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06/10/2012

Roma Pride

Communiqué de l'EGAM :
roma pride,egam" Le Conseil Constitutionnel a rendu sa délibération relative à la Question Prioritaire de Constitutionnalité concernant la loi du 3 janvier 1969.

Il a décidé de conserver un « titre de circulation » pour tous les « Gens du voyage », de conserver la « commune de rattachement » et de conserver le quota maximum de 3% de « Gens du voyage » dans la population d’une commune.
 
En un mot, le Conseil Constitutionnel a décidé de conserver l’esprit et la lettre de cette loi honteuse, et de « légaliser » ainsi la discrimination à l’encontre des « Gens du voyage ».
 
Le Mouvement Antiraciste Européen EGAM (European Grassroots Antiracist Movement) est scandalisé par cette décision, qui fera honteusement date pour le Conseil Constitutionnel.
 
En effet, par sa décision, le Conseil légalise le régime discriminatoire qui frappe les « Gens du voyage » en France.
 
Par exemple, le Conseil a décidé de conserver un « titre de circulation », héritier du carnet anthropométrique et véritable passeport intérieur obligatoire pour les « Gens du voyage ». Cette disposition fait de la France une honteuse exception en Europe.
Ce « titre de circulation » doit être régulièrement visé par les forces de l’ordre, comme si les « Gens du voyage » étaient une population à risque, culturellement voir naturellement dangereuse ou délinquante. Cette disposition inscrit donc dans le droit la stigmatisation contre les « Gens du voyage » et renforce les stéréotypes séculaires à leur encontre.
 
De même, l’EGAM est scandalisé par la décision du Conseil Constitutionnel de conserver le principe du quota maximum de 3% de « Gens du voyage » par commune, ce qui serait bien heureusement inenvisageable pour toute autre catégorie de la population.
La position du Conseil Constitutionnel, suivant en cela les recommandations du gouvernement français, est honteuse et antidémocratique. Nous la dénonçons avec force.
 
Enfin, l’EGAM dénonce également la conservation d’une « Commune de rattachement », qui était également la position défendu par le gouvernement français devant le Conseil.
 
La loi de 1969 est une héritière directe de la loi de 1912, élaborée dans le contexte racialiste du début du XXe siècle en Europe. C’est une loi discriminatoire et une honteuse exception française en Europe, c’est pourquoi son esprit comme ses dispositions pratiques doivent être supprimées dans leur intégralité.
 
La demande de suppression intégrale de la loi de 1969 sera au cœur de la « Roma Pride - Marche pour la dignité du monde du voyage », qui se tiendra dimanche 7 octobre à Paris et dans les grandes villes de treize pays européens, sous l’égide de l’EGAM.
 
En particulier, l’EGAM et ses partenaires exigeront du Parti Socialiste qu’il respecte l’engagement pris l’année dernière à l’occasion de la première Roma Pride, à savoir la suppression, par voie parlementaire, de cette loi honteuse.
 
L’EGAM, à l’unisson de la société civile européenne et française, se tourne donc désormais vers le Parlement pour lui demander de supprimer au plus vite cette loi qui fait de la France une honteuse exception en Europe, afin de permettre le respect plein et entier de l’égalité des droits, et de mettre fin à la discrimination qui frappe les « Gens du voyage » depuis de trop nombreuses années en France."

 
« Roma Pride – Marche pour la dignité du monde du voyage » à Paris : le 7 octobre à 14h place du Panthéon, mise en scène artistique par Tony Gatlif.

29/09/2012

Réquisition d’entreprises, septembre 44

C’est sous le titre de « Rendre au travailleur ses outils » que le journal Le Méridional (N°13 du 23 septembre 1944) a pu tenir des propos très proches de ceux développés aujourd’hui par tous ceux qui, à l’instar d’une gauche réelle, s’indignent du rôle joué par les détenteurs de capitaux qui n’ont d’égards que pour les profits boursiers et que mépris pour les artisans de l’économie réelle.

Le fait est d’autant plus étonnant qu’au bout de quelques années, la ligne éditoriale de ce journal  , un temps propriété du maire de Marseille, Gaston Deferre, a ouvert ses colonnes à une droite extrême. (À la Libération, en 1944, Le Méridional est le journal de la démocratie chrétienne depuis sa fondation en septembre. Racheté en 1947 puis fusionné en 1952 avec La France de Marseille par les soins de l’armateur Jean Fraissinet, il devient un « journal de la droite dure ». Il tire à l’époque à 100 000 exemplaires. Source : Jean Contrucci et Roger Duchène, Marseille, 2 600 ans d’histoire, Paris, Fayard, 1998)

Grâce à Robert Mencherini  , Professeur des Universités en histoire contemporaine , venu exposer dans le cadre des assemblées citoyennes de Manosque ce que furent les «réquisitions d’entreprises à Marseille», le texte qui suit est une entrée possible pour accéder à cette histoire de l’immédiat après-guerre, exemplaire à plus d’un titre.

Parmi les protagonistes et en première ligne, les ouvriers qui permettront à l’économie locale de redémarrer. Par leur lucidité, leur courage et leurs qualités humaines, ils s’opposent à leurs anciens patrons qui n’ont pas hésité à collaborer pour réaliser de honteux profits sous l’occupation.

Sollicités par Raymond Aubrac, jeune commissaire de la République convaincu d’avoir à appliquer les directives du Conseil National de la Résistance, 15 000 salariés permettent ainsi à une quinzaine d’entreprises marseillaises, autogérées par eux, de participer au rétablissement des activités du port de Marseille et de la région.

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Raymond Aubrac 

 « Rendre au travailleur ses outils »

« Huit des plus grosses entreprises industrielles de Marseille ont été réquisitionnées, les dirigeants mis dehors, de nouveaux directeurs ont été nommés, ils seront assistés d’un Conseil de membres du personnel et de représentants du Capital.

Cette mesure était justifiée par le passé récent et ancien de ces grosses maisons. Elle sera accueillie comme un pavé dans la marre des trusts où croassent d’innombrables grenouilles. On verra les ordinaires domestiques de l’argent roi s’élever contre elle avec de grands mots qui ne couvrent rien que des intérêts particuliers.

Mais de cette courageuse innovation, il faut tirer deux leçons.

D’abord, elle ne doit être considérée que comme un commencement exemplaire. Il faudra aller plus loin et débrider complètement l’abcès d’un capitalisme tentaculaire. A la faveur de cette libération qui a trempé les énergies et épuré les intentions, il faut reconsidérer tout le système économique et social de notre pays. Il est incontestable que le travail a sur la production des droits qui passent avant ceux du capital. Quelle que par, soit l’origine de l’argent investi, qu’il soit lui-même le fruit du travail, qu’il provienne d’un héritage où qu’il soit de nature plus ou moins fictive, plus ou moins légale, ne change rien à la chose. Si l’épargne devait servir en définitive à opprimer le travail, c’est que l’épargne serait à réformer elle-même. L’outil en principe n’est qu’un prolongement de l’homme, la machine comme la pelle ou la pioche. La machine n’existe pas en soi, elle n’est par nature qu’un enrichissement des moyens humains. Les moyens de production sont au travailleur avant d’être au capital. Le seul rôle de l’argent est de faciliter : de lui-même, il ne produit rien. Les œuvres des hommes sont toujours issues de leur cœur, de leur esprit et de leurs muscles. On dit : le machinisme est inhumain… ? C’est prendre le problème à l’envers. Ce qui est inhumain, ce n’est pas le machinisme, c’est la dépossession du travailleur. Qui a tiré de la mine le charbon et le minerai, qui a façonné les outils, qui a monté la machine ? Le travail et le travail seul. Qu’a fait le capital ? Il a avancé la paye des ouvriers jusqu’au jour où la machine a produit et, comme ce jour-là les ouvriers n’ont pu rembourser pour la raison que leur salaire leur avait servi à vivre, le capital a dit « la machine est à moi ». Rôle de banquier, de prêteur sur gage, c’est tout. Il n’est pas une chose faite par les hommes qui ne soit le pur produit de la main-d’œuvre.

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La seconde leçon à tirer est celle-ci : depuis que le machinisme est roi, une rupture de contact s’est révélée entre le travailleur et les moyens de production –et comment en aurait-il été autrement ? Un véritable abîme s’est creusé entre l’entreprise et la main-d’œuvre. Si le personnel veut reconquérir les moyens de production, il lui faut d’abord combler cet abîme. Et c’est à ce titre que les Conseils mixtes institués hier à Marseille sont précieux. Ils doivent être des écoles au sein desquelles les ouvriers seront amenés à réapprendre leurs métiers de producteurs, à reconsidérer les problèmes économiques et financiers. Pour cette tâche il faudra aux délégués du personnel, non seulement une grande bonne foi et une parfaite loyauté, mais aussi du courage. Ils devront parfois discuter les positions du capital investi dont certains intérêts sont respectables –ceux de l’épargne notamment. Ils devront aussi peut-être savoir prendre leurs responsabilités devant leurs camarades en faveur de la communauté. En exerçant pleinement leurs droits, tous doivent prendre conscience de leurs devoirs.

Le sang-froid, la discipline, le renoncement aux intérêts particuliers devant l’intérêt général sont la condition absolue d’un succès en quoi le monde du travail met tout son espoir et toute sa confiance. »

L’expérience qui n’aura duré que de 1944 à 1947, aurait pu être prolongée sans le temps et sur l’ensemble du territoire si la classe politique s’était évitée l’ambigüité de ses prétentions viciées par d’illégitimes conflits d’intérêt.

Aujourd’hui encore, la dictature ayant changé de visage, les réquisitions d’entreprises, même réaménagées, pourraient constituer une réponse aux plans sociaux qui se succèdent. Sauf que, les bonnes intentions du ministre délégué à l’ESS  (économie sociale et solidaire et à la consommation) - Benoit Hamon - paraissent bien insuffisantes en regard des pressions exercées par les détenteurs de capitaux, leurs lobbies et la mollesse sociale-démocrate du gouvernement auquel il a accepté d’appartenir.

Opus à consulter :

25/09/2012

United colors of Dany le... *

* On peut choisir la couleur.
Pour apaiser la tristesse qui doit s’être abattue sur le groupe EELV à l'annonce de DCB, furieux que l'on puisse refuser de ratifier le TSCG Merkosy, cette note de 2005 signée Serge Halimi à la gloire de Daniel Cohn-Bendit…

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C’est dans le dossier "Joyeux Bordel", coordonné par Pierre Bourdieu, Les Inrockuptibles, n°178

Note du 16/04/2005 :   Accueilli avec des œufs à Montpellier ce week-end par des militants écologistes, Daniel Cohn-Bendit, chef du groupe des Verts au parlement européen, vient de se faire huer à Strasbourg. « Je suis fasciné de voir comment Daniel Cohn-Bendit, un symbole de la révolte dans sa jeunesse, est devenu un héros du conformisme à l'heure de la retraite », a ironisé lundi Francis Wurtz, chef du groupe communiste au Parlement européen.
Cette métamorphose ne date pas d'hier.

Un mois avant Noël, interrogé sur le parcours d'un homme, Daniel Cohn-Bendit, qu'il avait combattu trente ans plus tôt, Alain Madelin eut cette réponse : « Il arrive souvent que des jeunes libertaires deviennent des vieux libéraux ».

Il arrive aussi que, tels ces publicitaires qui recyclent les thèmes de la contestation à des fins marchandes, les anciens contestataires utilisent leur profil ludique et médiatique pour endosser les habits neufs de la domination. Et il est presque de règle que le "débat" de notre temps exagère les divergences de style qui opposent deux protagonistes tout en occultant les convergences de fond qui les rapprochent. Le marchand vend de la rébellion, le rebelle célèbre le marché, leur choc résume la vie des idées.

En somme, rien de plus habituel que la récupération de la dissidence par l'orthodoxie, rien de plus connu que le spectacle de Daniel Cohn-Bendit. Le discours qu'il entonne aujourd'hui — celui de la modernité contre les prudences, de la simplicité contre la pompe, de l'ouverture contre le repli — a, depuis Mai 68, été repris tour-à-tour par Jean-Jacques Servan-Schreiber (qui défendit la régionalisation et qui s'opposa au nucléaire), par Valéry Giscard d'Estaing (qui prétendit "décrisper" le pouvoir et qui fit voter des lois de libéralisation de l'avortement et du divorce), par Yves Montand (qui transforma ses revirements politiques en autant de lettres de créance médiatiques), par Brice Lalonde (qui voulut rendre le traité de Maastricht plus jovial et plus vert), par Bernard Tapie (qui espérait par le bagout faire reculer le Front national et qui s'imposa lui aussi à l'appareil d'un petit parti gouvernemental soucieux de réussir un "coup" électoral). Aucun de ces prédécesseurs, dont la somme des traits distinctifs dessine un peu le portrait chinois de Daniel Cohn-Bendit, n'a jamais ébranlé les piliers de l'ordre social. Reconnaissons-leur cette franchise : ils affirmaient n'en avoir aucune intention. Celui qui sera la tête de liste des Verts aux élections européennes n'est pas moins franc. Trente ans après Mai 68, l'ancien dirigeant du mouvement du 22 mars se déclare à la fois « radicalement pro-européen, radicalement réformiste » et « pour le capitalisme et l'économie de marché ». Il y a quelques années, soutenant le mouvement de Brice Lalonde, il prônait déjà « une majorité qui irait des centristes de progrès aux sociaux-démocrates en passant par les écologistes ». L'ancien pacifiste n'avait pas non plus désapprouvé l'expédition occidentale pendant la guerre du Golfe : « Il ne faut pas exclure de mourir pour le Koweit. »

D'autres sont morts là-bas ; Daniel Cohn-Bendit est vivant. À la différence d'un François Mitterrand ou d'un Lionel Jospin — qui ont parlé à gauche pour gouverner au centre —, il ne dissimule presque jamais son projet. Intarissable, il sait cependant cibler ses confessions avec le professionnalisme tranquille de celui qui a compris que derrière chaque journaliste complaisant se trouve un autre journaliste qui l'adore. Avec VSD, "Dany" parle donc gentiment de "bagnole", de "télé", de "foot" et de couple (il est, soyons-en heureux pour lui, « amoureux de sa femme »). Avec Capital, il passe sans effort du cabotinage consommateur, téléspectateur et conjugal à l'impatience européenne et néolibérale : « Que la France doive s'ouvrir à la concurrence mondiale, c'est une évidence ; elle n'a pas le choix. L'ennui, c'est qu'elle a perdu du temps depuis Maastricht. » Ici, le sentiment d'urgence est agrémenté de quelques savoureux raccourcis dont on a un peu de mal à imaginer qu'ils lui ont tous été inspirés par l'économiste vert Alain Lipietz : « Monnaie unique = réduction des cours d'échange = intensification des échanges = croissance = enrichissement collectif »…

L'ennui, c'est que ce discours de l' "évidence", de l'absence de choix, du temps perdu, de la corrélation entre commerce et prospérité collective, communication et libération, on le connaît déjà par cœur. C'est celui du journalisme de marché, des "décideurs", de la "seule politique possible", du "cercle de la raison". C'est celui des cadres de 50 à 64 ans qui, selon les sondages, forment déjà le noyau dur de l'électorat potentiel de Daniel Cohn-Bendit. Comme lui, ils avaient entre 20 et 34 ans en Mai 68, comme lui, ils faisaient des études. Et comme lui, ils ont fait du chemin. En chemin, ils ont théorisé leur parcours, l'ont naturalisé avec d'autant plus de férocité pour leurs adversaires qu'ils disposaient — dans les médias, les universités, les entreprises et les ministères — du moyen de les faire taire. Inutile de s'étendre. D'autres ont autrefois raconté ce genre d'itinéraire avec le talent et la férocité nécessaires (1)    .

