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31/07/2014

L'humanité est maudite

Est-ce bien le moment d’interroger les miroirs pour savoir si l’on est bien celui qui hurle le plus fort et le plus bellement devant l’horreur, celui qui est le plus apte à représenter un dégoût insurmontable, légitime et humain, planté là devant l’étal des bouchers Netanyahu, Assad, Porotchenko - on en passe de moins médiatisés - et de leur sponsor étasunien ? Comme s’il s’agissait de vendre sa propre barbaque à des supporters ébahis du spectacle de corps enchevêtrés, se demandant bavant, comment toute cette histoire pourrait bien ne finir jamais enfin ! Comment pourrait-on la prolonger, mine de rien ?

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Est-ce bien le moment de faire référence à Jaurès et d’affirmer que le député de Carmaux aurait voté pour le « pacte de responsabilité » et autres traités ignobles, assis au Croissant attendant qu’on vienne desservir son couvert et sans lever poing ou petit doigt à l’adresse des valets du Medef de l’époque, sans lever lever poing ou petit doigt à l’adresse de ceux qui fourbissent leurs armes pour mieux les fourguer à des assassins patentés ayant rond de serviette au saint siège des nations unies ?

Pour Jaurès le couvert a été desservi sans que personne puisse mériter son héritage.

Pour les massacres en cours, c’est loin d’être le cas. La folie ne fait que commencer.

"L'humanité est maudite, si pour faire preuve de courage elle est condamnée à tuer éternellement." Jean Jaurès

24/07/2014

Collectif « Palestine 04 – Urgence de la Paix et du Droit »

Lettre ouverte à François Hollande
par le
Collectif « Palestine 04 – Urgence de la Paix et du Droit »
au siège de l'AFPS 04 : le chêne, LD Richard, route de Volx, 04100 Manosque

Cette lettre sera remise en préfecture de Digne le 30 juillet à 11h.
Un tract sera distribué pour annoncer cette initiative.

palestine

Manosque le 22 juillet 2014

Monsieur François HOLLANDE
Président de la République
Palais de l’Élysée
55, rue du faubourg Saint Honoré
75008 Paris


Monsieur le Président de la République,

Depuis une quinzaine de jours Israël a déclenché une intense offensive militaire contre la Bande de Gaza, faisant plusieurs centaines de morts, avec énormément d'enfants et encore bien plus de blessés, dont 80 % de civils.

Le 9 juillet, vous avez cautionné ces massacres en affirmant qu’Israël avait le droit de prendre «toutes les mesures pour protéger sa population face aux menaces».

Vous vous êtes bien gardé de rappeler que les tirs de roquettes depuis Gaza (qui ont fait à ce jour 2 victimes civils) font suite à une attaque israélienne de grande ampleur sur l'ensemble de la Cisjordanie, sur fond de l'aggravation constante de la colonisation de ce territoire.

En soutenant un État qui agrandit ses frontières par la force, vous violez la Charte des Nations Unies.
Par la coopération militaire et économique que vous entretenez avec Israël, vous vous rendez complice de crimes de guerre et de crime contre l'humanité, que sont les punitions collectives et le ciblage délibéré des civils pratiqués à Gaza.

Contrairement à ce que vous avez affirmé lors de votre discours traditionnel du 14 juillet, nous ne cherchons pas à « importer le problème israélo-palestinien », mais à exporter les valeurs de la France que sont la liberté, la justice et le droit à résister contre l'occupation.
Et les déclarations du premier ministre, Manuel Valls, qui induisent l’idée que nos manifestations de solidarité avec le peuple palestinien seraient assimilable à de l’antisémitisme sont indignes et une insulte pour nous. Elles viennent soutenir ce que les sionistes et le gouvernement israélien veulent faire croire pour empêcher toute critique de l’État d’Israël et lui permettre de continuer à bombarder, coloniser, assassiner en toute impunité.

Monsieur le Président, vous avez dénoncé à Alger le 20 décembre 2012 le système colonial «profondément injuste et brutal».
Le 15 octobre 2013, à Soweto en Afrique du Sud, où vous rendiez hommage à Nelson Mandela, vous avez déclaré à propos de l'Apartheid «c'est émouvant de venir ici, à Soweto, Soweto où, il y a 40 ans, les gens mouraient pour leur liberté, pour leur dignité».
Aujourd’hui, par vos déclarations, vous validez le système colonial et d'apartheid qui qualifient aussi la politique des gouvernements israéliens depuis bientôt 70 ans.

La France doit se ranger du coté du Droit ! C'est pourquoi nous vous demandons instamment :

  • de condamner clairement l'agression militaire israélienne et d'exiger son arrêt immédiat. Et de cesser toutes coopérations militaires avec l'état d’Israël.
  • d’imposer la levée du blocus de Gaza.
  • de mettre tout en œuvre, y compris des sanctions économiques, pour que l’État d’Israël se conforme au droit international.

Nous vous rappelons que :

  • Le Président de la République Française doit constitutionnellement être le garant du respect du droit international et des droits de l'Homme.
  • L'ONU a proclamé 2014 année internationale de solidarité avec le peuple Palestinien.


