à part les mésaventures du négociateur missionné pour élaborer, dans l’intérêt général, une réforme des retraites crédible, cette loi n° 268 est faite pour encore simplifier le travail du juge d’instruction et participer à justifier sa disparition programmée. Au surplus, elle risque de tomber à-pic dans l’affaire Woerth-Bettencourt, un peu comme les bidouillages dont a bénéficié la scientologie en 2009. Elle va aussi dans le même sens que la dépénalisation du droit des affaires, à savoir une trentaine de mesures pour «rendre aux Français le goût d'entreprendre» dixit le Pdt de la République devant le Medef en 2008, tout en évitant à ses fidèles du Fouquet’s de se trouver en délicatesse avec le code pénal.