Inversant un peu ses points de départ et d'arrivée, "Dany" se proclame "libéral-libertaire". Alain Minc avait déjà revendiqué l'appellation tout en avouant préférer celle de "capitaliste soixante-huitard". Mais, alors qu'Alain Minc ne fait plus illusion (ses ouvrages à la gloire du marché alimentent les piles d'invendus), Daniel Cohn-Bendit continue à séduire. Et d'abord bien sûr le bloc compact des penseurs bien-pensants : Bernard-Henri Lévy, Jacques Julliard, Alain Duhamel, Laurent Joffrin, Alain Genestar, Jean-Marie Colombani, Georges-Marc Benamou qui, tous, ont déjà donné de la plume pour célébrer l'audace d'un "trublion" peu dérangeant.

D'où vient cependant que certains écologistes, certains électeurs de gauche, voire d'extrême gauche, de nombreux intellectuels et artistes lui fassent encore crédit d'idées qu'il a désavouées depuis une éternité ? Nul doute que Daniel Cohn-Bendit profite de leur ignorance trop fréquente des questions économiques, de leur polarisation sur des clivages de société très médiatisés et de la séduction qu'opère encore un style prétendument iconoclaste. Mais il a aussi réussi à devenir la figure de proue d'un parti progressiste qui avait pris position contre la guerre du Golfe, contre le traité de Maastricht, contre le plan Juppé, et qu'on trouve aujourd'hui encore aux premiers rangs des partisans de la taxe Tobin contre la spéculation, des adversaires de l'AMI et de la mondialisation néolibérale.

En octobre dernier, Dominique Voynet a tenté de dénouer les mobiles d'une telle inconséquence : « Un bon résultat est important pour avoir des ministres en plus. Et Daniel Cohn-Bendit a le soutien des médias. » Construire un rapport de forces électoral plus favorable aux Verts représente un objectif légitime. Mais, puisqu'il s'agit désormais — on l'a assez répété et démenti pour que chacun s'en souvienne — de dépasser le parti communiste au sein de la coalition plurielle (2)  , les écologistes peuvent-ils se satisfaire de l'ambition d'être écoutés par Lionel Jospin aussi souvent que les communistes... qui ne le sont presque jamais ? Et puis, au lendemain du scrutin européen, qui faudra-t-il écouter au juste ? La ministre de l'Environnement qui défend encore les services publics et qui persiste à dénoncer le « désastreux traité de Maastricht » ? Ou la tête de liste européenne de son parti, à la fois bien disposée à l'égard des fonds de pension (pour « responsabiliser les gens ») ; favorable à un sous-Smic pour les jeunes (« Pendant trois ou quatre ans, du moment qu'on leur donne la garantie d'accéder ensuite à un emploi ordinaire ») ; ouverte à de nouvelles privatisations (« Des services comme le téléphone, la poste, l'électricité n'ont pas de raisons de rester dans les mains de l'État ») ; partisane d'une université établissant « de véritables joint-ventures avec les entreprises. Naturellement, l'industrie participerait aussi à la définition des contenus de l'enseignement contrairement à ce que nous disions en Mai 1968 » ; presque aussi euro-enthousiaste et enthousiaste à l'égard de l'euro — dont le préalable fut la libération du marché des capitaux — que les très réactionnaires gouverneurs des banques centrales ? Une telle ambiguïté — ou duplicité — transforme les Verts en un parti comme les autres. Une petite machine électorale de plus, déjà rouillée par les équivoques.

Quant au soutien des médias, Dominique Voynet ne s'est guère trompée... Au printemps dernier, pour célébrer simultanément le trentième anniversaire de Mai et le lancement de son livre à la gloire de l'euro, "Dany" avait déjà participé à onze plateaux de télévision en six semaines. Il ne tarda pas à enchaîner sur un douzième, celui d'Arrêt sur images... pour expliquer à Daniel Schneidermann le sens de ses onze émissions précédentes. Ses leçons d'économie sont primaires, mais dans l'oeil de la caméra son regard reste vif.

En 1989, Cohn-Bendit voulait — déjà — débattre avec Le Pen. Et il admettait : « Cela ne me gêne pas s'il y a une "tapisation" de la vie politique. La politique a besoin des médias et réciproquement. Les médias ont un rôle autonome de critique sociale. » C'est peut-être sur une telle analyse de la société du spectacle que l'ancien situationniste fonde un étonnant pronostic : « Je ne ferai un bon score que si j'ai ma marionnette aux Guignols. » Mais si, pour compter comme Cohn-Bendit, bon score = Guignols, il faut ajouter que, pour lui, bons médias = propriété privée.

Car celui qui vient de saluer à nouveau la « privatisation nécessaire de TF1 » avait autrefois confié à son ami Gonzague Saint-Bris : « Toute réglementation des médias est absurde. Je trouve absurde qu'on n'ait pas la télévision pendant vingt-quatre heures. Je suis sûr que le problème de la télévision se résoudrait par la concurrence. »

Depuis 1995, l'ordre néolibéral (qui célèbre la concurrence) ne suscite ni autant de consentement ni autant de soumission qu'avant. Ses thuriféraires (Madelin, Balladur, Sarkozy) paraissent hors d'usage d'avoir trop servi et tout couvert. Pour accomplir la même pédagogie du renoncement, il faut adopter un ton new-age et trouver d'autres champions, moins dévalorisés. Bien sûr, lorsqu'il s'agit d'aborder les questions dites "de société" (immigration, Pacs), Daniel Cohn-Bendit sait marquer sa différence avec la droite — et dans le bon sens. Mais même dans ces domaines, il ne peut aller au-delà des demi-audaces. Le droit à l'adoption des homosexuels le laisse "dubitatif" : « La norme, c'est qu'un enfant puisse vivre avec un homme et une femme. » Il ne remet pas davantage « en cause la politique globale » du gouvernement en matière d'immigration. Surtout, "Dany" est incapable de résister à la facilité d'un effet de plateau. Parlant du Pacs, il a ainsi lancé : « Quand on voit Jean Marais, on comprend les homosexuels. Il y a des hommes qui sont très beaux. »

Les commentateurs ont eu beau déceler dans un tel trait la marque d'un franc-parler rafraîchissant que vaudrait ce genre de "démonstration" pour un homosexuel moins célèbre et moins beau que Jean Marais ? Car à défaut de se résumer à la confection de bons mots sanctionnée par l'audimat, le vrai débat politique exige de savoir expliquer au lieu de distraire, et de ne pas toujours céder aux délices du fun médiatique.

Récemment, Daniel Cohn-Bendit a confié : « Je veux que Lionel Jospin gagne les prochaines élections présidentielles. » L'objectif a sa cohérence : au train où vont les choses avec ce gouvernement, d'ici 2002 l'euro sera une réalité, la retraite par capitalisation sera installée, le secteur public ressemblera à une coquille vide, le mammouth aura perdu son surcroît de graisse enseignante, les chômeurs dépendront un peu moins de la "société d'assistance" et un peu plus des rigueurs financières concoctées par les banquiers centraux. Et il paraît que, grâce à la communication instantanée et à la monnaie unique, « les McDo continueront peut-être à coûter 30 % de plus en France qu'en Irlande mais les ados s'en apercevront et protesteront ». Daniel Cohn-Bendit n'aura plus alors de vraies raisons de faire de la politique, le rêve de Mai 68 ayant été exaucé, mais par des chemins détournés : « Internet + euro = révolution »...

La résistance, la rébellion, la révolution, ce n'est ni un style, ni une posture, ni la gestion médiatique d'un vieux capital de sympathies contestataires. Bill Gates se promène lui aussi en jeans, certains tycoons d'Hollywood portent la casquette visière à l'arrière, Bill Clinton fuma de la marijuana. Et tous aiment probablement les Rolling Stones, tous profitent de la révolution sexuelle, tous savent chanter We are the world. Mais ils sont le monde que nous devons changer. Et, pour le changer, nous ne pourrons décidément compter ni sur le "jeu" du marché, ni sur la Banque de Francfort, ni sur Daniel Cohn-Bendit.

Serge Halimi

1    -  Lire Guy Hocquenghem, Lettre ouverte à ceux qui sont passés du col Mao au Rotary (Albin Michel, 1986).
2  -  Une performance qui serait d'autant moins exceptionnelle qu'elle a déjà été accomplie en 1989. A l'époque, la liste des Verts, conduite par le très peu charismatique Antoine Waechter, avait obtenu 10,59 % des voix (c'est-à-dire presque autant que celle du Front national) contre 7,71 % pour celle du parti communiste.

Note : sauf indication contraire, les propos en italique sont de Daniel Cohn-Bendit.

22/09/2012

Impéritie politique et démocratique

Jean-Marc Ayrault, le 6 février 2008   ... :

(…) « Les représentants du peuple ne sont pas les censeurs du peuple. » (…)

« C’est en refusant d’associer directement les peuples aux grandes décisions européennes que les dirigeants de l’Union n’ont pas vu monter la déception des catégories populaires vis-à-vis de l’Europe. C’est en croyant que l’élection nationale vaut brevet de politique européenne qu’ils ont sous estimé son manque de réponses aux problèmes structurels du chômage, des inégalités, des délocalisations, de la vie chère. Le Non au référendum sur le traité constitutionnel a été la réponse populaire à cette impéritie politique et démocratique. (…) »

Et en 2012, le Traité sur la Stabilité, la Coopération et la Gouvernance de l'Union Européenne - TSCG- ne serait donc pas soumis au débat et au vote des électeurs ?!!

C’est ce qu’a prévu le même J-M Ayrault, talonné par un Manuel Valls euphorisé par on ne sait quelle ivresse sécuritaire, xénophobe et imbécile (« mais y en-a-t-il d’autre ? »), tacitement approuvé par un François Hollande tétanisé par son seul et grand ennemi « qui n’a pas de visage » et redoublant de prévenances à son égard, qui s’abstient de soumettre ce TSCG au … référendum et a fortiori, d’en discuter.

Cauchemar absurde, suicidaire et incohérent !

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Contrepoint : le discours de J-L Mélenchon au Panthéon pour célébrer Valmy, la naissance de la République le 21 septembre 1792 et la fin des privilèges.

Lumineux !

220ème anniversaire de la république

17/09/2012

Ce n’est pas façon de se laisser mourir

Ce n’est pas façon de se laisser mourir

Dans les bras de l’ignorance

Sans réclamer dommages et intérêts

Sans un regard au soleil voilé

Sans battre la paupière incrédule aux trop longues heures passées, mithridatisé, insensible, immobile, le souffle coupé devant tant d’arrogants massacres de l’intelligence, organisés simultanément déniés

Ce n’est pas façon de se laisser mourir

Dans la rafale des abolitions d’espoirs et de promesses cyniques proférées par des voleurs envasés dans les costumes étroits de la suffisance, des discours lénitifs de bons vieillards renoncés, tranquillisants

Ce n’est pas façon de se laisser mourir

Sans avoir chapitré honte, peur, falsifications

PAPUSZA Bronislawa Wajs 17 09
Illustration tirée de https://www.facebook.com/Papusza1

Passeport, viatique, sursaut d’humanité sont dans ce regard que seul un mur de verre protège encore d’une nuit épaisse

12/09/2012

Stéphane rempile

  • Disparu depuis le 11 septembre 2012 : Benoit Hamon
  • Disparu depuis le 22 février 2012 : Henri Emmanuelli
  • Oubliées les promises bienveillances d'avant primaires et présidentielle...

Stéphane Hessel rempile et présente sa motion au congrès PS de Toulouse !!!

Stéphane Hessel, congrès PS 2012La motion de Stéphane Hessel

Vu de l’Intérieur, que va bien pouvoir en dire le toréador de Beauvau coincé entre l’organisation de navettes aller-retour à destination de la Roumanie, quelques révocations en série, et une quinzaine de zones de sécurité prioritaire à inaugurer.

Mais surtout, comment la cohabitation va-t-elle "maintenant" être possible  ?...

11/09/2012

11 minutes, 11 septembre

D'eux dont il faut se souvenir, d'eux qui sont éloquents, et différents dans leur dignité, et vivants,

De passage sur un sol rendu instable, fragiles d’une honte lancée à leur poursuite et qui ne les atteindra pourtant jamais,

Deux vidéos pour marquer deux 11 septembre, dont on retiendra cette citation empruntée par Ken Loach à St Augustin :

"L'espoir a deux belles filles : la colère et le courage, la colère devant l'état des choses et le courage de la changer"

11 septembre - Ken Loach

Et puis aussi le rire étranger au fracas "monde", rire dernier refuge et dernière fin évoquée par Sean Penn, rire comme une errance à travers une solitude obstinée.

11 septembre - Sean Penn

28/08/2012

Un regard à soutenir …

Rroms : «Il y a un problème humain à résoudre et, pour le résoudre, les gens qui gouvernent nomment des hommes dont les qualités humaines sont atrophiées», des professionnels imbus d'eux-mêmes, attisant la xénophobie sous couvert d'efficacité prétendue.

On appelle ça du populisme.

A La Rochelle, les militants «socialistes» applaudissent leur ministre de l’intérieur … sans s’apercevoir que l’antienne sécuritaire qui lui tient lieu de prothèse n’a plus rien de différent de celle de ses prédécesseurs. On aurait pu s’en douter ? - On s’en doutait, mais pas dans de telles proportions.

Avec ses allures de matamore engoncé dans un costume trop étroit, de petite frappe bien décidé à tout défoncer autour d’elle pourvu que le dernier mot lui revienne sur un simple coup de menton, qui peut encore croire que M. Valls est un digne représentant du parti dont il ose se prévaloir, un parti au socialisme passé mais qui devrait au moins tenter de faire reluire ses origines.