Signataires, membres du Collectif « Palestine 04 – Urgence de la Paix et du Droit » :
ACAT, ACDPP, ADECR, ADM, AFPS04, CCFD, CFDT, CGT , Confédération Paysanne, EELV, Femmes Solidaires, Forum Civique Européen, France-Cuba, FSU, INDECOSA, LDH, Les Amis de l'Humanité, MAN, Mouvement pour la Paix, NPA, PCF, PG, Radio Zinzine, Sud-Education, Terre des Hommes, OCML Voie Prolétarienne
Avec le soutien de : Attac 04, Solidarités 04, Assemblée Citoyenne du Bassin Manosquin

23/07/2014

Droit d’asile : suspicion, contrôle et régressions

Droit d’asile : suspicion et contrôle sont les maîtres mots de la réforme
Communiqué de la Coordination française pour le droit d’asile (CFDA).

droit d'asile

L’architecture globale du projet de loi présenté aujourd’hui au conseil des ministres montre clairement que les associations n’ont pas été entendues lors de la concertation nationale de 2013. La Coordination française pour le droit d’asile (CFDA) est inquiète du contenu de ce projet de réforme: les quelques améliorations cachent difficilement la suspicion et la volonté de contrôle pesant sur les demandeurs d’asile. Elles se traduisent par des dispositions dangereuses et incompatibles avec le droit d’asile.

Certes, le projet de loi apporte des garanties, par ailleurs imposées par le droit européen, telles que l’accès aux conditions d’accueil pour tous les demandeurs d’asile, le droit, pour un plus grand nombre, de rester sur le territoire le temps de la procédure d’appel, la possibilité de la présence d’un tiers lors de l’entretien devant l’OFPRA, ou encore la prise en compte de la composition familiale dans le versement de l’aide financière.

Mais de sérieuses régressions viennent ternir ces quelques avancées. Ces régressions reposent sur une lecture déconnectée des difficultés quotidiennes des demandeurs d’asile, rendus responsables par le gouvernement des dysfonctionnements du système :

  • les cas d’examen accéléré des demandes et les cas d’irrecevabilité sont multipliés. D’office, ou à l’initiative des préfets ou de l’OFPRA, la procédure d’asile pourra être écourtée. Les demandeurs d’asile ne disposeront pas de suffisamment de temps pour préparer leur demande ;
  • le projet crée un dispositif d’hébergement « directif » s’apparentant de fait à une assignation à résidence généralisée sous prétexte d’une meilleure répartition territoriale : le demandeur l’asile devrait solliciter une autorisation de l’autorité administrative pour s’absenter de son lieu d’hébergement, faute de quoi il pourrait perdre le bénéfice de toute aide ou voir clos l’examen de son dossier par l’OFPRA ;
  • en attribuant à l’Ofii la gestion de ce dispositif d’accueil et la détection de la vulnérabilité, le projet crée une confusion dangereuse entre les missions de protection sociale et sanitaire et les activités de surveillance et de contrôle d’une population ;
  • à l’égard des personnes déboutées de leur demande, le projet raccourcit les délais pour contester les mesures d’éloignement. Et l’articulation de ces dispositions avec celles contenues dans le projet de loi Immigration laisse présager la création de centres dédiés « semi-fermés » et le développement des interpellations policières au domicile des demandeurs et/ou des personnes et des établissements qui les hébergent.

La CFDA appelle les parlementaires à apporter des modifications profondes à ce projet afin que cette réforme apporte toute la protection dont ont besoin les personnes qui sollicitent l’asile et ne se réduise pas à un outil de contrôle.

 

Le 23 juillet 2014

 

La Coordination française pour le droit d’asile rassemble les organisations suivantes :
 
ACAT (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture), Amnesty International France, APSR (Association d’accueil aux médecins et personnels de santé réfugiés en France), ARDHIS (Association de Reconnaissance des Droits des personnes Homosexuelles et transsexuelles à l’Immigration et au Séjour, Association Primo Levi (soins et soutien aux personnes victimes de la torture et de la violence politique), CAAR (Comité d’Aide aux Réfugiés), CASP (Centre d’action sociale protestant), La Cimade, Comede (Comité médical pour les exilés), Dom’Asile, ELENA (Réseau d’avocats pour le droit d’asile), FASTI (Fédération des associations de solidarité avec Tou-te-s les Immigré-e-s), GAS (Groupe accueil solidarité), GISTI (Groupe d’information et de soutien des immigrés), JRS-France (Jesuit Refugee Service), LDH (Ligue des droits de l’homme), Médecins du Monde, MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples), Secours Catholique (Caritas France), SNPM (Service National de la Pastorale des Migrants). La représentation du Haut Commissariat pour les Réfugiés en France et la Croix Rouge Française sont associés aux travaux de la CFDA

21/07/2014

Attiser les tensions

Suite aux notes déjà publiées... le déni honteux du gouvernement français, à moins qu'il ne s'agisse d'un cas de confusion mentale, devient un cas d'école.

gaza sous les bombes

"Gaza croule sous les bombes, Israël s’enferre dans la répression, les interdictions de manifester du gouvernement français attisent les tensions"

Communiqué LDH

La Ligue des droits de l’Homme réaffirme son rejet absolu de toute forme de racisme et d’antisémitisme. Elle appelle tous ceux et toutes celles qui sont attachés à ces principes fondateurs de la République à ne rien tolérer en ce domaine. Elle exprime en même temps son attachement déterminé à la liberté d’expression et de manifestation. Il revient aux pouvoirs publics de faire respecter le droit de chacun à exprimer ses opinions pacifiquement, et dans le cadre des lois de la République. La paix civile, comme le libre débat démocratique, ne seront préservés que si les pouvoirs publics ont une attitude claire et impartiale.

Les actes antisémites commis à Sarcelles autour d’une manifestation interdite ne servent en rien la cause palestinienne et sont, en tout état de cause, inexcusables ; ils appellent enquêtes et sanctions. Rien, en revanche, ne justifie qu’ils puissent servir à l’interdiction de « toutes les manifestations présentant un risque » comme des voix, déjà, le réclament… Sous couvert de ne pas attiser un affrontement communautaire, le gouvernement est en train d’en créer toutes les conditions, en faisant vivre un « deux poids, deux mesures » injustifié et dangereux.

Cette dynamique perverse est le fruit de trois contre-vérités alimentées par la parole gouvernementale :

  • - il n’est pas vrai que celles et ceux qui entendent manifester leur douleur, leur inquiétude et leur solidarité se « laisseraient entraîner par des querelles qui sont trop loin d’ici pour être importées ». D’abord parce que ramener l’offensive sur Gaza à une « querelle », c’est déjà et presque prendre le parti de l’agresseur, en évacuant sa dimension aussi illégale que tragique. Ensuite parce que la solidarité, l’humanité et les droits de l’Homme ne sont pas une affaire de kilométrage, et que prétendre l’ignorer revient à dire aux Françaises et Français à quoi ils devraient être sensibles et à quoi ils ne le devraient pas ;
  • - il n’est pas vrai que critiquer Israël et son offensive miliaire contre la population de Gaza soit manifester quelque antisémitisme que ce soit. Il est donc honteux que le Premier ministre ait instrumentalisé la commémoration du 72e anniversaire de la rafle du Vel d’Hiv pour stigmatiser, en les qualifiant de « nouvel antisémitisme », celles et ceux qui exigent que cesse le massacre à Gaza. Les responsabilités d’un État ne sont en aucune façon celles de personnes ou de communautés ; cela vaut aussi pour l’État d’Israël ;

Au moment où tout indique que le gouvernement israélien entend poursuivre son offensive militaire sans tenir aucunement compte des lois et conventions internationales protégeant les vies civiles, il est plus que légitime de soutenir les actions pour un cessez-le-feu et pour la paix. C’est pourquoi la Ligue des droits de l’Homme appelle à manifester pacifiquement le mercredi 23 juillet, à Paris, à partir de 18h30, de Denfert-Rochereau aux Invalides.

Paris, le 21 juillet 2014

20/07/2014

Manuel : tu es un imposteur, tu es un danger pour la République !

Une note rapide de Jean-Claude Lefort relevée sur Facebook suite à la prise de parole de Manuel Valls à l'occasion de la commémoration de la Rafle du Vel d'Hiv.

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Célébrant la sinistre Rafle du Vel d'Hiv, Manuel Valls a choisi, ce moment et ce lieu de mémoire, pour parler des manifestations en faveur de la paix et de la fin du massacre qui se perpétue à Gaza. Pas un mot sur les morts de Gaza, les bébés tués, rien. Non ! Tu as osé faire un parallèle entre ceux qui - comme moi - exigent la fin de la barbarie et qui mettent en cause les dirigeants d'Israël à des "antisémites". Je n'ai que du mépris à ton endroit. Toi, l'Espagnol devenu Français, tu sais ou tu devrais savoir que quand Franco - le fasciste - a fait un coup d’État contre la République espagnole, des hommes et des femmes sont venus de l'étranger à son secours. Nombreux étaient les Français. Juifs ou non. Croyants ou pas. Tu les nies aujourd'hui. Tu les salis. Tu les trahis. La France à l'époque dirigée par des politiciens de ta famille politique prônait la "non intervention". Tu nous refais le même coup : "ne vous mêlez pas de ce qui se passe loin de chez nous" tel est ton message. Et ainsi place nette serait dégagée pour que s'amplifie le martyr du peuple palestinien. En expliquant que ce conflit risque de monter les communautés françaises les unes contre les autres, tu veux transformer le conflit israélo-palestinien en guerre de religions. Tu es un imposteur ! C'est pas contre les Juifs que luttent les Palestiniens mais contre une occupation israélienne. Et ainsi tu envoies des signaux vers une communauté au détriment d'une autre. Tu es un danger pour la République.

18/07/2014

Manifester

Le droit d’exprimer ses opinions pacifiquement, une responsabilité des pouvoirs publics

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La décision du ministère de l’Intérieur d’interdire une manifestation en faveur des droits du peuple palestinien au motif « de ne pas importer le conflit israélo-palestinien en France », après avoir autorisé la précédente, constitue une entrave manifeste à une liberté constitutionnelle, et un déni de la réalité.

Exiger la reconnaissance du droit du peuple palestinien à un État souverain aux frontières, aussi sûres et reconnues que celles de l’État d’Israël, ce n’est pas importer un conflit, c’est inscrire la politique française dans les principes qu’elle prétend défendre.

Au moment où la liste des victimes civiles – même si le rappel de la prohibition absolue de tels actes envers toutes les populations civiles s’impose – s’allonge de manière effrayante, il ne sert à rien de tenter d’étouffer le sentiment de révolte que provoque l’intervention militaire israélienne contre la population de Gaza, sauf à vouloir un peu plus accréditer que le gouvernement a fait le choix partisan d’un camp.