Par la grâce des Rroms qu’il s’est choisi comme bouc émissaires, Valls vient de faire franchir à ses aficionados cette limite honteuse qui faisait que le gouvernement par défaut dont il est l’un des membres «solidaires», pouvait encore avoir une quelconque crédibilité. Qu'importe. "Ne pas laisser à la droite et à l'extrême droite le monopole des injustices et de la violence", telle est son credo !

Les cotes de popularité s’effondrent.

La petite frappe d’Evry n’en a cure. En trois coups de cuillère à pot, elle se permet même de piétiner les platebandes du ministère de la Justice (dont les décisions doivent « normalement » précéder tout démantèlement), celles du ministère du Logement (devant « normalement » trouver des solutions de relogement avant expulsion), celles du ministère de la Santé (jamais consulté mais concerné par les questions sanitaires que la situation des Rroms exige), etc, etc.

 

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Solidarité mal placée oblige, personne ne moufte.

Au passage, et comme si ce n’était pas assez, cet inconditionnel de la présomption d’innocence (essentiellement appliquée à son ami DSK), se permet et trouve le temps de donner (sans qu'on le lui demande) son avis (favorable) sur le nucléaire, méprisant à la fois l’Environnement, son ministre et les engagements pris par le Président «à poigne» qui lui a pourtant offert son poste à Beauvau…

Les épithètes finissent par manquer pour qualifier cet individu, sans doute bien plus nocif que toutes celles et tous ceux qui, prévisibles, lui ont ouvert la voie depuis plus de dix ans. Moins chanceux qu’un Eric Besson qui avait pu trouver refuge sous l’aile protectrice du sarkozysme, fier-à-bras déçu, il enfourche un cheval fiévreux, apparemment bien décidé à occuper le terrain de la droite extrême et populiste. Jusqu’à quand ?

Les militants godillots du PS -ce n'est donc pas incompatible- l’applaudissent encore, alors qu’ils devraient lui intimer l’ordre de décamper. Auraient-ils apprécié le spectacle ?...

Contrepoint pour aller mieux ...

Alexandre Romanès* a signé une tribune dans Le Monde intitulée : "Nomades, nous resterons". Peu probable que l’ex maire d’Evry en ait saisi le sens et a fortiori, ait songé à donner la parole à cette minorité.

" En France, sur les plateaux de télévision, toutes les minorités ont leurs représentants, sauf nous. C'est toujours un homme ou une femme, étranger à notre communauté qui parle de notre malheur. Et en parle mal. Mais nous ne sommes pas les seuls invités à se taire. Les poètes sont dans la même situation."

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Si tu veux dire la vérité, assure-toi que tu as un bon cheval." Proverbe tzigane. Dans les tribus gitanes et tziganes, on connaissait un vieux proverbe : "Pour vivre heureux, vivons cachés." Par crainte des conventions et du pouvoir, nous n'avons jamais permis aux autochtones de s'approcher de nos campements. D'un côté, les habitants des villes et des villages, désireux de voir passer le plus vite possible une population jugée dangereuse. De l'autre côté, des tribus repliées sur elles-mêmes, ne dévoilant de leur culture que ce qu'elles voulaient bien montrer, c'est-à-dire très peu.

Avec le temps, certains traits de notre culture nomade ont pénétré la société occidentale. Comme nous, une partie importante de la société veut vivre au soleil : les bureaux, les usines, les patrons, les responsables politiques, ils n'en veulent plus. Ils votent de moins en moins. Nous, on ne vote pas. Vous avez supprimé le service militaire. Nous ne l'avons jamais fait. Et la réussite sociale nous semble bébête !

Comme le dit le poète gitan Jean-Marie Kerwich : "Ils construisent des murs et ils détruisent le vent." Malheureusement, les sédentaires ne détruisent pas que le vent. Aujourd'hui, la destruction touche tout le monde : les gens de modeste condition, les faibles, les Arabes, les Noirs, les juifs et même les riches.

Le poète Jean Grosjean dit : "L'Occident me fait penser à ces troupeaux d'animaux qui se jettent par milliers du haut de la falaise pour se suicider."

Nous, nous installons notre petit chapiteau dans des villes très différentes les unes des autres. Quand nous sommes dans une ville pauvre, nous avons des contacts avec plein de gens, et quand nous partons, des dizaines d'hommes et de femmes viennent nous saluer. Je me souviens d'un commissaire de police me suppliant de rester dans sa ville. Quand nous installons le chapiteau dans les beaux quartiers, nous n'avons pas de contact avec la population. Comme dit ma fille de 14 ans : "Si les riches étaient heureux, ça se verrait sur leur visage."

Pauvres Chinois, qui travaillent comme des bêtes pour rejoindre un modèle qui les tuera eux aussi ! Que s'est-il passé pour que tant d'hommes et de femmes soient malheureux dans ce pays ? Dans les tribus gitanes et tziganes, nous avons des défauts, mais les garçons et les filles se rencontrent et n'ont pas peur de faire des enfants. Une de mes plus jeunes filles vient de fêter ses 16 ans, en même temps que les 2 ans de son fils. Nous ne connaissons pas le racisme de l'âge : les 14-15 ans entre eux, les 18-20 ans entre eux, les 30-40 ans, les 50-60 ans, et ainsi de suite jusqu'à la mort. Car, même morts, on est séparés : les chrétiens dans des cimetières chrétiens, les musulmans dans des cimetières musulmans, et les juifs dans des cimetières juifs.

Et ce mépris pour les femmes qui gagne tous les jours du terrain... Comme disait mon fils, quand il avait 10 ans : "Ce serait joli, s'il n'y avait que des femmes." Les tribus gitanes et tziganes sont des sociétés matriarcales. Les femmes prennent les décisions importantes, tout leur appartient, et les enfants portent leur nom...

Il est interdit d'offrir des fleurs car il faut les couper. Le mot "lendemain" n'existe pas. Notre langue, qui vient du nord de l'Inde, n'est pas verbeuse, elle va à l'essentiel. Souvent, un mot désigne plusieurs choses. Par exemple, "police" et "diable", c'est le même mot ; et "ciel", "donner" et "Dieu", c'est aussi le même mot. Nous avons une médecine qui guérit des maladies que la médecine officielle ne guérit pas. Cette culture s'est construite dans le vent, sur des chemins pierreux, loin des modes et du confort des villes.

Depuis quelques mois, les responsables politiques européens s'intéressent à notre sort, bien que nous soyons plusieurs millions en Europe. Personne ne nous demandera notre avis et, de plus, la présidence hongroise de l'Europe pour les six mois tombe mal car les responsables politiques hongrois nous détestent.

Mettre un Gitan ou un Tzigane dans une maison ou un appartement est une aberration. Quand le sinistre président roumain Ceausescu a mis de force les Tziganes dans des appartements, les Roumains, qui ont de l'humour, disaient en parlant de nous : "Ces gens sont bizarres : ils mettent les chevaux dans les appartements, et eux, ils vivent dehors !"

Beaucoup d'hommes et de femmes à travers le monde se soucient des tribus indiennes en Amazonie. Qui se soucie des tribus indiennes en Europe ? Notre peuple est originaire de ce "pays continent".

Il y a un problème humain à résoudre et, pour le résoudre, les gens qui gouvernent nomment des hommes dont les qualités humaines sont atrophiées, voire inexistantes. Sur cette lancée, on devrait demander au ferrailleur d'accoucher les femmes, et recruter des gars dans les écoles de flamenco pour faire la guerre.

Je ne suis pas loin de penser que, dans ce pays, tout est mal fait ! L'attaque sauvage que le pouvoir a lancée cet été sur les campements tziganes n'a pas de lien avec le nazisme, mais elle a un lien avec l'affaire Dreyfus car, si ce jeune capitaine n'avait pas été juif, il ne se serait rien passé. Si les campements délabrés avaient été occupés par des Anglais, des Allemands, des Italiens ou des Suisses, il n'y aurait pas eu d'attaque. Une fois de plus, le pouvoir se trompe. Mal informé, il pense que, demain, 500 000 Tziganes de l'Est viendront s'installer en France. Il a oublié que nous sommes des nomades et que ceux d'entre nous qui ont résisté à la sédentarisation tourneront dans toute l'Europe.

Ces responsables ont un souhait : la mixité sociale dans les aires de stationnement qui nous sont réservées, toujours entre la décharge municipale et l'autoroute. Elle est où, la mixité sociale ? Et quand l'aire de stationnement existe, c'est dans la loi, il est interdit d'aller sur le terrain vague d'à côté.

Nous ne voulons pas être parqués, nous refusons les cases, nous voulons rester dans le nomadisme. C'est déjà bien assez de vivre dans un océan de lois. On refuse de vivre entre des murs, on veut sentir le vent, voir des paysages à perte de vue, faire de la musique autour d'un feu toute la nuit. Quel mal y a-t-il ? Ce que ma communauté a vécu cet été a touché le cirque Romanès. Le pouvoir nous dit qu'il n'y a pas de lien, mais comme les accusations ne reposent sur rien de sérieux, nous sommes bien obligés de penser que le lien existe. Plusieurs personnalités du spectacle et de la politique sont intervenues, mais ça ne change rien. Faut-il se mettre à genoux pour être entendus ?

(…)

Les recueils de poésie qui paraissent en France seraient-ils plus mauvais que les romans ? Comme l'écrit un poète tzigane dont j'ai oublié le nom, la plupart des romans sont moins utiles qu'un cure-dents. Il y a actuellement en France une dizaine de poètes remarquables, notamment la poétesse Lydie Dattas. Malgré plusieurs publications au Mercure de France et chez Gallimard, elle demeure inconnue. Elle vient de publier un livre magnifique qui s'appelle La Foudre (Mercure de France). Quand elle sera morte, on découvrira une poétesse au niveau de Corneille et de Racine...

Dans ce pays, les grands moyens d'information existent, mais ils sont asphyxiés par l'Audimat, le politiquement correct, le vedettariat et les débiles mentaux. L'immense poète Jean Grosjean n'a jamais eu une heure de télévision. Mais des crétins qui se disent écrivains ont des centaines d'heures. On vient de fêter le centenaire de la naissance d'un autre grand poète, Jean Genet. Heureusement, France Culture lui a consacré plusieurs émissions et Laure Adler l'a royalement servi. Mais pour des raisons obscures, les médias font comme si ce poète n'avait jamais existé. On entend régulièrement des médiocres dire : "Il n'y a plus d'artistes en France." Si le milieu artistique se résume à ce que nous montrent les chaînes de télévision, effectivement, il n'y a pas grand-chose.

La Bible dit : "Au commencement était le Verbe." Pour les tribus tziganes et gitanes et pour les poètes, il n'y a pas de commencement.

 Alexandre Romanès

* Luthiste baroque, poète et directeur de cirque
Né en 1951, Alexandre Romanès est issu d'une grande famille du cirque, dont il s'éloigne à l'âge de 25 ans afin de retrouver la culture gitane. Poète salué par Jean Grosjean ou Christian Bobin, il a publié, aux éditions Gallimard, "Paroles perdues" (2004) et "Sur l'épaule de l'ange" (2010). Il dirige le Cirque tsigane, composé de Gitans et accompagné d'un orchestre venu des Balkans.

22/08/2012

Aubry, les Rroms, le Nord-Pas de Calais...

COMMUNIQUE APRES LA RENCONTRE DE LA LDH AVEC MARTINE AUBRY

«La LDH a participé au sein de la délégation du collectif Roms à la rencontre du 20 août avec Martine Aubry, présidente de la Communauté urbaine de Lille. Elle y a réexprimé sa condamnation ferme du démantèlement sans relogement des campements de Villeneuve d’Ascq et notamment de la Friche d’Hellemmes.

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Stes-Maries-de-la-Mer
Ferdinando Scianna - Magnum

La LDH a entendu les explications de Martine Aubry assumant les démantèlements mais regrettant que les Préfectures n’aient pas organisé les relogements hors de la Communauté urbaine. La LDH estime que cette explication marque pour le moins les dysfonctionnements du pouvoir entre ministre, préfets, partis de gouvernement, élus…

Martine Aubry a répondu favorablement aux demandes relatives à la tenue d’une conférence régionale en octobre et à la levée des mesures transitoires concernant le travail des Roms.

Sur la situation actuelle dans la Métropole lilloise, elle s’est engagée à trouver rapidement avec le Préfet de Région une solution digne pour les 200 personnes de ND des Victoires et de Villeneuve d’Ascq. Elle a précisé quelques points sur l’accueil de 1500 Roms sur la Communauté urbaine de Lille et affirmé que la France et la Région avaient les moyens d’accueillir dignement les Roms actuellement présents.

La LDH a enregistré ces engagements.

Consciente qu’il n’existe pas de solution digne pour les Roms en dehors de l’engagement du Conseil Régional, des Préfectures, des Conseils Généraux et de l’ensemble des Communautés d’agglomération, la Délégation Régionale de la LDH suivra avec vigilance la réalisation des promesses exprimées par la Présidente de LMCU.

Comme elle l’a fait dans le passé et notamment lors de la dernière crise, elle donnera son opinion, ses critiques et ses suggestions à chaque étape d’une réalisation qu’elle souhaite rapide et sans traumatisme pour les Roms.»                                 

Lille, le 21 août 2012

Gérard Minet, Délégué Régional de la LDH
Délégation régionale Nord-Pas de Calais
5 rue de Saint-Omer 59 000 Lille

Valls peut-il se sentir concerné ?

En a -t-il l'intention, les moyens ?... N'aurait-il rien d'autre à faire ?...

A moins de vouloir donner des gages à un électorat xénophobe, comment un individu, fut-il ministre, peut-il un jour défendre l'honneur perdu d'un forniqueur compulsif qu'il présume innocent, et s'acharner le lendemain, à grands coups d'arguties absurdes qui relèvent de l’hypocrisie autant que de la mauvaise foi, sur des personnes dont le seul crime est d’être Rrom et sans défense.

En novembre 1996, la franchise d’Albert Jacquard avait fini par donner lieu à une décision de justice reconnaissant la primauté de la conscience individuelle sur le droit positif.