La LDH entend rappeler avec force que le conflit israélo-palestinien ne peut conduire à assigner à résidence communautaire telle ou telle partie de la population. A ce titre, s’en prendre à des lieux de culte et aux croyants est inadmissible et doit être sanctionné.

En même temps, à en croire les comptes rendus de presse, les faits en cause ont fait l’objet d’un traitement judiciaire partial, en ne rendant pas compte du rôle de la Ligue de défense juive dans leur déroulement. La LDH a déjà eu l’occasion de s’étonner du traitement de faveur dont bénéficie cette organisation qui n’a jamais caché qu’elle se comporte, à l’encontre de la loi, en milice supplétive de certains partis politiques israéliens membres du gouvernement de M. Netanyahou.

C’est sur les pouvoirs publics que pèse, avant tout, la responsabilité de faire respecter le droit de chacun à exprimer ses opinions pacifiquement et dans le cadre des lois de la République. La paix civile comme le libre débat démocratique ne peuvent être préservés que si les pouvoirs publics ont une attitude claire et impartiale.

Communiqué LDH - Paris, le 18 juillet 2014

Note à propos de BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions contre Israël) et d’une info parmi d’autres que l’on peut lire ici.

Une info qui permet d’avancer le raisonnement suivant :
On est libre de s’empoisonner. Ou pas. C’est une démarche individuelle qui peut se doubler d'une démarche politique délibérée.
On n’est pas libre d’empoisonner la collectivité. C’est un crime du ressort des accords commerciaux passés par les États… Reste alors à dénoncer ces accords commerciaux.
Reste aussi, et bien entendu, que les personnes ayant choisi de se lancer dans une campagne BDS, ne sauraient être considérées comme ayant contrevenu à la Loi. Serait-ce le cas, elles devraient et doivent être défendues devant les tribunaux et soutenues par les associations qui s'engagent à défendre la Paix au Moyen-orient.
Ne pas mettre en avant la campagne BDS dans un tract appelant à manifester contre le massacre perpétré à Gaza et lui préférer la demande de suspension d’accords commerciaux liant Israël et les États européens dont l’État français, relève d’une économie de moyen du type « qui peut le plus, peut le moins ». Au bowling, on appelle çà "faire un strike".
En faire une pomme de discorde relève d’une évidente volonté de faire avorter une manifestation en faveur de la paix et pour que cesse le massacre à Gaza.

17/07/2014

Génocide progressif à Gaza

Génocide progressif à Gaza : Un grand historien israélien dévoile le dessous des cartes

Par Mohamed Larbi Bouguerra

Ilan Pappé est un historien israélien né 1954 à Haïfa. Il fait partie «des nouveaux historiens» qui, après études des archives tant britanniques qu’israéliennes, ont relu de manière critique l’histoire d’Israël et du sionisme. Au cours des années 2000, il a été l’objet de polémiques et d’attaques. En 2007, il s’est exilé en Grande Bretagne où il  est présentement professeur d’histoire à l’Université d’Exeter et directeur du Centre Européen d’études sur la Palestine. On peut lire, d’Ilan Pappé,  en traduction française,  les ouvrages suivants: «La guerre de 1948 en Palestine. L’origine du conflit israélo-arabe» (La Fabrique éditeur,  Paris, 2000), «Une terre pour deux peuples: Histoire de la Palestine moderne.» (Fayard, Paris, 2004).

génocide progressif

Des Palestiniens regardent une mare de sang après le bombardement israélien d'une zone résidentielle à Beit Hanoun dans le Nord de la Bande de Gaza dans lequel 18 personnes ont été tuées, 8 Novembre 2006. (MaanImages/Wesam Saleh)

Dans un long et magnifique article publié sous le titre «1948: le projet de purification ethnique en Palestine» in  la Revue d’Etudes Palestiniennes (hélas disparue) n° 103 (nouvelle série),  Printemps  2007 (p. 72-84), il  concluait: «…Je voudrais que les crimes commis par Israël ne soient plus attribués à des raisons aussi élusives que «les circonstances», «l’armée» ou justifiés par des locutions telles que «à la guerre comme à la guerre»…ou autres justifications qui innocentent les États souverains et donnent bonne conscience à leurs citoyens. J’accuse, mais je fais aussi partie de la société accusée. Je me sens responsable de l’histoire et je participe de cette histoire. Mais, comme d’autres dans la société israélienne, je suis également convaincu qu’un douloureux voyage dans le passé est la seule manière d’avancer si nous voulons créer un avenir meilleur pour nous tous, Palestiniens et Israéliens ensemble.»

Le Génocide progressif d’Israël dans le ghetto de Gaza

Sous ce titre, Ilan Pappé a publié,  en anglais, le 13 juillet 2014, sur le site «The Electronic Intifada» l’article dont nous donnons ci-après de larges extraits:

«Dans un article paru en  septembre 2006 sur «The Electronic Intifada», j’ai défini la politique d’Israël vis-à-vis de la Bande de Gaza comme un génocide progressif. L’assaut actuel mené par Israël indique hélas que cette politique continue sans le moindre changement. Ce terme est important car il place correctement l’action barbare d’Israël- à l’époque comme aujourd’hui – dans un contexte historique plus large. L’accent doit être mis sur le contexte car la machine de propagande israélienne tente, à plusieurs reprises, d’exposer ses politiques hors contexte et transforme le prétexte qu’elle trouve pour chaque nouvelle vague de destruction en justification principale pour une autre frénésie de massacres aveugles et de mises à mort de la Palestine….La vague génocidaire actuelle a aussi, comme toutes les précédentes, une cause immédiate. Elle trouve son origine dans une tentative pour faire échouer la décision palestinienne de former un gouvernement d’union auquel même les États Unis n’ont pu s’opposer.

Le 15 mai 2014, les forces israéliennes ont tué deux jeunes Palestiniens dans la ville de Cisjordanie de Beitunia, leur meurtre de sang-froid par une balle de tireur d’élite étant capturés sur vidéo [par CNN]. Leurs noms – Nadim Nuwara et Muhammad Abu al-Thahir-  s’ajoutent à une longue liste de tels meurtres, ces derniers mois ou ces dernières années.

Le meurtre de trois adolescents israéliens, dont deux étaient mineurs, kidnappés en Cisjordanie occupée en juin, était peut-être en représailles pour les meurtres d’enfants palestiniens. Mais, pour toute les déprédations de l’occupation oppressive, il a fourni le premier et principal prétexte pour détruire la délicate unité en Cisjordanie mais aussi pour réaliser  le vieux rêve d’éradiquer le Hamas de Gaza pour que le ghetto soit à nouveau silencieux. Depuis 1994 et même avant l’arrivée au pouvoir du Hamas dans la Bande de Gaza, la localisation géopolitique très particulière de cette Bande montre clairement que toute action de punition collective, comme celle qui est infligée actuellement, ne peut être qu’une opération de destructions et de massacres de masse. En d’autres termes, un génocide continu. Ce qui n’a jamais empêché les généraux de donner  les ordres de lancement de bombes,  sur les gens,  à partir des airs.

Réduire le nombre de Palestiniens dans toute la Palestine historique demeure encore  la vision sioniste. A Gaza, sa réalisation prend la forme la plus inhumaine**.

Le timing particulier de cette vague est déterminé, comme par le passé, par des considérations additionnelles. L’agitation sociale à l’intérieur d’Israël en 2011 couve encore et,  un temps, le public a réclamé des coupes dans les dépenses militaires et réclamé de  transférer l’argent du budget «obèse» de «la défense» vers les services sociaux. L’armée a décrété comme «suicidaire» une  telle éventualité. Rien n’est plus efficace qu’une opération militaire pour étouffer les voix appelant le gouvernement à tailler dans le budget des dépenses militaires….A Tel Aviv, les quelques personnes qui ont osé manifester contre [le massacre des Gazaouis] ont été battus par des hooligans juifs pendant que la police regardait ailleurs.

Les universitaires, comme toujours, font partie de la machine de guerre. La prestigieuse université privée «Centre Interdisciplinaire Herzliya» [dans la Silicon Wadi israélienne, dans le district de Tel Aviv] a créé «un quartier général civil» où les étudiants se portent volontaires pour servir de porte-parole à la campagne de propagande à l’étranger.»

«Des horreurs inimaginables»

[Ilan Pappé souligne le rôle de la presse occidentale pour cacher les crimes  d’Israël dont elle ne montre ni  les images de destruction ni les atrocités ou les victimes. L’historien cible les médias français] –«spécialement France 24 mais aussi la BBC qui continuent,  comme des perroquets, à honteusement réciter la propagande israélienne. Ce qui n’a rien d’étonnant puisque les groupes du lobby pro-Israël continuent  à travailler inlassablement pour Israël en France comme  dans le reste de l’Europe et aux Etats Unis»

Et Ilan Pappé de poursuivre: «Je concéderai qu’à travers tout le Moyen-Orient il y a en ce moment des cas horribles où la déshumanisation a provoqué des horreurs inimaginables comme c’est le cas aujourd’hui à Gaza. Mais il y a une différence cruciale entre ces cas-là et la brutalité israélienne : les premiers sont condamnés comme étant barbares et inhumains à travers le monde, alors que les crimes commis par Israël  sont encore publiquement avalisés par le Président des États Unis, les dirigeants de l’UE et les autres amis d’Israël dans le monde.

Le seul espoir pour une lutte victorieuse contre le sionisme en Palestine est celui basé sur un agenda de droits humains et civiques qui ne fasse pas de différence entre une violation et la suivante et pourtant identifie clairement la victime et les agresseurs.

Ceux qui commettent les atrocités dans le monde arabe contre les minorités opprimées et des communautés sans défense, ainsi que les Israéliens qui commettent ces crimes contre le peuple palestinien, devraient tous être jugés selon les mêmes standards moraux et éthiques. Ce sont tous des criminels de guerre, bien que,  dans le cas de la Palestine,  ils sont à l’œuvre depuis plus longtemps que les autres.

L’appartenance religieuse de ceux qui commettent les atrocités ou au nom de la religion qu’ils prétendent professer importe peu. Qu’ils se nomment eux-mêmes jihadistes, judaïstes ou sionistes, ils doivent être traités de la même façon.

Un monde qui arrêterait d’employer le principe «Deux poids, Deux mesures » dans ses relations avec Israël est un monde qui serait beaucoup plus efficace dans sa réaction face aux crimes de guerre perpétrés ailleurs dans le monde.