Le syndicat Alliance avait fait assigner Albert Jacquard, en raison de propos qu’il avait tenus à la télévision au cours de l’émission "les Quatre vérités" sur France 2. En effet, commentant l’évacuation de l’Eglise Saint-Bernard par les forces de l’ordre, le 23 août 1996, Albert Jacquard avait notamment déclaré :

« Donc j’espère que Monsieur Xavier Emmanuelli démissionnera dans la journée et que d’autres ministres, tous ceux qui ont vraiment à coeur l’honneur de la France, démissionneront. Il faut leur rappeler ce qui s’est passé en 43, en 43 aussi le gouvernement de Pétain appliquait la loi... »

« C’est mon devoir de Français et aujourd’hui [...] c’est le devoir de tous les Français d’aller à Saint-Bernard pour dire non et c’est même le devoir des forces de l’ordre. Sinon elles vont avoir exactement la même attitude que les flics français quand ils sont allés au Vel d’Hiv. »

Le syndicat de policiers avait considéré que ces propos étaient « constitutifs du délit d’outrage envers une personne dépositaire de l’autorité publique » et « du délit de diffamation publique envers des fonctionnaires publics », estimant que « le fait de comparer l’intervention des fonctionnaires de police chargés de l’évacuation de l’église Saint-Bernard à la rafle du Vel d’Hiv est outrageant et infamant à leur égard ».

Devant le tribunal, Albert Jacquard, représenté par Me Jean-Jacques de Félice, a exposé que ses propos ne pouvaient être considérés comme fautifs, « s’agissant d’un appel au respect d’obligations inscrites dans la Déclaration des Droits de l’Homme, dans la Constitution ou dans la Convention Européenne des Droits de l’Homme. »

Le TGI de Paris a débouté par un jugement du 5 novembre 1997 le syndicat Alliance de toutes ses demandes, avec les attendus suivants :

« En s’adressant aux forces de l’ordre public, en les appelant à la désobéissance et en comparant, au cas où il ne serait pas entendu, leur attitude à celle qu’ont eue les “flics” français quant ils sont allés au Vel d’Hiv, Albert Jacquard, dans une objurgation qui ne comporte en elle-même aucune connotation péjorative, ni termes de mépris ou d’injure à l’égard de leur fonction, et qui s’inscrit manifestement dans une critique des actes de l’autorité publique, les a invités, selon les convictions personnelles qui sont les siennes, à une prise de conscience qui lui paraissait conforme à ce qu’il estime devoir être l’ honneur de leur profession ; »

« Quelqu’excessive que puisse être ressentie par ceux auxquels elle s’adresse la comparaison avec l’attitude de leurs prédécesseurs dans les mêmes fonctions durant la période de l’occupation, ces propos, se référant explicitement, dans un contexte politique, à un devoir qui, selon leur auteur, s’impose à tous lorsque les circonstances font apparaître une contradiction entre le droit positif et la conscience individuelle, ne sont pas de nature à porter atteinte à la dignité ou au respect des membres de la profession en cause ; »

Le jugement a été confirmé en appel le 21 mai 1999.

16/08/2012

L'urgence

 

La pensée des philosophes est parfois inaccessible dans l’instant. C’est lorsqu’elle devient intelligible, qu’elle passe dans le domaine public, qu’il risque d’être trop tard, qu’il faut accélérer le mouvement en réaction.

Deleuze, néo-fascisme« Le vieux fascisme si actuel et puissant qu’il soit dans beaucoup de pays, n’est pas le nouveau problème actuel. On nous prépare d’autres fascismes. Tout un néo-fascisme s’installe par rapport auquel l’ancien fascisme fait figure de folklore […]. Au lieu d’être une politique et une économie de guerre, le néo-fascisme est une entente mondiale pour la sécurité, pour la gestion d’une « paix » non moins terrible, avec organisation concertée de toutes les petites peurs, de toutes les petites angoisses qui font de nous autant de microfascistes, chargés d’étouffer chaque chose, chaque visage, chaque parole un peu forte, dans sa rue, son quartier, sa salle de cinéma. » 

Gilles Deleuze, février 1977, Deux régimes de fous – Textes et entretiens 1975 – 1995, Les éditions de Minuit, 2003.

15/08/2012

Qui est de trop ?

Le 14 oct. 2010 Tony Gatlif était interviewé sur euronewsfr :

… Rien n’a changé, et c’est encore plus écœurant avec ce gouvernement là !

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«

A Lyon, le mardi 14 août 2012 : Expulsions sans relogement, retours contraints ...

L'ÉTAT POURSUIT AU COEUR DE L'ÉTÉ UNE POLITIQUE DISCRIMINANTE

Il y a un mois, la Fédération du Rhône de la Ligue des Droits de l'Homme communiquait déjà les expulsions de squats de Rroms, sans solution de relogement.

Aujourd'hui, en plein cœur d'août, la Fédération du Rhône de la Ligue des Droits de l'Homme doit faire l'amer constat de la continuité d’une politique discriminatoire qui montre du doigt cette population rrom, déjà malmenée sous le précédent gouvernement, une politique qui continue à les mettre en danger.

L’expulsion ce matin du 63 rue Montesquieu, qui n’avait pas eu lieu le 10 août comme nous en avions été informés, est une preuve de plus de l’acharnement voulu contre cette population. Après l’espoir du respect du à ces habitants le couperet vengeur est tombé. Les associations actives sur le terrain sont débordées par l’ampleur de la tâche.

L’expérience de terrain démontre qu’une telle politique est absurde et inopérante. Inopérante pour plusieurs raisons :

- Les déplacements forcés incessants des populations ont des conséquences humaines dramatiques, avec une absence de scolarité durable alors qu’il y a là un enjeu majeur pour l’intégration, des conditions d’hygiène et de vie déplorables, des difficultés de soins,…

- Le renvoi en Roumanie, sur la base d’un pseudo-volontariat, est inefficace, car la très grande majorité des gens revient ; cela coûte cher pour une absence de résultat réel, avec cet argent gaspillé, d’autres projets pourraient-être envisagés.

- La plupart des Rroms ainsi expulsés à grands renforts médiatiques sont déterminés à rester en France et la plupart ne sont pas expulsables.

Malgré les déclarations du ministre de l'Intérieur, ces expulsions médiatisées signent la poursuite d'une logique de discrimination. Les Rroms continuent à servir de variable d'ajustement à une politique qui confond consciemment « immigration » et « insécurité ».

Ces Rroms, pour le plus grand nombre, sont membres de l’Union européenne. Ils ont leur place ici au même titre que les autres membres de la communauté européenne.

La Fédération du Rhône de la Ligue des Droits de l'Homme, présente sur les multiples expulsions pratiquées sur le Grand Lyon ces derniers jours, travaille en lien étroit avec les autres associations concernées et cherche à trouver des solutions au drame que vivent ces familles pourchassées jusque sur le trottoir.

Une autre politique doit être demandée aux Préfets. La réponse à Romeurope du candidat François HOLLANDE, aujourd'hui président de la République, du 22 février 2012, doit servir de feuille de route. Les engagements pour une nouvelle politique vis-à-vis des Rroms y sont clairs. Les citoyens français, les associations engagées auprès d’eux attendent cela d’un gouvernement socialiste.

Le président fédéral de Ligue des Droits de l'Homme
Contact presse : Jacques DUMORTIER,
Délégué fédéral « Rroms » et « Gens du Voyage »
06 10 36 83 54

»

Que celui qui est de trop s'en aille !

30/07/2012

Envers et contre Coubertin

Limiter les performances sportives à ce qu’elles montrent c’est ignorer tout ce qu’elles escamotent ne serait-ce que dans leur propre secteur qui, au contraire de ce qu’il prétend, est loin de toucher à l’universel. Sans doute le jeu en vaut-il la chandelle et le non temps consacré au décervelage, l’anesthésie populiste.

Il est par exemple, peu probable que les jeux et enjeux des JO de Londres 2012 soient choisis comme l’occasion de révéler au grand nombre d’individus qui les suivent la face caché du triste baron Pierre de Coubertin...

Très influencé par quelques auteurs comme Francis Galton (1822-1911) naturaliste britannique, fondateur de l'eugénisme qui s'efforça toute sa vie de démontrer l'inégalité des races humaines ou Joseph Arthur de Gobineau, (1816-1882) l'un des inspirateur du caractère raciste de l'idéologie nazie (Essai sur l'inégalité des races humaines), Coubertin ne cacha pas de son vivant, ses idées ouvertement racistes et misogynes.

En 1894, Coubertin (1863-1937) rassemble autour de lui des représentants de 12 pays : l'objectif est de ressusciter les jeux olympiques antiques. Ils auront lieu deux ans plus tard à Athènes. Pour Coubertin, il s'agit de manifester aux yeux du monde la supériorité de l'occident, et surtout de prouver dans le cadre des jeux, la perfection de "l'homme blanc", autant sur le plan physique que spirituel.

Jesse Owens, JO 2012Pour Coubertin, la beauté des corps répondant à l'antique esthétique des athlètes grecs ne peut se retrouver que chez des compétiteurs Européens. Cette supposée perfection européenne doit donc se manifester clairement par une supériorité en terme de performances, cela au détriment des autres "races" considérées comme inférieures.

Resserrement du cadre idéologique proposé par le baron pour une "renaissance" des jeux Olympiques modernes :

Les femmes interdites d'accès, les "Nègres", Indiens et autres "métèques" tolérés dans le rôle de faire valoir. On retiendra d'ailleurs que pour la troisième olympiade de 1904 à St Louis au Etats-Unis, les compétitions furent organisées séparément, ceci en fonction de la "race" des compétiteurs. Les organisateurs Américains considéraient en effet les Pygmées, Turcs, Syriens et autres Sioux comme des trublions exotiques, indignes d'être comparés à la fine fleur de l'athlétisme.

Quant à Coubertin, malgré le succès grandissant des J.O. modernes, il ne cesse de tempêter contre le laxisme ethnique des jeux et surtout l'éventuelle participation des femmes aux Olympiades.
" Une olympiade femelle serait impratique, inintéressante, inesthétique et incorrecte. Le véritable héros olympique est, à mes yeux, l'adulte mâle individuel. Les Jeux Olympiques doivent être réservés aux hommes, le rôle des femmes devrait être avant tout de couronner les vainqueurs."

Pour lui, la revendication d'une participation féminine était ressentie comme un affront majeur à la grandeur et à la pureté originelle de cette compétition. Néanmoins, la pression grandissante des mouvements féministes au cours des années 1920 finira par abattre la réglementation misogyne du comité international olympique, si bien qu'en 1928, aux jeux d'Amsterdam, (contre l'avis de Coubertin bien sûr !) les femmes, au nombre de 290, font leur entrée remarquée aux épreuves d'athlétisme.

Écœuré, Coubertin s'éloigne du comité Olympique international dont il a démissionné de la présidence en 1925, pour se rapprocher de celui de l'Allemagne, qui selon lui, est plus proche de l'idéal Olympique.
Coubertin était donc loin d'être le philanthrope que l’on nous vend.

Mais alors, pourquoi vouloir faire croire le contraire ?...

Autres citations (quelques unes) et anecdote :

  • "À la race blanche, d'essence supérieure, toutes les autres doivent faire allégeance".   
  • "Il y a deux races distinctes : celles au regard franc, aux muscles forts, à la démarche assurée et celle des maladifs, à la mine résignée et humble, à l'air vaincu. Hé bien ! C'est dans les collèges comme dans le monde : les faibles sont écartés, le bénéfice de cette éducation n'est appréciable qu'aux forts." (In "Education anglaise")
  • "La théorie de l'égalité des droits pour toutes les races humaines, conduit à une ligne politique contraire à tout progrès colonial. Sans naturellement (sic) s'abaisser, à l'esclavage ou même à une forme adoucie du servage, la race supérieure attribue ( ?) à la race inférieure certains privilèges de la vie civilisée." (In The review of the reviews avril 1901).
  • Anecdote : Coubertin n'est pas l'auteur de la formule «l'important n'est pas de vaincre mais de participer". Celle-ci a été prononcée par Ethelbert Talbot, évêque de Pennsylvanie à Londres avant le début des jeux de 1908.

Une grande partie du texte qui précède est issue de la version censurée par wikipédia en 2005 (sauvegardée en page de discussion et signée EC).

24/07/2012

Rafle du Vél d'Hiv

Pendant que l’on s’écharpe ici et là sur le bien fondé et les approximations formelles d’un discours présidentiel en commémoration de la rafle du Vel’d’Hiv (réf. et annexes), il est surprenant que nous ne soyons toujours pas en mesure d’utiliser ce qui constitue la substance et le sens de cette mémoire pour éviter de nous enfoncer dans la négation de l’Autre.

Vel d'Hiv, commémoration 2012

Si l’on ne retient de l’Histoire que sa chronologie circonstanciée comment pourra-t-on à en tirer une leçon de portée universelle ?

Car il s’agit bien de dépasser la chronologie des faits, aussi nécessaire et exacte puisse-t-elle être : ce à quoi, visiblement englués dans la polémique du jour, nous ne sommes pas parvenus.
Dans le cas contraire, nous n’aurions pas à plaider pour réhabiliter la philosophie, la conscience de l'Autre (j’insiste pour la majuscule) ou le simple fait de penser (de préférence sans les médias qui font profession de le faire à notre place).
Du devoir de mémoire, nous aurions alors fait œuvre utile envers et contre tout négationnisme et l’aurions même fait reculer. Ce qui malheureusement, pourrait-on en convenir, n’est pas vraiment le cas.

23/07/2012

Surf humanitaire

Note de lecture : Défendre les droits de l’homme n’a jamais autant nécessité de s’engager à défendre les droits économiques, culturels et sociaux.

La charité militante a jusqu’ici consisté à donner quelques miettes aux plus déshérités pour aboutir, sans que les militants eux-mêmes en aient vraiment conscience, à ce que les plus faibles restent à leur place ou disparaissent ou remercient.

"Donner, c'est manifester sa supériorité, ... ; accepter sans rendre ou sans rendre plus, c'est se subordonner..."
dixit Marcel Mauss, auteur d’un essai sur le don , dans « Sociologie et anthropologie ».

Or la charité est une relation émotionnelle et dissymétrique - à sens unique - très peu susceptible de « remettre l’humain » à la place centrale qu’il doit occuper, la charité ne maintenant l'ordre social qu’en son état inégalitaire alors que défendre les Droits de l’Homme nécessiterait de modifier cet ordre, ce système.

Existent évidemment des situations d'urgence - famines, guerre, accidents, catastrophes écologiques, tracasseries administratives et/ou policières -, conséquences de la gestion irrationnelle de notre monde, où l'intervention "humanitaire", caritative, permet de sauver des vies, d'alléger les souffrances, de rassurer et d’entourer momentanément des victimes plus ou moins isolées. Mais cela ne permet en aucun cas de résoudre les problèmes de fond qui sous-tendent ces situations et d'empêcher leur répétition à l’infini.

surf humanitaire, essai sur le don, droits de l'homme

Mieux, cela dédouane, supplée et finit par cautionner les politiques de gestion forcément insuffisantes en matière de défense des droits humains. (Voir note précédente)

A moins de croire que la théorie du don, frappé d’i-réciprocité par le système néolibéral, permette de rendre « viable » l’ordre du monde, « l’humanitaire » risque de ne satisfaire que ses adeptes et militants, sous couvert de panser à l’emplâtre les atteintes faites au corps social.