La cessation du génocide progressif à Gaza et la restitution des droits humains fondamentaux et civiques des Palestiniens où qu’ils soient, y compris le droit au retour, est la seule manière d’ouvrir une nouvelle perspective pour une intervention internationale productive au Moyen-Orient dans son ensemble.»***

Mohamed Larbi Bouguerra

** Vérification : «A l’heure actuelle, plus du quart des décès concernent des enfants» déclare Pierre Krahenbuhl, de l’Agence de l’ONU pour l’aide aux réfugiés palestiniens. (L’Humanité, 15 juillet 2014, p. 4)

***Comme en écho aux thèses du Pr Pappé, Benjamin Barthe écrit dans le Monde (16 juillet 2014, p.2) que « Le compte à rebours avant la prochaine confrontation a déjà commencé. » L’article révèle enfin que « le vendredi 11 juillet, le premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, a déclaré qu’il était catégoriquement opposé à la création d’un Etat palestinien souverain. Un accès de franchise rare, signalé par le site d’information Times of Israël, mais passé sous silence par les médias occidentaux. En l’absence d’un tel horizon, l’armée israélienne peut déjà réfléchir au nom de code de la prochaine opération à Gaza.»

13/07/2014

Pourquoi ?

En mémoire des victimes d’Ukraine, de Palestine, de Syrie et d’ailleurs où l’on tue et torture.
Pourquoi ? …
En mémoire de ceux qui leur ont donné vie.
Pourquoi ?…
En mémoire de ceux qui meurent de tristesse, honte, douleur, rage, impuissance, face à l’inconscience et à la lâcheté des repus.
Pourquoi ? …

10/07/2014

« Gardiens de nos frères »

Lettre ouverte à "Monsieur" François Hollande qui ne la lira pas puisqu'il prépare son déplacement sur le tour de France, que les carnages organisés au Moyen-Orient ne l’intéressent pas, pas plus que ce qui se passe en Ukraine où, là aussi les populations sont abandonnées aux mains de fascistes, qu'il a de toute façon laissé sa place de président à Manuel Valls et à ses "frondeurs" d'opérette en évitant au corps électoral de se prononcer, etc, etc...
L'art de se faire des illusions !

Gardiens de nos freres, lettre ouverte à F. Hollande

"Le Président de la République a eu ce soir (9 juillet) un entretien téléphonique avec le Premier ministre israélien, Benyamin NETANYAHOU. Il lui a exprimé la solidarité de la France face aux tirs de roquettes en provenance de Gaza. Il lui a rappelé que la France condamne fermement ces agressions. Il appartient au gouvernement israélien de prendre toutes les mesures pour protéger sa population face aux menaces.
Le Président de la République rappelle la nécessité de prévenir l’escalade des violences."

 

Monsieur le Président,

Nous, associations de défense des droits de l’Homme, condamnons fermement les assassinats des trois jeunes Israéliens retrouvés près d’Hébron le 30 juin 2014 et celui du jeune Palestinien à Jérusalem-Est le 2 juillet 2014. Nous sommes particulièrement inquiets de l’intensification des attaques contre des civils dans le Territoire palestinien occupé par les forces israéliennes et du climat de haine qui s’installe en Israël à travers notamment des « appels à tuer les Arabes ».

L’opération militaire israélienne dite « Gardiens de nos frères » lancée quelques jours après la disparition des trois jeunes Israéliens le 12 juin dernier, avait pour objectif officiel de les retrouver. Les moyens déployés par la puissance occupante pour ce faire se sont rapidement révélés disproportionnés. Au lieu d’une enquête méthodique, une violente campagne de répression a été lancée en Cisjordanie. A l’heure actuelle, le bilan est très lourd : 12 Palestiniens ont été tués, dont 9 civils. Environ 120 Palestiniens ont été blessés. Au moins 640 personnes ont été arrêtées à travers toute la Cisjordanie, dont 250 membres du Hamas, ainsi que 23 parlementaires et de très nombreux enfants. Plus de 1 200 maisons et bureaux ont été saccagés lors de raids, les terrains agricoles délibérément ravagés lors des parachutages. Les maisons des familles de deux Palestiniens « déclarés coupables » de l’enlèvement – sans que la preuve en ait été apportée – ont été immédiatement démolies. Deux tentatives d’enlèvement d’enfants palestiniens par les colons – dont une réussie – ont eu lieu à Jérusalem Est. Des colons en voiture ont essayé d’écraser des Palestiniens près d’Hébron – dont une enfant de 9 ans. Parallèlement, les bombardements se sont intensifiés sur la bande de Gaza vers laquelle convergent des unités au sol, et trois avant-postes illégaux ont été établis par des colons en zone E1.

Rien ne peut justifier l’assassinat de ces trois jeunes Israéliens mais la punition collective infligée au peuple palestinien en représailles ne peut non plus se justifier. Nous sommes très préoccupés par la multiplication des appels à la « vengeance » lancés par de nombreux responsables politiques israéliens, dont le Premier ministre Benjamin Netanyahou qui a déclaré lundi 30 juin que « la vengeance pour le sang d’un adolescent ou d’un jeune homme n’est pas un travail du diable« . Le ministre du logement Uri Ariel a appelé à « commencer une vague de construction dans les colonies en réponse au meurtre des kidnappés« . Le ministre de l’économie Naftali Bennett a déclaré que « les assassins d’enfants et ceux qui les dirigent ne peuvent être pardonnés. Il est temps de passer à l’action, pas aux mots« . Cet appel à la vengeance semble avoir été entendu, ainsi, mercredi 2 juillet, à l’aube, un jeune Palestinien a été enlevé et tué à Jérusalem-Est.