Une façon toute sociale-démocrate d’éviter d’en affronter vraiment les causes, la racine, et de surfer sur l’humanitaire, l’écorce.

Au surplus, d'après la « Chronique de l’intolérable du quinquennat du successeur de Nicolas Sarkozy », « ce qui était inacceptable sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy le reste sous celui de son successeur. » Réseau Éducation Sans Frontières.

 

 

08/07/2012

La rigueur, c'est pas sérieux

Le mot "rigueur" est donc une grossièreté à éviter. A tout prix. Et c’est bien pourquoi il faut lui préférer celui de "sérieux", même si de tous les antonymes de la litote « assumée » (dire moins pour suggérer plus) certains peuvent avoir un sens proche de la réalité : absurde.

Par exemple :

Sachant qu'un rapport du sénat de 2009 évalue le coût d’une expulsion à 20 970 € par personne...

En annonçant qu’il excluait d'aller  au-delà des quelque 30000 régularisations annuelles décidées sous le gouvernement Fillon, Manuel Valls laisse entendre qu’il en expulsera autant. Au moins ?  Guéant, allez savoir pourquoi, rêvait de 40 000 expulsions l’an.

Sur cette base, et si l’on en croit les sénateurs qui se sont donc penché sur la question, l’ensemble des contribuables devra dépenser 839 Millions d’euros compte non tenu des hausses tarifaires intervenues depuis 2009 !

De quoi faire des jaloux et aviver les aigreurs d’autant que ces expulsions touchent en priorité les citoyens roumains, malheureusement choisis comme bouc-émissaires, et qui, faisant partie intégrante de l’Union européenne, peuvent aller et venir dans cet espace, à leur gré ou presque.

La logique -- rigoureuse - voudrait qu’a minima des solutions de logement alternatif leurs soient proposées en lieu et place de ces expulsions qui ne disent pas leur nom, qui attisent les ressentiments, accentuent l’in-sécurisation généralisée et finissent par "peser" sur Bercy.

C’est en tout cas ce qui ressort de la demande faite par le Collectif national droits de l’Homme Romeurope au 1er ministre.

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Mais dans les ministères, on préfère au mot « expulsion » celui d’« ARH » (aide au retour humanitaire), nettement plus "gratifiant" puisque « l’aide au retour humanitaire est attribuée aux étrangers en situation de dénuement et de grande précarité séjournant en France depuis au moins trois mois ». (Cette aide consiste à offrir un billet d’avion et un petit pécule - 300 € par adulte et 100 € par enfant - à des personnes en situation de détresse présentes depuis au moins 3 mois en France. Ce qui équivaut, bon an mal an et au final à ces 839 M d’€.)  

Une manne pour qui veut se donner la peine d’organiser des navettes !

En fait, et dans le cas des Roms, l’ARH est une façon, très « sérieuse », de vider leur camps sans attendre que les tribunaux aient pris de temps de délibérer et de contourner la condamnation dont la France a écopé par décision du Conseil de l’Europe, lequel a dénoncé une violation du droit au logement et exigé des garanties relatives à l'expulsion inscrites dans la Charte sociale européenne.

Mise à jour du 9 juillet 2012

02/07/2012

Le manifeste censuré de Camus

Dans une note précédente, un communiqué de la section LDH d’Aix en Provence faisait état de « réticences » culturelles associées à des « complaisances » honteuses elles-mêmes liées à un devoir de mémoire non assumé de la part du maire de cette ville.
Résultat : un imbroglio sciemment orchestré qui a été à l’origine de difficultés éprouvées par les organisateurs d’une exposition consacrée à Albert Camus dans le cadre de Marseille-Provence capitale européenne de la culture 2013.

A la veille de commémorer l’anniversaire de l’indépendance de l’Algérie - 5 juillet 1962 -, les rancœurs des tenants de l’Algérie Française ressurgissent encore aujourd’hui et illustrent l'origine de la censure dont a été victime Camus autant que la cause anticoloniale et pacifiste dont il a voulu faire bénéficier ses semblables en Algérie comme en France.

On sait en effet qu’en 1939, l’auteur de La Chute a publié, dans divers journaux, des articles dénonçant la politique de répression contre les nationalistes algériens et l’étouffement de toutes les revendications du PPA (Parti du peuple algérien). Certains d'entre eux ont été censurés.

A propos de cette censure, un inédit de Camus a été exhumé des Archives Nationales d’Outre-Mer, lesquelles - coïncidence - se trouvent à Aix-en-Provence.

manifeste censuré d'Albert Camus

Ce texte traite de la liberté de la presse, du rôle du « journaliste libre », de la désinformation qui existait déjà, et qui est encore, très largement, mise en évidence sur la scène médiatique pour qui veut se donner la peine de s'y soustraire.

« 

Il est difficile aujourd’hui d’évoquer la liberté de la presse sans être taxé d’extravagance, accusé d’être Mata-Hari, de se voir convaincre d’être le neveu de Staline.

Pourtant cette liberté parmi d’autres n’est qu’un des visages de la liberté tout court et l’on comprendra notre obstination à la défendre si l’on veut bien admettre qu’il n’y a point d’autre façon de gagner réellement la guerre.

Certes, toute liberté a ses limites. Encore faut-il qu’elles soient librement reconnues. Sur les obstacles qui sont apportés aujourd’hui à la liberté de pensée, nous avons d’ailleurs dit tout ce que nous avons pu dire et nous dirons encore, et à satiété, tout ce qu’il nous sera possible de dire. En particulier, nous ne nous étonnerons jamais assez, le principe de la censure une fois imposé, que la reproduction des textes publiés en France et visés par les censeurs métropolitains soit interdite au Soir républicain, par exemple. Le fait qu’à cet égard un journal dépend de l’humeur ou de la compétence d’un homme démontre mieux qu’autre chose le degré d’inconscience où nous sommes parvenus.

Un des bons préceptes d’une philosophie digne de ce nom est de ne jamais se répandre en lamentations inutiles en face d’un état de fait qui ne peut plus être évité. La question en France n’est plus aujourd’hui de savoir comment préserver les libertés de la presse. Elle est de chercher comment, en face de la suppression de ces libertés, un journaliste peut rester libre. Le problème n’intéresse plus la collectivité. Il concerne l’individu.

Et justement ce qu’il nous plairait de définir ici, ce sont les conditions et les moyens par lesquels, au sein même de la guerre et de ses servitudes, la liberté peut être, non seulement préservée, mais encore manifestée.

Ces moyens sont au nombre de quatre : la lucidité, le refus, l’ironie et l’obstination.

La lucidité suppose la résistance aux entraînements de la haine et au culte de la fatalité. Dans le monde de notre expérience, il est certain que tout peut être évité. La guerre elle-même, qui est un phénomène humain, peut être à tous les moments évitée ou arrêtée par des moyens humains. Il suffit de connaître l’histoire des dernières années de la politique européenne pour être certains que la guerre, quelle qu’elle soit, a des causes évidentes. Cette vue claire des choses exclut la haine aveugle et le désespoir qui laisse faire. Un journaliste libre, en 1939, ne désespère pas et lutte pour ce qu’il croit vrai comme si son action pouvait
influer sur le cours des événements. Il ne publie rien qui puisse exciter à la haine ou provoquer le désespoir. Tout cela est en son pouvoir.

En face de la marée montante de la bêtise, il est nécessaire également d’opposer quelques refus. Toutes les contraintes du monde ne feront pas qu’un esprit un peu propre accepte d’être malhonnête. Or, et pour peu qu’on connaisse le mécanisme des informations, il est facile de s’assurer de l’authenticité d’une nouvelle. C’est à cela qu’un journaliste libre doit donner toute son attention. Car, s’il ne peut dire tout ce qu’il pense, il lui est possible de ne pas dire ce qu’il ne pense pas ou qu’il croit faux. Et c’est ainsi qu’un journal libre se mesure autant à ce qu’il dit qu’à ce qu’il ne dit pas. Cette liberté toute négative est, de loin, la plus importante de toutes, si l’on sait la maintenir. Car elle prépare l’avènement de la vraie liberté. En conséquence, un journal indépendant donne l’origine de ses informations, aide le public à les évaluer, répudie le bourrage de crâne, supprime les invectives, pallie par des commentaires l’uniformisation des informations et, en bref, sert la vérité dans la mesure humaine de ses forces. Cette mesure, si relative qu’elle soit, lui permet du moins de refuser ce qu’aucune force au monde ne pourrait lui faire accepter : servile mensonge.

Nous en venons ainsi à l’ironie. On peut poser en principe qu’un esprit qui a le goût et les moyens d’imposer la contrainte est imperméable à l’ironie. On ne voit pas Hitler, pour ne prendre qu’un exemple parmi d’autres, utiliser l’ironie socratique. Il reste donc que l’ironie demeure une arme sans précédent contre les trop puissants. Elle complète le refus en ce sens qu’elle permet, non plus de rejeter ce qui est faux, mais de dire souvent ce qui est vrai. Un journaliste libre, en 1939, ne se fait pas trop d’illusions sur l’intelligence de ceux qui l’oppriment. Il est pessimiste en ce qui regarde l’homme. Une vérité énoncée sur un ton dogmatique est censurée neuf fois sur dix. La même vérité dite plaisamment ne l’est que cinq fois sur dix. Cette disposition figure assez exactement les possibilités de l’intelligence humaine. Elle explique également que des journaux français comme Le Merle ou Le Canard enchaîné puissent publier régulièrement les courageux articles que l’on sait. Un journaliste libre, en 1939, est donc nécessairement ironique, encore que ce soit souvent à son corps défendant. Mais la vérité et la liberté sont des maîtresses exigeantes puisqu’elles ont peu d’amants.

Cette attitude d’esprit brièvement définie, il est évident qu’elle ne saurait se soutenir efficacement sans un minimum d’obstination. Bien des obstacles sont mis à la liberté d’expression. Ce ne sont pas les plus sévères qui peuvent décourager un esprit. Car les menaces, les suspensions, les poursuites obtiennent généralement en France l’effet contraire à celui qu’on se propose. Mais il faut convenir qu’il est des obstacles décourageants : la constance dans la sottise, la veulerie organisée, l’inintelligence agressive, et nous en passons. Là est le grand obstacle dont il faut triompher. L’obstination est ici vertu cardinale. Par un paradoxe curieux mais évident, elle se met alors au service de l’objectivité et de la tolérance.

Voici donc un ensemble de règles pour préserver la liberté jusqu’au sein de la servitude. Et après ?, dira-t-on. Après ? Ne soyons pas trop pressés. Si seulement chaque Français voulait bien maintenir dans sa sphère tout ce qu’il croit vrai et juste, s’il voulait aider pour sa faible part au maintien de la liberté, résister à l’abandon et faire connaître sa volonté, alors et alors seulement cette guerre serait gagnée, au sens profond du mot.

Oui, c’est souvent à son corps défendant qu’un esprit libre de ce siècle fait sentir son ironie. Que trouver de plaisant dans ce monde enflammé ? Mais la vertu de l’homme est de se maintenir en face de tout ce qui le nie. Personne ne veut recommencer dans vingt-cinq ans la double expérience de 1914 et de 1939. Il faut donc essayer une méthode encore toute nouvelle qui serait la justice et la générosité. Mais celles-ci ne s’expriment que dans des cœurs déjà libres et dans les esprits encore clairvoyants. Former ces cœurs et ces esprits, les réveiller plutôt, c’est la tâche à la fois modeste et ambitieuse qui revient à l’homme indépendant. Il faut s’y tenir sans voir plus avant. L’histoire tiendra ou ne tiendra pas compte de ces efforts. Mais ils auront été faits. 

»

27/06/2012

Mikis Théodorakis, antisémite ?!!!

Parmi les faits, très rares, dont les prédécesseurs du gouvernement Ayrault peuvent se vanter, il en est un qui ne devrait pas passer inaperçu : avoir élevé Mikis Théodorakis au rang de commandeur de la Légion d’Honneur.

Jean-François Copé, Alain Juppé et Nathalie Kosciusko-Morizet, n’ont cependant pas hésité à son sujet, à avancer quelques contrevérités qui les rendent clairement coupables de diffamation:

  1. Mikis Théodorakis est antisémite
  2. Jean Luc Mélenchon est l’ami de Mikis Théodorakis
  3. Donc Jean Luc Mélenchon est antisémite

Le sophisme pourrait évidemment très facilement se retourner contre ses auteurs en changeant la seconde proposition par Jean-François Copé, Alain Juppé et Nathalie Kosciusko-Morizet ont décoré Mikis Théodorakis de la Légion d’Honneur, … donc Jean-François Copé, Alain Juppé et Nathalie Kosciusko-Morizet sont (ou décorent des) antisémites.

Autre élément de réflexion : JLM n’a jamais rencontré Mikis Théodorakis, ne serait-ce que le jour où il a reçu cette décoration, ce que l’on regrette mais que l’on ne saurait reproché au leader du FdG.

Mais la question n'est pas là et quoiqu’il en soit de cette polémique construite sans aucun égard pour les victimes juives de la Shoah, le compositeur grec leur a répondu ce qui suit :

«Je suis Grec et fier de l’être, car nous sommes le seul peuple en Europe qui, pendant l’occupation allemande (1941-1944), non seulement n’a pas exercé de poursuites contre les Juifs mais, au contraire, les a aidés à vivre et à survivre avec tous les moyens dont nous disposions.

À l’époque, J’étais moi-même partisan de l’Armée populaire de Libération et je me souviens que nous avions pris sous notre protection de nombreuses familles de Juifs Grecs, que nous nous sommes souvent battus contre les SS pour les sauver et beaucoup d’entre nous l’ont payé de leur vie.

Trilogie Mathausen, Théodorakis

Plus tard, j’ai composé le cycle “Mauthausen” que, notamment en Israël, l’on considère quasiment comme un hymne national. J’ai ressenti une des plus grandes émotions de ma vie quand, dans les années 80, il m’a été accordé de diriger cette œuvre sur le site du camp de concentration de Mauthausen, tout d’abord chantée en grec par sa première interprète, Maria Farantouri, puis en allemand par Gisela May et en hébreu par la chanteuse israélienne, Elinoar Moav. Je l’ai dirigée une fois encore sur ces lieux et, depuis lors, l’œuvre enregistrée est diffusée sans interruption sur le site du camp.

En 1972, j’ai bravé le boycottage européen et j’ai donné des dizaines de concerts en Israël, des moments que je qualifierais d’historiques en raison des liens d’amour mutuel qui nous unissaient.

À cette même époque, Yigal Allon, alors Vice-Premier ministre du gouvernement israélien et Ministre de l’Éducation et de la Culture, m’a confié une première mission, celle de transmettre un message de paix à Arafat au nom de son gouvernement. C’est dans cette intention que je l’ai rencontré à Beyrouth et, à cette occasion, j’ai donné une conférence de presse dans une salle. Un groupe de fanatiques Palestiniens avait décidé de m’abattre, car il me considérait comme un complice des Juifs. C’est Arafat lui-même qui me l’a dit le lendemain avec, à ses côtés… le groupe de mes assassins en puissance. Qu’est-ce qui m’a sauvé ? Mon amour authentique pour les deux peuples martyrs : les Juifs et les Palestiniens.

«Quand on t’a entendu pendant la conférence de presse», m’ont-ils dit, « on a compris que nous nous trompions». Qu’est-ce que j’avais dit au cours de la conférence de presse ? «Le conflit qui vous oppose ne sera pas résolu par les armes, mais par la compréhension mutuelle. De l’autre côté, il y a des hommes ordinaires qui vous ressemblent, simples et travailleurs, capables d’aimer et qui, comme vous, aiment leur famille et leur pays. C’est eux que vous devez trouver, parce que c’est avec eux que vous pourrez vivre dans la paix».

Arafat m’a dit : «Tu as chanté les Juifs et tu as eu raison, car eux aussi c’est un peuple tourmenté. Comme nous. Alors, s’il te plaît, écris une chanson pour nous aussi…». C’est ainsi que j’ai écrit aussi un chant pour le peuple palestinien qui est devenu son Hymne national.

Bien plus tard, à l’occasion de la remise du prix Nobel de la Paix à Rabin (Israël) et à Arafat (Palestine), l’orchestre symphonique d’Oslo avec, en soliste, l’interprète finlandaise Arja Saijonmaa a joué “Mauthausen” en hommage à Israël et le chant que j’avais composé, reconnu comme Hymne National, en l’honneur du peuple palestinien. Ce moment symbolique suffit à démontrer la place que j’occupe dans l’esprit et dans les cœurs des deux peuples.

Je suis souvent allé en Israël, en Palestine et au Liban et c’était chaque fois la paix, l’amitié, la coexistence et la coopération entre ces deux peuples martyrs qui occupaient mes pensées. En tant que Grec, je me sens proche d’eux, comme si nous appartenions à la même famille. Et pourtant, pour certains fanatiques d’un côté comme de l’autre, je suis la cape rouge agitée devant le taureau.. Pourquoi ? Parce que j’ai la franchise et le courage de dire la vérité et de la dire même dans la gueule du loup. Ainsi, quand je suis en Palestine je m’exprime ouvertement et publiquement contre les fanatiques qui me haïssent et, quand je suis en Israël, je fais de même en critiquant tout aussi ouvertement et publiquement les fanatiques qui, en raison de la diaspora juive présente dans tous les pays du monde, ont la possibilité de transformer leur haine en venin et en mensonges monstrueux.

Dans mon opéra «les Métamorphoses de Dionysos» (dont j’ai écrit aussi le livret), il y a une scène où des Juifs sont déportés par des SS dans des camps d’extermination. Il s’agit d’un moment crucial de l’œuvre, d’une condamnation du Nazisme qui dévoile d’une façon très humaine, l’affliction psychique et intellectuelle que je ressens devant les souffrances des Juifs.

D’ailleurs, la dénonciation du racisme et la défense de ses victimes ont guidé mes décisions et mes actes tout au long de ma vie. Une vie jalonnée de poursuites qui m’ont souvent poussé jusqu’au seuil de la mort.

Donc, me qualifier de raciste et d’antisémite n’est pas une simple calomnie, mais l’expression de la pire bassesse morale, issue le plus souvent de cercles proches d’organisations et d’individus opérant dans la mouvance du Néonazisme et auxquels la crise a permis de relever la tête pour nous menacer et –incroyable, mais vrai– nous accuser, eux, d’….antisémitisme en utilisant un arsenal de mensonges et de déclarations insidieuses!

Il suffit de dire, par erreur manifeste, dans une interview de trois heures «antisémite» au lieu de «antiraciste», et on s’empare d’une seule et unique phrase dont on isole un mot, brandi comme un étendard, tout simplement pour servir l’intention de m’incriminer. Combien d’années était-on aux aguets pour une simple erreur ? Le mot «antisémite» correspond-il vraiment à ce qui suit ? «J’aime le peuple juif avec lequel nous avons vécu et souffert en Grèce pendant des années et je hais l’antisémitisme». Je suppose que mes différents ennemis se sont bien gardés de citer ces paroles. Et pourtant, c’est EXACTEMENT la phrase qui suit. Ce n’est pas quelque chose que je viens d’inventer, après-coup, en guise d’alibi. Il en EST ainsi et il est facile de le prouver de façon incontestable en écoutant TOUTE la phrase, exactement comme je l’ai prononcée et non pas en la tronquant comme l’ont voulu mes adversaires.

Peut-être va-t-on se demander pourquoi et comment certains persistent à vouloir discréditer un ami si fidèle d’Israël et des Juifs et tentent de me faire passer à tout prix pour un antisémite. (De qui parle-t-on ? De quelqu’un qui a connu les sous-sols de la Gestapo pour les sauver !)…

Toutefois, la réponse est finalement simple : beaucoup de mes amis juifs sont d’accord avec moi. Certains sont d’accord avec moi,-même s’ils vivent en Israël, donc dans la tourmente quotidienne des évènements. Alors, si les simples citoyens du peuple d’Israël entendent mes idées, telles qu’elles sont réellement exprimées, ils « risqueraient » (selon mes ennemis, bien sûr) d’être d’accord avec moi, en pensant que la solution du problème ne se trouve pas dans la violence et les armes, mais dans la coexistence et la paix. Ce qui ne plaît pas du tout à mes adversaires car, bien sûr, j’ai –à plusieurs reprises– totalement désapprouvé la politique de l’État d’Israël et j’ai exprimé ce désaccord avec force et de la façon la plus claire et la plus catégorique (comme je fais toujours). Pour ne pas courir le risque que ces citoyens se rangent à mes opinions, ils ne doivent pas les entendre. Et quelle est la meilleure et la plus sûre façon de procéder pour arriver à ses fins ? Et bien, leur tactique habituelle : me coller «l’étiquette» d’antisémite, de sorte qu’aucun Juif, où qu’il se trouve, ne veuille plus entendre non seulement mes idées, mais même mon nom.

Et maintenant, particulièrement en France où brusquement on «s’est souvenu» d’une interview donnée il environ un an et demi, il existe -de toute évidence- une autre raison: porter atteinte à la Gauche. Leur prétendu «argument» (qui est totalement mensonger) est que son leader, M. Mélenchon me connaît et que, par conséquent…il a des amis antisémites ! Toutefois, la vérité –malheureusement pour eux– est évidente et je pense que tout homme animé de bonnes intentions peut s’en rendre compte.

Donc, même si après la lecture de ce qui précède, certains persistent encore à me faire passer pour quelqu’un que je n’ai jamais été et que, bien sûr, je ne suis pas, le doute n’est plus permis. Tout est fait sciemment pour servir d’autres finalités, car ma foi inébranlable dans la paix et la coexistence de ces deux peuples martyrs dérange plus d’un.»

Athènes, le 15 juin 2012
Mikis Théodorakis
mikis@mikistheodorakis.gr

26/06/2012

Droit d’asile (suite)

Il est hors de question d’accepter de la nouvelle présidence ce que l’on trouvait odieux sous l’ancienne, notamment en matière de défense des droits élémentaires.

D’où cette lettre adressée par le président national de la Ligue des Droits de l’Homme à J-M. AYRAULT, responsable du ministre de l’Intérieur.

Elle fait écho à la note précédente.

«

Monsieur Jean-Marc Ayrault
Premier ministre
Hôtel de Matignon
57, rue de Varenne
75700 Paris

Paris, le 19 juin 2012

Monsieur le Premier ministre,

Au long des dix dernières années, les étrangers ont été ramenés à un problème. Et ce supposé problème a fini par en poser un, bien réel, à la démocratie, en polluant profondément les termes du débat public et du contrat social.

C’est de cette situation idéologique dont il faut s’extraire, sous peine de graves périls. Car les rapports de la nation à ses minorités, à la présence d’étrangers sur son sol, ne sauraient être envisagés sous le seul signe de la peur et de la xénophobie, sauf à accepter une dangereuse altération du contrat républicain. En effet, faire de la question « étrangers » un en soi, c’est se condamner à être sommé d’accepter une grille de lecture binaire, « eux » et « nous », « pour » ou « contre ». Un simple retour sur la formation sociale française, une simple projection sur son avenir suffit à en montrer l'aberration. Mais, ni l’un, ni l’autre, ne peuvent suffire à trouver le chemin de l'apaisement pour faire pièce aux discours de haine, de peur et d’irrationalité tenus à l’égard des étrangers.

Reconstruire la confiance nécessite des décisions politiques, de la réflexion en amont de ces décisions et du temps pour cette réflexion. C’est pourquoi, nous pensons que la première des décisions devrait être celle qui ouvre la porte aux possibles raisonnés : un moratoire des expulsions. De fait, les OQTF et les CRA sont aujourd’hui les symboles détestés d’une politique condamnée pour son inhumanité. Ce moratoire permettrait l’apaisement, vaudrait engagement d'entamer une remise à plat et signerait le décès de la détestable politique du chiffre, responsable de drames humains et facteur de l’abaissement de l’image de la France dans le monde.

Ce moratoire permettrait aux Françaises et Français de débattre contradictoirement, et tranquillement, des mensonges qui ont fait tant de mal ; il réinscrirait notre réalité nationale dans la dimension la plus généreuse et la plus sage de son histoire. C’est ce que vous avez commencé à faire – et que nous avons apprécié – avec l'abrogation de la circulaire du 31 mai.

Sept orientations restrictives caractérisent les cinq années passées de politique des étrangers.

  1. • Depuis 2003, les successives réformes législatives en matière de droit d’asile ont privilégié des procédures accélérées pour l’examen des dossiers de réfugiés et l’octroi de la protection subsidiaire, au détriment d’une pleine application de la convention de Genève.
  2. • Les réformes du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et demandeurs d'asile (Ceseda) de 2003, 2006, 2007 et 2011, ont, chaque fois, réduit un peu plus les perspectives d’obtention d’un titre de séjour pour des étrangers résidant et travaillant dans notre pays, depuis de longues années parfois, avec des phénomènes de réaction en chaîne en matière de logement, par exemple, ou d'allocations.
  3. • Les conditions très restrictives d’octroi des visas entraînent des drames familiaux et personnels, en empêchant la réunion des familles, et poussent souvent les migrants à prendre de grands risques pour pouvoir quand même venir dans notre pays. Elles donnent, de plus, une image catastrophique de notre pays, notamment en raison des faits de corruption qui les accompagnent.
  4. • Les populations roms, essentiellement venues de Bulgarie et Roumanie, sont soumises à des conditions particulières de reconnaissance de leur citoyenneté européenne, et sont arrêtées, détenues, expulsées. L'amalgame fait avec les Gens du voyage révèle mépris et racisme, discriminations et inégalités.
  5. • L’enfermement des étrangers, en zone d’attente, à l’entrée du territoire (touristes, demandeurs d’asile, mineurs isolés...) et en centres de rétention (familles avec enfants, malades...) est devenu la règle, parfois au nom d’un arbitraire insupportable.
  6. • Alors que dans la majorité des pays européens, les résidents étrangers votent aux élections locales, en France l’exercice de la démocratie n'a pas été élargie, et le droit de vote et d’éligibilité continue à être strictement conditionné à la nationalité.
  7. • La naturalisation, présentée comme la réponse à toute intégration, s'est dramatiquement réduite dans son accès, au point qu'elle devient l’objet d’un véritable parcours du combattant.

DRoits civiques, libertés,

Pour rompre avec ces situations, il faut d’abord que cesse la mise à l’index des étrangers présentés comme des fraudeurs, dont l’existence porterait atteinte à la cohésion sociale.

Nous ne pouvons continuer cette thématique du « trop d’étrangers » qui non seulement désigne ce qui serait a priori un adversaire et un danger, mais constitue un déni de réalité.

Nous réclamons un débat public afin de mettre un terme aux invraisemblables mensonges qui sont utilisés pour renouer avec la thématique du bouc émissaire.

Répondre à ces questions, c’est d’abord rétablir la vérité des faits.

Votre gouvernement pourrait, en même temps, mettre en débat publiquement, des propositions relevant d’une orientation tout à la fois réaliste et solidaire :

• la démocratie trouverait son extension avec le droit de vote et d'éligibilité de tous les résidents étrangers aux élections locales ;

• l'accès à la nationalité française doit être facilité par des procédures élargies et stabilisées sur tout le territoire ;

• l'effectivité du droit d'asile suppose les mêmes procédures pour tous en matière de dépôt de dossiers, assorties d'un recours suspensif sur toute décision prise par l'Ofpra, et la suppression de la liste dite des pays d’origine sûrs ;

• la régularisation de tous les salariés sans papiers peut être permise par des critères stables et nationaux, en même temps que les débats parlementaires sur la réforme du Ceseda porteront sur l’attribution à tous de la carte de résident de dix ans ;

• la suppression des visas de court séjour, et, à défaut, la justification par les services consulaires d'une décision de refus, doit permettre une reprise normale de la circulation des personnes ;

• l'extension continue de la rétention administrative doit connaître un coup d'arrêt par la généralisation des procédures suspensives, respectueuses des droits des demandeurs et de leur défense, par l'interdiction absolue de la mise en Cra d'enfants, par l'existence de permanences d'avocats dans les zones d'attente ;

• les droits et taxes, telle celle de l'Ofii, sont autant d'obstacles illégitimes et dérisoires, vécus par les personnes comme méprisants. Ils doivent être ramenés à une juste mesure d'un simple acte administratif.

Ces mesures s’inscrivent toutes dans un retour à une normalité républicaine, dont le socle est l’égalité des droits. Cette base nous semble à la fois raisonnable, démocratique, et donc susceptible de rassembler largement pour faire face aux défis que notre pays affronte et va devoir affronter.

En espérant que notre démarche recueillera votre attention, je vous prie, Monsieur le Premier ministre, de recevoir l’expression de ma haute considération.