Ce recours excessif à la force contre des civils palestiniens par l’armée israélienne doit être officiellement et clairement condamné par la France au plus haut niveau. Toute punition collective est une violation grave du droit international, notamment de la quatrième Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre du 12 août 1949.

La France, en tant que Haute Partie contractante à la quatrième Convention de Genève a l’obligation de respecter et de faire respecter la Convention en toutes circonstances (article 1) et de prendre toutes les mesures nécessaires pour poursuivre les personnes ayant commis, ou donné l’ordre de commettre des infractions graves à la quatrième Convention de Genève (article 146).

Dans ces circonstances, nous vous demandons de dénoncer sévèrement les punitions collectives infligées au peuple palestinien et de rappeler au gouvernement israélien son obligation de respecter le droit international. S’il ne s’y conforme pas, nous vous demandons d’adopter toute mesure ferme et pertinente pour mettre un terme à ces crimes.

C’est également dans ce contexte que nous sollicitons auprès de vous un rendez-vous afin que vous puissiez nous communiquer la position de la France.

Dans l’attente de votre réponse et dans l’espoir que vous ferez suite à notre demande, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de notre haute considération. Nous vous informons par ailleurs que nous rendrons cette lettre publique et que nous adresserons une copie à Monsieur Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères et du Développement international.

 

Claude Léostic, présidente de la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine

Taoufiq Tahani, président de l’Association France Palestine Solidarité

Pierre Tartakowsky, président de la Ligue des droits de l’Homme France

03/07/2014

Gilad, Naftali, Eyal, Mahmoud et les autres

Assassinats en série au Moyen-orient, la LDH condamne. Ces colons sont fous.

La Ligue des droits de l’Homme condamne l’assassinat de Gilad Shaer, Naftali Fraenkel et d’Eyal Yifrah, enlevés le 12 juin 2014. Non revendiqués, ces meurtres sont insupportables. S’en prendre à des civils ou à des prisonniers constitue une violation évidente du droit international que rien ne saurait justifier, pas même la situation d’occupation que connaît la Palestine et le déploiement permanent de violence déclenché par le gouvernement israélien à l’encontre du peuple palestinien. Ces assassinats ne serviront que les ennemis de la paix, qui sauront s’en saisir comme prétexte à la permanence de la colonisation, alimentant ainsi un peu plus le fleuve de haine et de sang.

Il est plus que temps que la communauté internationale fasse prévaloir la voie du droit sur celle de la violence, et que tous les responsables de crimes de guerre soient déférés devant la Cour pénale internationale.

Mohamad Abu Khdairse

Ce communiqué qui ne fait pas référence au crime en représailles dont a été victime Mohamad Abu Khdairse, est suivi par la déclaration de Leïla Shahid faite sur RTBF le confirmant et ne présage rien qui puisse rassurer palestiniens et israéliens.

01/07/2014

... Les affaires reprennent

Garde à vue, mise en examen, mise en scène ? ... Les affaires reprennent.

Le 3 avril 2013, le philosophe Bernard Stiegler analysait les conséquences des affaires Sarkozy et Cahuzac sur l’opinion, la faillite de la parole politique et la montée du FN.

Concernant l'ancien président de la République qui vient d'être placé en garde à vue, n'est-il pas trop tard pour que l'opinion publique se contente d'une réaction tardive de la Justice et considère qu'il ne s'agit là, somme toute, que d'une d'une mise en scène de plus ?

Plus que jamais, l'analyse de Bernard Stiegler tient et l'équipe au pouvoir aujourd'hui s'enfume toute seule sans ouvrir une quelconque "perspective".

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Quel impact auront la mise en examen de Nicolas Sarkozy et l’affaire Jérôme Cahuzac ?

Bernard Stiegler - Les soupçons qui taraudent tant de Français, dont les sympathisants du FN, ne peuvent qu’en être renforcés et pousser vers celui-ci ceux qui résistent encore à son idéologie régressive. L’affaire Cahuzac et l’affaire dans laquelle est impliquéeNicolas Sarkozy constituent des cocktails explosifs. Aux yeux de la population, le mensonge permanent apparaît comme une méthode de gouvernement. Je pense même qu’il est possible que François Hollande n’arrive pas à la fin de son mandat. En outre, le fait que monsieur Cahuzac soit soupçonné d’irrégularités liées aux laboratoires pharmaceutiques trouvera sans doute un écho particulier dans la période de crise que nous traversons et où tout ce qui était réputé bénéfique, dont les médicaments, paraît devenir toxique. C’est en ce sens que je parle de pharmacologie : le pharmakon est un remède qui devient un poison dès lors qu’il est pratiqué comme une drogue faute de thérapeutiques médicales qui en prescrivent les règles d’usage. Or, le consumérisme généralisé qui a détruit ces règles fait apparaître les industriels de la pharmacie plus comme des dealers que comme des thérapeutes. C’est cette incurie qui fait prospérer le FN.

Est-ce une faillite de la parole politique ?

Nous vivons une crise du crédit, dont la parole, comme engagement et comme promesse, est une forme que le mensonge affaiblit de façon irréversible. Le crédit n’est pas d’abord bancaire : il est politique. C’est pourquoi lorsque des politiques sont soupçonnés d’une forme quelconque de corruption, ils ne ruinent pas seulement leur carrière : ils discréditent leur pays, ce sur quoi spéculent les marchés financiers. Et comme la plupart des Français, j’ai du mal à comprendre que Jérôme Cahuzac se soit accroché à son poste dans la situation de doute qui le frappait.

Vous pensez que les idées du Front national vont progresser ?

Si la gauche n’ouvre pas très vite une perspective nouvelle, l’extrême droite sera au pouvoir dans quatre ans.

La représentation politique est-elle en crise ?

Elle l’est depuis trente ans. Dix ans plus tôt, le FN était créé, alors que le rapport Meadows décrivait les premiers symptômes de la toxicité du modèle consumériste et que le premier choc pétrolier annonçait la fin de la suprématie occidentale. Face à cela, la “révolution conservatrice” s’est enclenchée autour de Ronald Reagan, Margaret Thatcher et Milton Friedman. Affirmant que “le gouvernement n’est pas la solution mais le problème”, ce néolibéralisme a remplacé l’action publique et démocratique par le marketing, ce qui a peu à peu rendu le politique impuissant. Le Pen, qui se faisait alors appeler “le Reagan français”, reprenait intégralement ce discours de la révolution conservatrice en y ajoutant ses ingrédients antisémites et racistes et en exploitant le ressentiment suscité par les conséquences sociales de la mondialisation : destruction de l’éducation, chômage et “perte du sentiment d’exister”, comme disait Richard Durn. Ce déficit d’attention, de reconnaissance et de dignité est provoqué par le consumérisme devenant addictif et pulsionnel, mais le FN, qui incarne avant tout cet immense mal-être, fait des immigrés la cause de ce mal-être qu’eux-mêmes subissent plus encore. Seule une reconnaissance de ce mal-être et une politique de rupture avec ce consumérisme devenu massivement toxique permettra de combattre sa progression. Lorsqu’une société souffre d’une façon qu’elle ne parvient ni à expliquer ni à soigner, elle se tourne vers un bouc

Malgré le fait qu’elle soit au pouvoir, vous parlez dans votre livre d’une défaite idéologique de la gauche…

Obsédée par le calamiteux “réalisme” issu de l’idéologie ultralibérale, la gauche semble incapable d’imaginer une alternative à la société de consommation. C’est ainsi parce le consumérisme est devenu une machine de guerre idéologique mondiale qui coïncide avec une machine mondiale de guerre économique – ce que j’appelle l’idéologie du marketing. Le gouvernement a voulu donner des gages au système financier sans prendre la peine de penser et de projeter l’alternative requise par la mutation industrielle qu’imposent à la fois la crise planétaire et le bouleversement sans précédent que produit le numérique, où s’ouvrent pourtant de nouvelles perspectives – le silence du rapport Gallois sur ce point est sidérant. Le consumérisme domine encore et toujours, et 95 % des gens qui travaillent en dépendent. Mais tout le monde sait que ce système est en train de s’écrouler : il ne crée qu’une insolvabilité généralisée qui frappe systémiquement les banques, les Etats et les consommateurs. Tout le monde sait qu’une alternative doit émerger, y compris les sympathisants des Le Pen. L’économie de la contribution qui se développe est de toute évidence la base d’une telle alternative. Mais la France et l’Europe semblent ne rien voir.

C’est ainsi d’une part parce que la bêtise engendrée par l’idéologie néoconservatrice – et qui nous frappe tous plus ou moins – aveugle tous les acteurs politiques, et d’autre part parce que ceux-ci, du coup, ne font aucune confiance à l’opinion. En cela, ils ignorent que les peuples sont toujours tiraillés entre deux attitudes, l’une, régressive, qu’exploite l’extrême droite, l’autre qui ne demande qu’à s’élever et à contribuer à rouvrir l’avenir, mais qui a pour cela besoin d’être éclairée et encouragée. Faute de cela, les hommes politiques sont perçus comme cyniques, et poussent l’opinion publique du mauvais côté.

Comment une telle alternative pourrait-elle être pratiquement mise en œuvre ?

Il faut que le gouvernement déclare aux Français que la période d’austérité est transitoire et doit être dépassée non pour revenir à l’étape précédente, à savoir le consumérisme qui a justement engendré cette crise, mais pour s’emparer du nouveau modèle industriel fondé sur le numérique et inventer la société de contribution à la française, c’est-à-dire au-delà du modèle américain – par exemple comme culture du “savoir d’achat” et non du pouvoir d’achat, ou encore comme nouvel âge du web fondé sur la contribution et non sur l’hyperconsumérisme façon Facebook. Il y a pour cela de nombreuses possibilités – sur lesquelles travaille évidemment l’Institut de recherche et d’innovation que je dirige. Mais il faut aussi négocier avec la société, et en s’appuyant sur sa jeunesse, les règles d’une économie de transition permettant de sortir progressivement du consumérisme spéculatif et addictif. La puissance publique doit formuler et projeter cette vision à long terme face au marché qui est court-termiste par nature, et la décliner dans tous les ministères, industrie, recherche et enseignement supérieur, éducation, culture, affaires sociales, fiscalité, formation professionnelle, jeunesse et sport, économie sociale, etc. À l’époque de la contribution, l’opposition entre production et consommation est caduque : tout le modèle social doit être refondé en conséquence.

Recueilli par David Doucet

Pharmacologie du Front national suivi de Vocabulaire d’Ars Industrialis de Bernard Stiegler et Victor Petit (Flammarion).