Pierre Tartakowsky
Président de la Ligue des droits de l’Homme 

»

 

20/06/2012

Droit d'asile

Les lois sécuritaires des ministres Hortefeux, Besson et Guéant, produisent toujours les mêmes effets : des injustices d'autant plus insupportables qu'elles sont absurdes et d’autant plus absurdes que leur efficacité est loin d’être évidente !

Ce n’est pas faire un procès d’intention au nouveau gouvernement que de s'interroger dès maintenant sur les raisons pour lesquelles de mauvaises lois deviendraient bonnes dès lors qu’un nouveau ministre serait chargé de les faire appliquer.

La loi CESEDA (Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile en France) fait partie de cet arsenal juridique dont une famille arménienne de Manosque pourrait avoir à supporter les conséquences sans même plus pouvoir servir d’argument électoral à l’adresse d’une population retranchée derrière sa peur de l’Autre ou la simple indifférence.

Demander l'asile en France, Nora Zakaryan 
Les avocats appelés à plaider devant la CNDA ont fait grève pour manifester contre la dégradation de leurs conditions de travail, revendiquant d’avoir à traiter des cas humains et non des dossiers.
 

Or, la famille ZAKARYAN, ayant été gravement menacée en Arménie pour des raisons politiques indépendantes de sa volonté, a dû trouver refuge parmi nous. Elle a fait une demande d’asile auprès de l’OFPRA qui, pour l’instant l’a rejetée. Un recours auprès de la CNDA (Cour Nationale du Droit d’Asile) a été déposé. C’est peu dire que le droit d’asile en France, lorsqu’il est accordé, relève de l’exception. 

Pendant ce temps, Nora ZAKARYAN, élève de 1ère L, doit passer les épreuves du baccalauréat en 2012 & en 2013, et souhaite poursuivre ses études en France, « normalement », au même titre que ses ami(e)s.

Conscients du risque de reconduite à la frontière encouru par cette famille qui ne gène en rien l’ordre public, l’ensemble du corps enseignant du Lycée Félix Esclangon à Manosque, les camarades de classe et ami(e)s de Nora, la Ligue des Droits de l’Homme de Manosque, toutes celles et tout ceux qui veulent défendre l’effectivité des droits élémentaires et du droit d’asile en particulier, demandent à ce que la famille ZAKARYAN puisse continuer de vivre sur notre territoire.

Pour lui apporter un soutien, la section locale de la LDH lance un appel à signer une pétition en ligne : « Soutien à Nora Zakaryan et à sa famille »

En tout état de cause, les cas de familles expatriées et ayant demandé à bénéficier du droit d’asile devraient être examinés avec plus de souplesse dès lors que le nouveau gouvernement dont nous sommes désormais dotés aurait à cœur de défendre les Droits de l’Homme bien plus et bien mieux que son prédécesseur.

13/06/2012

La poésie qui soigne et sauve

« Revanche » commence comme « rêve », celui d'un poète grec, Odysseus Elytis. C'est le refus de se résigner et d'accepter une vie étriquée, l’espoir solaire, ce que Camus a appelé la « pensée de midi », méditerranéenne, lucide mais optimiste. « La poésie, disait-il, commence là où la mort n’a pas le dernier mot. » Ce diagnostic, posé au plus profond du gouffre douloureux de l'œuvre majeure de Odysseus Elytis, Axion Esti, trouve un écho tout particulier, quand son pays se noie dans les comptes obtus de la finance, des banques et des bourses.

grèce,odysseus elytis,angélique ionatos  

« La poésie vient se dresser là où le rationalisme dépose ses armes, prend la relève pour avancer dans la zone interdite, faisant ainsi la preuve que c'est elle qui est encore le moins rongée par l'usure. Elle assure, dans la pureté de leur forme, la sauvegarde des données permanentes par quoi la vie demeure œuvre viable. Sans elle et sa vigilance, ces données se perdraient dans l'obscurité de la conscience, tout comme les algues deviennent indistinctes dans le fond des mers. »



Et les rêves prendront leur revanche...  par Mediapart  

Merci à La rédaction de Médiapart d’avoir recueilli d'Angélique Ionatos ce message d’espoir et d’humanité qui induit que la seule colère est impuissante.  Merci aussi à ces commentaires qui y font échos et prennent le large loin du dérisoire et du cirque qui le met en scène.

06/06/2012

Aix en Provence, la chute

De l’inculture et de la censure comme racines et terreau du « discours » d’extrême droite … Cela peut même se passer dans une ville universitaire et culturellement élitiste.
Illustration :

Cela s'appelle la censure !

« La section d'Aix-en-Provence de la Ligue des Droits de l'Homme dénonce la censure exercée par la municipalité d’Aix-en-Provence sur les acteurs culturels de la ville à des fins de racolage électoral.

2012 est le cinquantenaire de la fin de la guerre d'Algérie. Comme dans d'autres villes de France, à Aix-en-Provence aurait dû se dérouler fin mars une manifestation rappelant le passé de notre relation à l'Algérie et interrogeant le présent de ce pays. Une manifestation d'ampleur à laquelle étaient associés des acteurs culturels aixois de premier plan : La Cité du Livre, l'Institut de l'Image, Les Ecritures Croisées, le Cobiac (Collectif de bibliothécaires et intervenants en action culturelle). Au programme, deux soirées de cinéma, de littérature, de témoignages et de débats avec des invités des deux rives de la Méditerranée.

Mais avec Maryse Joissains à sa tête, Aix-en-Provence n'est plus une ville comme les autres, la presse nationale s'en fait quotidiennement l'écho.

Alors que l'organisation programmatique et matérielle de ces journées était achevée, Patricia Larnaudie, adjointe à la culture, déléguée auprès de la Cité du Livre, faisait savoir que la programmation n'était pas validée par la municipalité ; la conséquence en fut l'annulation de la manifestation. L'explication devait venir deux mois plus tard de Maryse Joissains elle-même.

"Cette manifestation aurait pu porter atteinte à l'ordre public parce qu'elle était très pro-algérienne et que la mémoire sur ces événements n'est pas tout à fait apaisée." (La Provence du 22 mai 2012)

Cette décision et sa justification appellent deux réactions.

Sur le plan culturel d'abord. Il faut bien mal connaître les personnalités qui devaient participer à cette célébration, et il faut bien mal connaître leurs œuvres pour les qualifier de "pro-algériennes".

Qui oserait prétendre que le film de Tariq Teguia qui était programmé est un film pro-algérien ?

Comment la table ronde prévue sur le thème "50 ans après l'indépendance, l'Algérie..?" aurait-elle pu être candidement "pro-algérienne"? Est-ce la projection du film de Pontecorvo La Bataille d'Alger qu'il s'agissait d’interdire ? La décision de la majorité municipale d'Aix relève de l’inculture et du schématisme simpliste.

Mais cette décision révèle surtout le cynisme politique de nos édiles. Troubles à l'ordre public ? M. Joissains pense donc que des foules de nostalgiques de l'Algérie française seraient venues perturber cette manifestation ? Au besoin les y aurait-elle encouragées ? Elle qui a assimilé l’anniversaire du 50ème anniversaire des accords d'Evian à "l'anniversaire de l'abdication de la France face à une poignée de rebelles". En tous les cas ce message envoyé à l'extrême droite aixoise, et qui s'ajoute à beaucoup d'autres, est clair : rien ne sépare M. Joissains d'un candidat du Front National.

Les fins de guerre méritent d'être célébrées par tous. La fin de la guerre d'Algérie est inscrite dans la mémoire de millions de français et d'algériens. La mémoire de la fin des combats tout simplement ; celle, exaltée, d'un peuple accédant à l'indépendance ; celle de la fin du colonialisme français. Mais aussi la mémoire des souffrances et des tortures ; celle des vies perdues au combat ou dans les attentats ; celle des vies défaites par l'arrachement brutal du sol natal.

"La mémoire de l'Algérie est pour nous traumatisante. Le propre des mémoires est d'être plurielles, contradictoires". (Régis Debray, Colloque L'Algérie et la France au XXIème siècle, 17 décembre 2011, Assemblée Nationale-Paris).

Si "la mémoire de ces événements n'est pas tout à fait apaisée" comme le pense M. Joissains, ce sont les vérités de l'histoire et le dialogue entre les hommes qui peuvent éclairer les jugements et engendrer l'apaisement. Pas la censure. »

Communiqué de la Section d’Aix-en-Provence, 5 juin 2012

Ne pas oublier non plus que la même municipalité d’Aix-en Pce, dans le cadre de MP2013 (Marseille Provence 2013 – Capitale de la Culture), est à l’origine d’un imbroglio conduisant au sabordage de l'exposition "Albert Camus, L'étranger qui nous ressemble"  .

Moralité : ce n’est pas parce que le poisson se fait rare en Méditerranée que M. Joissains doit impérativement se mêler de culture.

MP2013

Illustration      

02/06/2012

Terre d'espoir et de rêves

 Land of Hope And Dreams - Bruce Springsteen

Prends ton billet et ta valise
Le tonnerre déboule sur cette voie
Tu ne sais pas où tu vas
Mais tu sais que tu ne reviendras pas

Ma chérie, si tu es lasse
Pose ta tête sur ma poitrine
Nous emporterons ce que nous pouvons porter
Et nous laisserons le reste

De grandes roues sillonnent des champs où la lumière du soleil inonde
Retrouve-moi sur une terre d'espoir et de rêves

Je subviendrai à tes besoins
Et je resterai à tes côtés
Tu auras besoin d'un bon compagnon
Pour cette partie du voyage

Laisse derrière toi tes peines
Laisse ce jour être le dernier
Demain, il y aura du soleil
Et toute cette obscurité sera du passé

De grandes roues sillonnent des champs où la lumière du soleil inonde
Retrouve-moi sur une terre d'espoir et de rêves

Ce train... emporte des saints et ceux qui ont pêchés1*
Ce train... emporte des perdants et des gagnants1*
Ce train... emporte des putains et des joueurs1*
Ce train... emporte des âmes perdues1*
Ce train... les rêves ne seront pas déçus
Ce train... la foi sera récompensée
Ce train... écoute bien chanter les roues en acier
Ce train... les cloches de la liberté sonnent

Ce train... emporte des cœurs brisés
Ce train... des voleurs et des douces âmes défuntes
Ce train... emporte des fous des rois
Ce train... tous à bord


1* Ces quatres vers sont citées en introduction d'un chapitre de La Route de Cormac McCarthy, roman publié en 2006.

31/05/2012

L’avenir du Front de Gauche

Pour ne pas avoir à prendre le risque de laisser entrer par la fenêtre celles et ceux à qui nous avons clairement indiqué le chemin de la sortie, il nous faut aujourd’hui, à l’occasion des élections législatives, et, rien n’étant jamais acquis, « finir le job » sans faire preuve de crédulité. Les premières mesures hollandaises n’étant que de fragiles symboles, elles ne crédibilisent en rien la nouvelle équipe sociale-démocrate qui se veut apaisante. Le gouvernement français boycottera l'Euro 2012 de football en Ukraine ?  La belle jambe !

front de gauche,janette habel,pierre khalfa,evelyne sire-marin

La brume ayant souvent les mêmes effets que l’enfumage, nous préférons reprendre à notre compte les grandes lignes d’une note paruesous la signature de Janette Habel, Pierre Khalfa et Evelyne Sire-Marin, membres du Conseil national de campagne du Front de gauche et pour la dernière nommée, vice-présidente au BN de la Ligue des Droits de l’Homme, une note qui entame une réflexion sur l'avenir du Front de Gauche :

« Nous avons participé avec enthousiasme à la campagne du Front de gauche, sans être militants d'aucun des partis qui le composent et nous voulons prolonger ce combat, alors que la défaite de Nicolas Sarkozy ouvre une nouvelle période politique. Par son mode bonapartiste de gouvernement, sa course effrénée derrière le Front national, sa volonté de remettre en cause les fondements même des compromis sociaux issus de la seconde guerre mondiale, le Président sortant représentait un danger pour la démocratie. Mais la victoire de François Hollande, si elle ouvre bien des perspectives nouvelles, est loin de permettre de résoudre les problèmes que cette élection a mis en évidence, alors que le fort pourcentage de Marine Le Pen montre qu’une partie de l'électorat populaire croit trouver dans la xénophobie du Front national une solution à ses problèmes sociaux et à ses angoisses.

« L’austérité peut ne plus être une fatalité », a dit François Hollande le soir de son élection. Si l'on doit lui donner acte de cette affirmation, il faut cependant se rappeler que le programme du nouveau Président reste entaché par les dogmes du néolibéralisme qui ont partout mené à la catastrophe. Ainsi en est-il de sa volonté d’arriver à un équilibre budgétaire en 2017, qui l'obligera à couper massivement dans les dépenses publiques si la réforme de la fiscalité se révèle être a minima. (…)

Le programme défendu par le Front de gauche avait l’ambition de répondre à un enjeu majeur, celui de sortir la France de l’emprise des marchés financiers pour amorcer un nouveau mode de développement fondé sur la satisfaction des besoins sociaux, la réduction des inégalités et le respect des impératifs écologiques. La dynamique populaire qui s’est manifestée durant sa campagne a été le signe que ce programme de lutte contre les politiques néolibérales entrait en résonance avec des préoccupations profondes de nos concitoyens. Donné à moins de 5 % au début de la campagne électorale, Jean-Luc Mélenchon termine à plus de 11 % des suffrages malgré l'intense pression du vote utile. Pour celles et ceux qui veulent, à gauche, transformer la société, une nouvelle force politique a émergé qui peut avoir comme ambition de devenir majoritaire à gauche dans l’avenir. Il importe que les élections législatives à venir confirment et amplifient ce mouvement. (…)

Le budget 2013 sera décisif pour en juger. Mais la réponse dépendra aussi de notre propre capacité à faire prévaloir les solutions dont nous sommes porteurs. Le Front de gauche devra peser sur les orientations du gouvernement en s'appuyant sur les mobilisations sociales. Mais en tout état de cause il devra refuser un budget d’austérité. En revanche il devra soutenir toute mesure permettant de libérer le pays de l’emprise des marchés financiers, de contribuer à la transition écologique, de promouvoir les droits, l’égalité entre les hommes et les femmes, de renforcer les services publics et d’améliorer les rapports de forces des salariés vis-à-vis du patronat. (…)
Au-delà, dès cet été, il faut organiser une initiative politique commune à toutes les composantes du Front de gauche pour tirer les leçons de son expérience unitaire et pour penser son avenir.

21/05/2012

Eclipse momentanée

Illustrée par Kazimir Malevitch

eclipse partielle avec mona lisa,1914
Eclipse partielle avec Mona Lisa, 1914

 

15/05/2012

64 ème Nakba

Un accord a été signé ce lundi 14 mai 2012 pour mettre un terme à la grève de la faim dans les prisons israéliennes. Selon le document, les conditions de détention et le droit de visite sont améliorés, et Israël ne reconduira pas la période de détention administrative des quelque 300 prisonniers qui sont aujourd’hui derrière les barreaux sans inculpation, ni condamnation.

Cet accord a été conclu alors que les Palestiniens célèbrent aujourd’hui la « Nakba », la « catastrophe » que représente pour eux la création de l'Etat d'Israël en 1948.

nakba, 64ème anniversaire

La sirène hurle dans le centre de Ramallah en souvenir de la« Nakba », le début de l’exil pour les réfugiés palestiniens qui ont perdu leurs maisons et leurs terres pendant le conflit israélo-arabe de 1948.

Comme chaque année, les slogans affirment le droit au retour des réfugiés. Mais cette année, chacun pense aux quelque 1 600 grévistes de la faim dans les prisons israéliennes.

Pour certains, l’accord conclu ce lundi est une victoire. D’autres sont beaucoup plus sceptiques, comme Farideh, dont le fils prisonnier a cessé de s’alimenter il y a près d’un mois : « Maintenant, je ne sais rien ! Je n’ai pas vu mon fils et ses amis ! Jeudi, je vais le voir pour savoir ce qu’il va dire ».

Farideh et d’autres proches de prisonniers passent leurs journées sous les tentes qui ont fleuri dans les centres-villes de toutes les localités palestiniennes. Ici, chacun soutient le mouvement, même si les détenus mettent leur vie en péril. « Notre fils fait comme ça. Il ne mange pas et ne boit pas. Si notre fils ne fait pas comme ça, notre fils reste en prison ! », précise Farideh.

Comme chaque année, la célébration de la « Nakba»  donne lieu à des affrontements entre jeunes Palestiniens et soldats israéliens. Ce mardi, c’est à la prison israélienne d’Ofer, en Cisjordanie, que les militants palestiniens se sont donné rendez-vous.

Nicolas Falez, RFI , Jérusalem

12/05/2012

Greve de la faim pour la dignité

"Imaginons un instant deux mille prisonniers politiques en Chine engagés dans une grève de la faim depuis plusieurs semaines ; ou bien deux mille autres, mobilisés dans un mouvement similaire en Russie. Il y a peu de doute que les télévisions et les radios, si promptes à se mobiliser sur les atteintes aux droits humains dans de lointains pays, ouvriraient leurs bulletins d’information sur cette nouvelle, s’indigneraient de cette violation des droits élémentaires, appelleraient nos autorités à réagir et même à intervenir, à imposer des sanctions à Pékin ou à Moscou.

Il y a bien deux mille prisonniers politiques qui font la grève de la faim, mais en Palestine. Et l’information ne semble pas intéresser grand-monde. Mais nous le savons depuis longtemps, les Palestiniens, les Arabes, les musulmans ne sont pas vraiment des êtres humains comme les autres.

greve de la faim en israel

Revenons d’abord sur les faits, rapportés par le correspondant du Monde (« Le mou­vement de grève de la faim des pri­son­niers pales­ti­niens en Israël s’étendrait à 2 000 détenus », Lemonde.fr, 6 mai) :

« Israël éprouve des dif­fi­cultés crois­santes à contrôler le mou­vement de grève de la faim des pri­son­niers pales­ti­niens, qui ne cesse de s’étendre. Com­mencée le 17 avril pour pro­tester contre la pra­tique de la détention admi­nis­trative (qui permet de main­tenir un suspect en prison sans jugement, pendant une période de six mois renou­ve­lable), cette action regrou­perait aujourd’hui quelque 2 000 détenus, selon Addameer, l’association pales­ti­nienne de défense des droits des prisonniers. » (...)

« Deux pri­son­niers au moins sont dans un état cri­tique : Bilal Diab, âgé de 27 ans, est ori­gi­naire de Jénine, et Thaer Halahla, âgé de 33 ans, ori­gi­naire de Hébron (tous deux membres du Djihad isla­mique), ont com­mencé leur grève de la faim le 29 février. Après soixante-​​six jours sans ali­men­tation, ils sont entrés dans ce que les médecins appellent “une phase aléa­toire de survie”. Les deux hommes ont comparu, jeudi 3 mai, sur une chaise rou­lante, devant le Cour suprême d’Israël, mais celle-​​ci a renvoyé sa décision sur une éven­tuelle remise en liberté à une date ultérieure. »

« Au moins six autres pri­son­niers sont dans un état de santé jugé alarmant. Ce mou­vement de grève s’est étendu aux prin­cipaux centres de détention en Israël, et plu­sieurs chefs de file de la résis­tance pales­ti­nienne, comme Ahmad Saadat, chef du Front popu­laire pour la libé­ration de la Palestine (FPLP), l’ont rejoint. Alors que les mani­fes­ta­tions de soli­darité se mul­ti­plient dans plu­sieurs villes pales­ti­niennes, le gou­ver­nement du premier ministre israélien, Benyamin Néta­nyahou, hésite sur la conduite à adopter. »

Cette grève pose d’abord la question des détentions administratives (c’est-à-dire sans preuve et sans jugement), une pratique héritée de l’époque du mandat britannique, quand Londres luttait (1944-1948) contre le « terrorisme sioniste ». Comme je le rappelle dans De quoi la Palestine est-elle le nom ?, ces lois d’exception avaient été dénoncées par nombre de juristes, dont le docteur Moshe Dunkelblum, qui devait siéger plus tard à la Cour suprême d’Israël. Le 7 février 1946, il déclarait : « Ces ordonnances constituent une menace constante contre les citoyens. Nous, juristes, voyons en elles une violation flagrante des principes fondamentaux de la légalité, de la justice, de la discipline. Elles légalisent le plus parfait arbitraire des autorités militaires et administratives. (…) Elles dépouillent les citoyens de leurs droits et confèrent aux autorités des pouvoirs illimités. » Mais, une fois arrivés au pouvoir, les sionistes oublièrent ces critiques et retournèrent ces lois contre les Arabes.

La Cour suprême d’Israël, que certains présentent comme le garant de la démocratie dans ce pays, a rejeté l’appel de deux prisonniers administratifs en grève de la faim depuis deux mois (« Court rejects petition by Palestinian hunger strikers against detention », Haaretz, 8 mai 2012). En toute hypocrisie, elle a noté que cette pratique de la détention administrative était « une aberration dans le domaine juridique » et devait donc être utilisée « aussi peu que possible », mais les prisonniers qui avaient fait appel étaient déboutés. Il fut un temps où Israël autorisait officiellement des « pressions physiques modérées » contre les détenus palestiniens : un peu de torture, pas trop... Une décision que cette Cour suprême « humaniste » a soutenue jusqu’en 1999 (on était, à l’époque, en pleines « négociations de paix » entre Israël et l’OLP !).

La grève des prisonniers palestiniens a été relayée par les déclarations de Richard Falk, le rap­porteur spécial de l’ONU pour les droits de l’homme dans les ter­ri­toires pales­ti­niens occupés, qui s’est déclaré « écœuré par les vio­la­tions continues des droits de l’homme dans les prisons israé­liennes. Depuis 1967, 750 000 Pales­ti­niens, dont 23 000 femmes et 25 000 enfants, ont été en détention dans les prisons israé­liennes, soit près de 20% du total de la popu­lation pales­ti­nienne des ter­ri­toires occupés », a-​​t-​​il rappelé (cité dans Armin Arefi, « Israël : la dernière arme des prisonniers palestiniens », AFPS).


Conclusions : silence radio dans la plupart des médias ; aucune pression sur le gouvernement israélien ; aucune indignation morale de tous ces grands intellectuels... La terre continue de tourner et certains s’étonnent que les discours européens sur la démocratie et les droits humains suscitent surtout des ricanements dans le monde arabe.
"

"Palestine, ces prisonniers ignorés en grève de la faim"

Mardi 8 mai 2012, par Alain Gresh


10/05/2012

Pour des législatives utiles

A l’initiative de l’Association-France-Palestine-Solidarité des Alpes de Haute Provence, la LDH 04 prend toute sa place dans la préparation des prochaines élections législatives.

D’une façon générale, il s’agit de donner un sens au changement qui vient de nous être promis, de faire en sorte que l’Assemblée Nationale ne soit pas une simple chambre d’enregistrement et que la séparation des pouvoirs y soit effective notamment aux travers des questions relatives aux Droits civiques, économiques, culturels et sociaux.

Avant même que le siège parisien de notre association ne fasse parvenir le communiqué qui suit, notre participation à cette manifestation citoyenne allait donc de soi.

Cette rencontre aura lieu le 16 mai à 18h, salle de cinéma des Mées (04).

Les candidats y sont invités à exposer, s'ils étaient élus, ce que sera leur engagement. En présence de la presse locale, ils pourront notamment éclairer l’ensemble des électeurs sur les thèmes suivants :

Pour des législatives utiles

Communiqué LDH - Paris

Le résultat de l’élection présidentielle ouvre une phase politique nouvelle dont les législatives vont être un moment clé. Ce sont les députés élus qui détermineront dans une large mesure le profil du gouvernement à venir, sa capacité à traduire dans la loi ses orientations.

La Ligue des droits de l’Homme invite donc les citoyennes et les citoyens à s’inscrire dans les débats qui vont accompagner cette suite électorale, avec leurs préoccupations démocratiques, leur volonté de voir rendre effective l’égalité des droits.

La question de l’égalité a été au cœur de la présidentielle ; c’est sur ce choix de société que se sont prononcés électrices et électeurs. Il s’inscrit dans un besoin fort de voir engagé un travail de réhabilitation de la démocratie, au plein sens du terme : démocratie de représentation, démocratie dans les prises de décision, démocratie sociale et justice fiscale… Les attentes sont à la hauteur des défis : immenses.

Les relever implique que se développent les confrontations, le débat d’idées, les initiatives et que des décisions soient prises ; bref, une démocratie vivante. Pour y contribuer, la Ligue des droits de l’Homme soutient une série de propositions immédiates, inscrites dans le cadre du Pacte pour les droits et la citoyenneté, signé par plus de cinquante associations et organisations syndicales.

Elle en débattra avec les représentants des partis qui inscrivent leur candidature dans le cadre de la dynamique électorale qui a contribué à l’élection du nouveau Président, le 22 mai, à Paris, dans les locaux de l’Ageca (177, rue de Charonne, 75011 Paris).

Paris, le 9 mai 2012.

06/05/2012

Sur tous les tons.

A méditer cette réflexion d'Alexis CORBIERE trouvée sur son blog :

"Pour conclure momentanément (...), si l’on considère qu’une course de vitesse est engagée avec l’extrême droite, il est indiscutable qu’elle a encore une longueur d’avance sur nous, mais nous courrons plus vite qu’elle."

Le combat de demain devra en effet être concentré sur ce et ceux qui fait et font le lit de l'extrême droite, sur ses racines et pas seulement sur sa réprésentation.


Autrement dit :

Dessin Tardi, dégage


26/04/2012

Le jour d'après

La véritable souffrance, celle que l’on dit être une explication au vote d’extrême droite largement teinté de xénophobie, a été engendrée par la vulgarité des entreprises basées sur le profit que l’on peut tirer de l’inconscience et de l’ignorance, de ces notes insupportables interprétées chaque jour sur le piano déglingué des infos sous culturante.

La véritable souffrance déforme les visages au point de les rendre inaudibles.

http://1.bp.blogspot.com/_XtI1QtksMio/TUmEC_CvRkI/AAAAAAAADR4/m6JBS6OLi6U/s1600/Bacon+Study+for+the+Head+of+a+Screaming+Pope%252C+1952.jpg
Francis Bacon, 1909 - 1992

La priorité, l'urgence aujourd'hui : Battre le candidat des droites, le candidat sortant !


« La Ligue des droits de l’Homme se félicite du haut niveau de participation au premier tour de l’élection présidentielle.

Elle y voit la volonté du peuple français de restituer à la politique son rôle primordial, sans céder aux injonctions de se plier aux intérêts économiques.

La LDH constate l’ampleur du désaveu qui frappe le Président sortant. Ce qui a été sanctionné, c’est un quinquennat au service des puissants, caractérisé par des choix aggravant les injustices sociales, légitimant la xénophobie d’Etat, multipliant les atteintes aux droits et aux libertés, enfermant les citoyens dans une société de surveillance et dans une démocratie limitée. En s’en prenant à tout-va à diverses catégories de la population, parce qu’au chômage, selon leur origine, et même selon leur religion, en désignant des boucs émissaires et en attisant les peurs et les haines, Nicolas Sarkozy a légitimé les idées du Front national, qui s’en trouve plus fort que jamais.

Parce que notre pays ne peut continuer à se livrer, à lui-même, une guerre civile froide, parce que sa défaite est une étape nécessaire, il faut, le 6 mai 2012, barrer la route à Nicolas Sarkozy.

Mais, infliger une défaite au candidat sortant ne suffira pas à répondre aux angoisses et aux espoirs que traduit le premier tour des élections présidentielles. Ce sera au nouveau président de la République d’impulser une autre politique qui, dépassant l’alternance institutionnelle, ouvre la voie à une réelle alternative politique.

Rétablir un fonctionnement démocratique des institutions en supprimant le cumul des mandats, en assurant l’indépendance de la justice et en élisant les membres du Conseil constitutionnel, ainsi que les autres Autorités indépendantes, à une majorité des deux tiers du Parlement.

Bannir la xénophobie d’Etat en régularisant les sans-papiers qui étudient, vivent et travaillent ici, en ouvrant enfin un réel débat sur l’immigration, en accordant aux étrangers non européens le droit de vote et d’éligibilité aux élections locales, et faire reculer le racisme en cessant de stigmatiser des catégories entières de population en raison de leur origine ou de leur religion.

Restituer aux citoyens leurs libertés en réformant profondément la justice pénale, en abolissant les lois d’exception, en rétablissant la justice des mineurs dans toute son exceptionnalité, en limitant les fichiers et leur usage à des fins proportionnées, contrôlables et à la finalité établie.

Reconstruire des services publics qui soient à la disposition de tous et auxquels tous doivent avoir accès, lancer un plan d’action pour l’hébergement d’urgence et le logement social, construire une justice fiscale et sociale qui assure la progressivité de l’impôt et la redistribution des richesses.

Construire une autre Europe, aux institutions démocratiques, dégagée du dogme de la concurrence, et ouverte sur le monde.

La LDH, au cours des mois à venir, portera ces revendications comme autant de conditions nécessaires pour que notre société cesse de produire de l’injustice et de l’exclusion, pour que se construise l’espoir d’une société plus solidaire et plus libre.»

Communiqué de la LDH

Paris, le 24 avril 2012.